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Corse : Valls ne veut pas franchir "les lignes rouges"

lundi 4 juillet 2016

Le Premier ministre a annoncé quelques mesures lors de son passage sur l’île de Beauté. Il refuse néanmoins de donner un statut officiel à la langue corse.

Source AFP

Co-officialité du corse, amnistie des prisonniers « politiques », statut de résident : Manuel Valls a de nouveau rejeté lundi les demandes les plus symboliques des dirigeants nationalistes corses à l’occasion de sa première visite comme Premier ministre sur l’île, où il a toutefois annoncé plusieurs mesures. Très attendue, et malgré ces désaccords persistants, sa visite s’est déroulée dans une ambiance plutôt sereine, illustrée notamment par l’hommage unanime rendu à l’ex-Premier ministre Michel Rocard. Sa mémoire a été saluée à l’Assemblée de Corse par une minute de silence avant que les dirigeants nationalistes de l’île Jean-Guy Talamoni et Gilles Simeoni, puis le Premier ministre Manuel Valls, ne prennent la parole.

S’il s’était rendu à plusieurs reprises dans l’île en tant que ministre de l’Intérieur, il s’agissait du premier déplacement de Manuel Valls, qui entretient des rapports parfois tendus avec le camp « natio », depuis qu’il est à Matignon. C’est aussi la première visite de très haut niveau – président ou Premier ministre – depuis la victoire des nationalistes aux élections régionales de décembre 2015.

« L’affirmation de l’identité corse ne passera pas par l’exclusion »

Tour à tour, le président indépendantiste de l’Assemblée de Corse Jean-Guy Talamoni et le président autonomiste du conseil exécutif Gilles Simeoni ont renouvelé devant le Premier ministre les demandes qu’ils font depuis leur victoire en décembre – et notamment les plus emblématiques, statut de résident, co-officialité de la langue corse, amnistie des prisonniers « politiques ». « Ces revendications sont pour nous essentielles. En nous élisant, les Corses nous ont donné mandat de défendre ces revendications, de les porter », a résumé Jean-Guy Talamoni.

Mais sur les trois points les plus emblématiques, Manuel Valls a réitéré ses refus : « Nous avons démontré par nos échanges et notre travail que des résultats étaient possibles. [...]. [Mais] il y a des lignes rouges, vous le savez. L’affirmation de l’identité corse ne passera pas par l’exclusion, la co-officialité de la langue ou le statut de résident », a-t-il dit.
« La République a une seule langue officielle, le français, car elle est pratiquée par tous. Nous ne reviendrons pas bien sûr sur ce principe », même si elle « reconnaît, aussi, pleinement la langue corse, ciment de votre culture », a poursuivi le chef du gouvernement, dont le discours devant l’Assemblée de Corse a été peu applaudi. « J’aime la Corse », a assuré le Premier ministre, qui, s’il a globalement rejeté les demandes les plus poussées du camp nationaliste, a aussi accordé quelques garanties.

« Le chemin sera long »

La collectivité unique qui remplacera l’actuelle et les deux départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse entrera bien en vigueur au 1er janvier 2018 et sera dotée d’une « chambre des territoires » demandée par de nombreux élus corses, même si celle-ci « ne doit pas remettre en cause le principe d’une collectivité unique ». Sur la question de la langue, il a aussi annoncé la création d’une nouvelle agrégation de « langue et culture corses », et celle d’une vingtaine de postes dans l’académie, réaffirmant l’objectif d’une filière bilingue dans chaque établissement scolaire.

Enfin, concernant l’arrêté Miot, qui réduit l’impôt sur les successions en Corse, malgré la « contrainte constitutionnelle » du principe d’égalité entre les citoyens français, « j’ai la conviction qu’une voie juridique existe pour prolonger le régime dérogatoire spécifique », a dit Manuel Valls, qui était accompagné par la ministre de l’Éducation Najat Vallaud-Belkacem, le ministre de l’Aménagement du territoire Jean-Michel Baylet, la ministre du Logement Emmanuelle Cosse et le secrétaire d’État au Budget Christian Eckert. « Quand il y a des difficultés, ce n’est pas seulement à cause de l’État. Quand ça va bien, ce n’est pas seulement grâce aux institutions corses », a lancé Manuel Valls.

« Il y a eu des avancées techniques, mais, au plan politique, le gouvernement n’a pas su donner la dimension attendue et espérée pour construire une véritable solution politique », a regretté après le discours de Manuel Valls Gilles Simeoni. Même écho chez Jean-Guy Talamoni qui, tout en reconnaissant que « certaines
questions [avaient] évolué favorablement », a déploré que « d’autres questions [n’aient] pas du tout évolué ». « Le désaccord demeure ainsi total sur la question des prisonniers politiques et le chemin sera long pour arriver à un accord », a-t-il conclu.


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