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A Moscou, Vladimir Poutine reçoit des sénateurs français pour parler de l’Ukraine

jeudi 26 février 2015

A l’issue d’une courte visite à Moscou qui s’est achevée jeudi 26 février par un entretien d’une heure avec Vladimir Poutine dans sa résidence de Novo Ogariovo, Gérard Larcher, le président du Sénat français (UMP), est reparti pour Paris avec une idée bien précise dans ses valises : étendre le format « Normandie », qui associe les chefs d’État français, ukrainien, russe et la chancelière allemande pour tenter de trouver un règlement au conflit en Ukraine, aux parlements de ces quatre pays. A charge, pour ces derniers, de préparer « des propositions d’accompagnement politique » dans le cadre de l’accord de Minsk parrainé par François Hollande, Petro Porochenko, Vladimir Poutine et Angela Merkel dans la capitale biélorusse, le 12 février. « La suite, ce sera jeudi prochain puisque je vais me rendre en Allemagne rencontrer mon homologue, a précisé M. Larcher devant la presse française. C’est un processus pour lequel il faut aller vite ».

Cet « accompagnement politique » repose sur un objectif délicat : convaincre Kiev de la nécessité d’une « décentralisation profonde » impliquant, de fait, une réforme de la Constitution ukrainienne dans le but d’accorder une autonomie dans les régions de l’est dominée par les séparatistes pro-russes. Une façon de reconnaître l’influence russe dans cette partie de l’Ukraine, tout en faisant barrage à la notion de « fédéralisation » du pays soutenue par Moscou. « C’est dans le texte de Minsk et le président Poutine me l’a dit texto : je me suis rangé à la proposition de Mme Merkel et de M. Hollande », assure M. Larcher.

« Vladimir Poutine s’est montré agréable »

Le responsable français, qui était accompagné de deux autres sénateurs français, Gérard Longuet (UMP, élu tout récemment à la tête du groupe d’amitié franco-russe) et de Jean-Yves Leconte (PS) « n’exclut » pas dans sa démarche la participation d’autres assemblées, dont le Parlement européen. « Les choses sont claires, prévient-il. J’ai bien noté une forme interprétative des medias russes, mais je me situe dans la lettre, l’esprit et la dynamique des accords de Minsk. Je suis solidaire des sanctions européennes et il n’y a pas, à travers ma voix, de discordance avec la position de la France ». Une précision jugée utile après le voyage controversé de quatre parlementaires français à Damas que M. Larcher, dont c’était le premier déplacement « hors Union européenne, depuis octobre », a cependant refusé de condamner : « Cela fait partie de la liberté des parlementaires ». A Moscou, l’ambassadeur de France, Jean-Maurice Ripert, a accompagné de bout en bout la délégation.

L’initiative du président du sénat français intervient dans un contexte d’accalmie des combats dans le Donbass où l’armée ukrainienne, d’un côté, et les rebelles de l’autre ont commencé à retirer leur armement lourd. Mais aucun accord ne définit les contours terrestres d’une éventuelle « décentralisation profonde » et les inquiétudes persistent autour de Marioupol, la grande ville portuaire sur les bords de la mer d’Azov convoitée par les séparatistes. « J’ai dit à mes interlocuteurs que tout mouvement vers Marioupol constituerait une ligne rouge, une rupture des accords de Minsk », indique M. Larcher. Quelle a été la réaction russe ? « Je n’ai pas eu de réponse mais ils ont entendu », confesse le sénateur.

Les autres points sensibles abordés tel que le contrôle du cessez-le-feu, sur le terrain, des représentants de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), ou la guerre du gaz à laquelle se livrent actuellement la Russie et l’Ukraine, sont, semble-t-il, restés également assez flous. Et M. Larcher n’a pas obtenu davantage d’assurance lors du tête-à-tête qu’il a eu avec le ministre des affaires étrangères, Serguei Lavrov, au sujet de la libération de Nadjeda Savtchenko, la pilote ukrainienne. Accusée d’avoir provoqué la mort de deux journalistes russes dans l’est de l’Ukraine, la jeune femme, détenue depuis juillet dans une prison de Moscou, mène une grève de la faim depuis deux mois. Malgré tout, le sénateur s’est voulu optimiste sur le contenu de sa visite : « Vladimir Poutine s’est montré agréable, il a pris son temps ».

A aucun moment, la question des Mistral, les deux navires porte-hélicoptères dont la France a suspendu la livraison à la Russie n’a été abordée lors des échanges. Seul Gérard Longuet, reparti un peu avant le reste de la délégation, l’a fait devant la communauté des entrepreneurs français. Selon M. Larcher qui a rapporté cette confidence inédite de l’ancien ministre de la défense de Nicolas Sarkozy, le contrat signé entre la France et la Russie comportait une « clause de non-livraison » et l’exécutif français était donc « légitime » à l’utiliser.


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