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9 novembre 1971. John List extermine toute sa famille avant de partir refaire sa vie.

dimanche 9 novembre 2014

Par Frédéric Lewino et Gwendoline Dos Santos.
Dix-huit ans plus tard, le meurtrier est retrouvé en Virginie grâce à une émission de télévision.

À 46 ans, John Emil List sent que sa vie s’enlise dans le New Jersey. Sa mère, qu’il loge, passe son temps à bouffer et à prier. Son épouse, souffrant de syphilis, commence à dérailler, ses mômes ne le respectent plus, ses créanciers s’impatientent. Pire encore, la banque qui l’emploie comme comptable depuis des années l’a viré voilà quelques mois. Bref, sa vie tourne au cauchemar. Celle de Hollande en pire... N’osant pas avouer son licenciement à la maison, chaque matin, il fait semblant de se rendre à son bureau, traînant en ville. Il s’endette, bientôt il lui faudra vendre son immense maison victorienne qu’il adore. Sa famille sera mise à la rue. La déchéance, la honte ! Dans un bar, il rencontre Xavier Dupont de Ligonnès, qui lui conseille de zigouiller sa mère, son épouse et ses trois gosses pour recommencer sa vie d’un bon pied...

Le 9 novembre 1971, il décide de passer à l’action. Après le départ des enfants pour l’école, John List s’empare de deux pistolets planqués dans sa voiture, puis se rend dans la cuisine où sa chère épouse boit une tasse de café assise à la table, lui tournant le dos. Ah, sa brave Helen avec qui il vient de partager dix-neuf ans de sa vie ! Il l’aime encore. Mais point de sentimentalité. Paf ! Il lui loge une balle dans la nuque avec la détermination d’un tueur d’Aqmi... Elle s’écroule, morte sur le coup. Elle, si à cheval sur la propreté, arrose de son sang la table et le sol. Dommage qu’elle ne soit plus en état de nettoyer ces dégâts. Déçu, John se détourne pour monter au troisième étage, où sa mère vit dans le petit appartement qu’il lui a aménagé sous les combles. La vieille femme de 84 ans est en train de préparer son petit déjeuner. Elle se tourne vers lui. "C’est quoi, ce bruit ?" Au lieu de répondre comme un fils bien élevé, il lève son bras et lui loge avec amour une balle au-dessus de l’oeil gauche. Le temps de s’effondrer, la vieille dame est déjà réceptionnée par saint Pierre.

Dieu n’interdit-il pas le suicide ?

John descend immédiatement dans la cave pour y chercher des sacs de couchage. Il en glisse un sous le corps de son épouse pour la traîner plus commodément dans la salle de bal. Il revient dans la cuisine, nettoie le sang pour que les enfants ne s’affolent pas lorsqu’ils reviendront de l’école. Puis il se rend au bureau de poste pour demander qu’on conserve le courrier de la famille durant plusieurs semaines pour cause d’absence. Il avertit également les livreurs de lait et de journaux de suspendre leur service. C’est qu’il pense à tout, le petit homme. Il n’oublie surtout pas de faire un saut à la banque afin d’encaisser des obligations de sa mère. De retour à la maison, il téléphone à une voisine pour lui dire de ne plus passer prendre ses enfants chaque matin afin de les amener à l’école avec les siens, prétextant un départ pour la Caroline du Nord, où la mère de son épouse a besoin de soins. John List passe encore plusieurs appels pour justifier leur absence. Toute cette agitation lui ayant donné faim, il se met à la même table où il a abattu son épouse pour casser la croûte.

