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Est-ce qu’on peut poursuivre une personne décédée ?

jeudi 9 octobre 2014

La question est d’actualité. Après le décès de l’ex-dictateur Jean-Claude Duvalier, plus d’un se pose cette question. En cas de décès de l’auteur principal d’un crime, peut-on continuer à poursuivre les complices ? Dans ce numéro de Parenthèse juridique, nous répondons à cette question et à bien d’autres.

Le Nouvelliste : Qu’est-ce qu’une poursuite pénale ?

Me Patrick Laurent : Les poursuites pénales désignent l’ensemble des actes de procédure posés par le ministère public en vue de traduire devant une juridiction pénale auteur, co-auteur, complice d’une infraction. Les poursuites peuvent également être mises en œuvre par la victime d’une infraction, en portant plainte par exemple (réf http://droit-finances.commentcamarche.net/faq/4272-poursuites-definition). Il demeure entendu que le commissaire du gouvernement décide de l’opportunité des poursuites et peut choisir de classer un dossier sans suite.

Le Nouvelliste : Qu’est-ce qu’une affaire pénale ?

Me Patrick Laurent : Une affaire pénale désigne la prise en charge par l’institution judiciaire des conduites que la société réprime par la condamnation à une peine. Contrairement à la matière civile qui porte sur les litiges entre personnes privées, la matière pénale fait ainsi référence à la défense des valeurs, normes et comportements essentiels au bon fonctionnement de notre société.

Cette importance de la dimension collective en matière pénale explique que le procès répressif ne se réduit pas à l’affrontement entre une victime et un délinquant : il implique la présence d’un accusateur (commissaire du gouvernement), chargé de représenter les intérêts de la société, de poursuivre les auteurs d’infraction même en cas d’absence ou de défaillance de la victime, et de requérir à leur encontre la condamnation à une peine (http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/justice/fonctionnement/justice-penale/qu-est-ce-qu-affaire-penale.html).

Le Nouvelliste : Qui est chargé de la poursuite en matière pénale ?

Me Patrick Laurent : Le commissaire du gouvernement est chargé de la poursuite, il est le maître de l’action publique. L’article 1er du code d’instruction criminelle dispose : « L’action pour l’application des peines n’appartient qu’aux fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi ». L’article 13 dudit code dispose que les commissaires du gouvernement sont chargés de la recherche et de la poursuite de tous les délits ou crimes…

Le Nouvelliste : Est-ce qu’on peut poursuivre une personne décédée ?

Me Patrick Laurent : Dans l’état actuel de notre législation, on ne peut pas poursuivre un mort.

Le Nouvelliste : En cas de décès de l’auteur principal d’un crime, peut-on continuer à poursuivre les complices ?

Me Patrick Laurent : Le décès de l’auteur ou du co-auteur d’une infraction n’a pas la vertu d’anéantir l’action publique s’il existe co-auteurs ou complices survivants. Il est évident qu’on ne peut pas poursuivre le mort ; toutefois la poursuite continue contre les complices ou co-auteurs survivants.

Le Nouvelliste : Quel est le rôle de la victime dans un procès pénal ?

Me Patrick Laurent : La présence de la victime dans le procès pénal n’est pas obligatoire. Présent ou absent, le procès suit sa course. Quand la victime a constitué avocat, elle devient partie civile au procès. Dans ce cas, une action civile est greffée à l’action pénale. Le but de cette action civile est d’obtenir réparation en cas de condamnation de la personne poursuivie.

Le Nouvelliste : Quand est-ce que l’action publique peut être éteinte ?

Me Patrick Laurent : L’article 2 du code d’instruction criminelle dispose : « L’action publique, pour l’application de la peine, s’éteint par la mort du prévenu… ». Il importe de souligner qu’elle s’éteint également par la prescription.

Le Nouvelliste : L’action publique (action pénale), peut-elle s’arrêter si la victime renonce, désiste ou trouve une entente avec l’agresseur ?

Me Patrick Laurent : L’article 4 du code d’instruction criminelle précise : « La renonciation à l’action civile ne peut arrêter ni suspendre l’exercice de l’action publique. » La Cour de cassation de la République, dans un arrêt rendu en date du 14 juillet 1873 (2ème jurisprudence placée au bas de l’article 4 du CIC), consacre ce qui suit : « La loi n’admet pas de compromis en fait de crimes et de délits ; elle déclare que le désistement du plaignant ne peut éteindre la poursuite de la vindicte publique. »

Robenson Geffrard
rgeffrard@lenouvelliste.com


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