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Dollar : « Calmez-vous, la BRH a assez de muscles pour faire face à la situation » -

jeudi 16 juillet 2015

Depuis environ un mois, le taux de change est entré dans une dynamique de fluctuation qui inquiète sérieusement les agents économiques. En moins de 30 jours, le dollar a pris plus de 10 points sur la gourde, passant de 46 à plus de 56 gourdes pour un dollar. Muette jusqu’ici, la banque centrale haïtienne a brisé son silence pour inviter l’opinion au calme. La BRH veille au grain et a les moyens de sa politique, rassure le gouverneur Charles Castel, qui a pris la parole mercredi en conférence de presse à la BRH.

« Avec des réserves nettes de changes d’une valeur de 860 millions de dollars et des réserves brutes équivalant à environ cinq mois d’importation, la BRH a assez de muscles pour faire face à la situation actuelle », clame le gouverneur de la BRH, qui invite la population à s’affranchir de cette idée selon laquelle la BRH n’aurait pas les moyens d’agir pour la stabilisation du taux de change.

Il n’y a pas lieu de s’affoler, tempère Charles Castel. La crise actuelle n’est autre que la manifestation d’une série de problèmes structurels exacerbés par des éléments conjoncturels. À cet effet, il a cité les déficits enregistrés dans le financement de l’énergie électrique par l’État haïtien qui est de l’ordre de 450 millions de dollars, l’importation à outrance, le déficit de production locale. Ajoutez à cela la démobilisation d’une partie de l’effectif de la Minustah que le gouverneur entrevoit comme une perte au niveau de la quantité de dollars qui devait rentrer au pays.

La BRH est encore loin d’épuiser toutes ses cartes dans cette lutte pour la stabilisation du change, à en croire les représentants du conseil de la BRH. L’un des instruments les plus importants dont disposent les dirigeants de la banque des banques pour freiner la dépréciation de la gourde est les réserves nettes de changes. Mais selon Charles Castel, cette arme doit être manipulée avec modération.

« La banque centrale a plutôt choisi dans un premier temps d’être parcimonieuse et très modérée dans l’utilisation des dollars », explique le gouverneur informant que la BRH a déjà injecté 70 millions de dollars pour renforcer l’offre de billets verts sur le marché. Ce souci de renforcer l’offre de dollars dans l’économie haïtienne a également porté les autorités monétaires à sacrifier le crédit dont l’offre a été réduite à sa plus simple expression, reconnaît le gouverneur lui-même.

En ce qui a trait à la demande des dollars très répandue pendant cette période de volatilité, la BRH a décidé de travailler à la contraction des demandes de devises américaines afin de ramener les dépenses de consommation et d’importation à des niveaux beaucoup plus gérables et supportables tenant compte des capacités du marché. Car la demande du dollar est tout aussi importante que l’offre. « C’est pour cela que face à la raréfaction de l’offre du dollar, la BRH s’est arrangée pour réduire la demande au profit du renforcement de l’offre », argue M. Castel.

Mesurer nos moyens

Vivre selon ses moyens, c’est la stratégie que renommande aux dirigeants et consommateurs haïtiens le responsable de la BRH annonçant que, dans le cadre du nouveau programme (Facilité élargie de crédit) que les autorités haïtiennes ont signé avec le FMI, ces derniers ont pris l’engagement de réduire les dépenses au niveau de l’EDH. Ce qui pourrait permettre au Trésor public de réaliser des économies d’environ 3,4 milliards de gourdes.

Au niveau de la subvention des produits pétroliers, toujours dans le cadre du programme de FMI/Haïti, l’État haïtien a pris également des engagements pour avoir un ajustement des prix à la pompe. Selon les dires du gouverneur de la BRH, en termes d’appui budgétaire de la communauté internationale à Haïti, un montant de 63 millions de dollars doit venir renflouer le budget national.
La situation de l’économie haïtienne et du change en particulier est délicate. Elle demande attention et gestion, mais elle ne dépasse pas pour autant les autorités monétaires comme certains s’amusent à le faire accroire.

Charles Castel en a profité pour attirer l’attention de la population sur un élément qui joue largement en notre faveur. C’est la baisse des prix alimentaires et du pétrole sur le marché international pendant que le dollar s’affiche nettement à la hausse. Il s’ensuit donc une baisse de nos importations de l’ordre de 4%. Sans compter la facture pétrolière qui a considérablement diminué par rapport à l’année dernière. À en croire les données fournies par le gouverneur Charles Castel, pour les huit premiers mois (octobre à mai) de l’exercice 2013-2014, la facture pétrolière était estimée à 650 millions de dollars. Pour la même période cette année, elle est passée à 450 millions de dollars. Soit une baisse de 31%.

En d’autres termes, ces baisses des prix alimentaires et pétroliers sur le marché mondial compensent dans une grande mesure la volatilité constatée sur le marché des changes en Haïti et la dépréciation de la gourde notamment. Elles ont également des incidences positives sur le prix des transports. Ainsi, aucun agent ne peut prétexter la dévalorisation de la monnaie locale pour augmenter les prix sur le marché et alimenter l’inflation, soutient le gouverneur qui croit que la politique monétaire jusque-là appliquée par la BRH devrait conduire à une accalmie dans le marché du change en Haïti

Cyprien L. Gary


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