Le téléphone se met à sonner : c’est sa fille Patricia, 16 ans, qui appelle de l’école pour dire qu’elle se sent malade. Elle lui demande de passer la chercher. Brave fille qui lui tire une épine du pied. Normalement, elle et son frère Fred, 13 ans, sont censés rentrer à la même heure de l’école, ce qui lui aurait compliqué la tâche pour les tuer en douceur. List ramène donc sa fille à la maison et abrège ses souffrances terrestres en lui tirant une balle dans la mâchoire. Puis il attend le retour de Fred, qu’il abat aussitôt. Reste John, 15 ans, son préféré, qui, cet après-midi-là, participe à une partie de football américain. List y assiste avant de ramener son fils à la maison comme si de rien n’était. Il sort son flingue, mais John s’en aperçoit et tente de se défendre, ne comprenant pas que son dad veut le tuer pour son bien. Enfin, le voilà allongé sur le plancher. Soulagement de List, qui sait désormais sa petite famille réunie au paradis. C’est qu’il aimerait bien les rejoindre, mais Dieu n’interdit-il pas le suicide ? Bon croyant, il est donc condamné à poursuivre sa misérable vie terrestre avec l’argent de maman.

Un paquet de lettres destinées au "découvreur"

List rassemble les cadavres de sa petite famille dans la salle de bal de sa vieille maison victorienne, les déposant sur des sacs de couchage pour qu’ils n’attrapent pas froid. Il n’y a que sa mère qu’il laisse dans le grenier, elle est trop lourde à traîner. Puis il s’installe à une table afin de rédiger une lettre à son pasteur dans laquelle il se justifie : l’écotaxe, la perte de son emploi, bla-bla, l’incapacité d’assurer le bonheur de sa famille, bla-bla, le séjour au paradis, bla-bla, la fin paisible des membres de sa famille, bla-bla, les années 1970 marquées par le péché, bla-bla, sa fille qui veut, ô horreur, devenir actrice... Il écrit quatre autres lettres, dont une à son ex-employeur, lui expliquant comment gagner de nouveaux clients. Méticuleux jusqu’au bout, il nettoie les dernières traces de sang et rassemble des livres empruntés à un voisin qu’il laisse en évidence.

Après avoir nourri le poisson rouge et dîné en solitaire, il téléphone à la professeur de théâtre de sa fille pour lui dire qu’elle sera absente plusieurs semaines, puis monte se coucher dans sa chambre. Le lendemain matin, avant de quitter la maison, il en fait le tour pour récupérer toutes les photos de famille, déchirant systématiquement son visage pour que la police ne puisse pas l’identifier, baisse le thermostat, met ensuite en marche un magnétophone qui diffuse en boucle de la musique classique. Enfin, il allume toutes les lumières de la maison avant de partir au volant de sa voiture pour l’aéroport Kennedy de New York. Il l’abandonne sur le parking pour faire croire qu’il a emprunté un vol, mais rentre en ville en bus et... disparaît. Il n’a qu’un regret : jamais, il ne saura combien de temps le mariage Borloo-Bayrou tiendra...

Un mois plus tard, le directeur de l’école de théâtre de Patricia commence à s’inquiéter de sa longue absence. D’autant que la jeune fille lui avait confié trouver bizarre l’attitude de son père au cours des derniers mois. Le 7 décembre, il décide de lui rendre visite en compagnie de sa professeur. Ils voient les lumières de la maison allumées, frappent à la porte. Personne ne répond. Ils tournent autour de la bâtisse victorienne. Ce manège intrigue un voisin, qui, les prenant pour NKM racolant des électeurs, appelle la police. Les deux visiteurs d’un soir s’expliquent. Les policiers décident de briser une fenêtre. Une terrible odeur les prend à la gorge, leur faisant comprendre qu’un drame s’est joué là. Une musique les attire vers la salle de bal. Ils traversent la cuisine dont le sol est jonché de vêtements imbibés de sang séché. Ils découvrent les corps allongés, le visage recouvert d’un morceau de tissu. Poursuivant leur exploration, ils tombent sur le cadavre de la mère dans le grenier. Enfin, ils mettent la main sur un paquet de lettres adressées au "découvreur ".

Coincé 18 ans plus tard par une émission TV

Une immense chasse à l’homme est alors lancée. La voiture de List est retrouvée à l’aéroport Kennedy de New York, mais son nom ne figure sur aucune liste de passagers. Durant des semaines, des mois, les policiers enquêtent, fouillent, interrogent des centaines de personnes. Sa photo est publiée par tous les journaux, apparaît sur toutes les chaînes de télé. Rien. List s’est littéralement évaporé. A-t-il rejoint Ayrault dans sa planque ?

Après quelques mois, la police met de côté le dossier. Les années passent. En 1989, 18 ans après le crime, les producteurs de l’émission America’s Most Wanted cherchent une affaire bien vicieuse pour relancer l’audience. Un meurtrier qui a assassiné toute sa famille, c’est exactement ce qu’il leur faut. L’émission diffusée le 21 mai 1989 montre aux millions de téléspectateurs une photo où John List a été artificiellement vieilli de vingt ans. Sa vue provoque l’émoi parmi un groupe d’amis du Colorado. Cet homme, c’est le portrait craché de leur ami comptable Robert P. Clark, qui vient de déménager en Virginie avec sa nouvelle épouse. La plupart en font un sujet de plaisanterie, mais l’un d’eux appelle tout de même la police pour lui signaler la troublante ressemblance.

Le 1er juin, des policiers frappent à la porte de Clark, qui nie formellement être List. Quand on lui trouve les mêmes empreintes digitales, il continue à nier, ce qui ne l’empêche pas d’être arrêté et inculpé. En février 1990, il reconnaît enfin être effectivement List. Il explique qu’après avoir abandonné sa voiture sur l’aéroport de New York, il a pris un bus pour Denver, dans le Colorado, où il a donc recommencé sa vie sous le nom de Clark. En 1985, il épouse une veuve de Virginie chez qui il emménage. List est condamné à la prison à vie pour chacun des cinq meurtres.

Trente ans après son crime, interviewé dans sa prison au sujet de sa première famille, il déclare : "J’ai le sentiment que, quand nous nous rencontrerons au paradis, nous ne nous préoccuperons plus des affaires terrestres. Soit ils m’auront pardonné, soit ils n’auront pas réalisé, vous savez, ce qui est arrivé. - Je suis certain que si nous nous reconnaissons l’un l’autre, nous aurons du plaisir à être ensemble, comme autrefois, quand l’époque était meilleure." List meurt en 2008, à l’âge de 82 ans, en prison. Pas sûr que sa vieille mère, son épouse et ses trois gosses l’aient accueilli à bras ouverts au paradis.
C’est également arrivé un 9 novembre
1991 - Décès d’Yves Montand à 70 ans, à Senlis.

1990 - Premier numéro de l’hebdomadaire Courrier international.

1989 - Des milliers de personnes participent à la destruction du mur de Berlin.

1970 - Le général de Gaulle décède d’une rupture d’anévrisme, quelques jours avant son 80e anniversaire.

1956 - Sartre condamne l’invasion soviétique en Hongrie, dans L’Express.

1953 - Le Cambodge devient indépendant de la France.

1945 - Chez Renault, le dernier prototype de la 4CV voit le jour.

1938 - Nuit de cristal en Allemagne. Les établissements juifs sont attaqués, 91 morts, des milliers de prisonniers déportés.

1921 - Albert Einstein reçoit le prix Nobel de physique.

1918 - Décès à Paris du poète Guillaume Apollinaire, à 38 ans, victime de la grippe espagnole.

1893 - Naissance de Jeanne Marie Le Calvé, dite la Mère Denis, célèbre lavandière de la publicité pour Vedette.

1888 - Jack l’Éventreur tue sa dernière victime, Mary Jane Kelly.

1799 - Coup d’État du 18 brumaire : Bonaparte s’empare du pouvoir.

1729 - Par le traité de Séville, les Espagnols renoncent à Gibraltar en faveur des Britanniques.

1620 - Les pèlerins du Mayflower aperçoivent la terre à Cape Cod (Massachusetts)


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