MosaikHub Magazine

La Coupe de l’America 2017 fait déjà des remous’’

mercredi 30 juillet 2014

C’est comme si la vénérable Coupe de l’America était vouée à être disputée avant même que les bateaux ne prennent le départ des régates. Certes, le paroxysme atteint en 2009 entre Oracle et Alinghi n’a pas encore été égalé, mais il se trame encore un mauvais feuilleton entre les challengers et le defender (« tenant du titre ») américain, Oracle Team USA, dans le monde feutré de la « Cup ».

La premier coup de vent est venu d’Australie. Evoquant un coût « bien supérieur à (leurs) prévisions initiales », le Hamilton Island Yacht Club, « challenger de référence » pour la 35e Coupe de l’America, a décidé de jeter l’éponge avec fracas :
« Notre défi avait été monté avec l’idée de parvenir à un format (...) qui soit accessible financièrement et où l’accent soit mis sur les qualités de navigation. Mais, au bout du compte, notre estimation du budget nécessaire pour participer est bien supérieure à nos prévisions initiales. »

Depuis l’avènement, en 2013, des multicoques AC 72 (22 mètres) – remplacés en 2017 par des AC 62 (19 mètres) – participer à la « Cup » demande un budget considérable voire indécent. Pour la dernière campagne, il fallait un minimum de 60 à 70 millions d’euros pour espérer ne pas être ridicule. Et ce fut loin d’être suffisant.

Pour conserver l’aiguière en argent, au terme d’une finale épique pour laquelle on a encore du mal à trouver les superlatifs pouvant qualifier le reversement d’Oracle Team USA, mené 8-1 avant de l’emporter 9-8 contre Emirates New Zealand, Larry Ellison avait déboursé de sa poche plus du double, soit 150 millions d’euros...

L’autre point de désaccord entre Australiens et Américains est la décision de quitter la baie de San Francisco pour San Diego (Etats-Unis) ou les Bermudes, à un millier de kilomètres au sud-est des côtes de la Caroline du Nord.
Dans un communiqué publié samedi 19 juillet, les organisateurs de la « Cup » ont pris acte de ce retrait. « Cette nouvelle nous déçoit beaucoup, déclarait à San Francisco (Californie) Russell Coutts, président-directeur général d’Oracle Team USA et directeur de l’America’s Cup Event Authority (ACEA). Traditionnellement le tenant du titre devient l’organisateur de la « Cup ».

« Nous étions très heureux de compter l’Australie parmi nos challengers et de pouvoir organiser des régates des America’s Cup World Series [premières courses de sélection] en Australie. Mais notre objectif est de continuer avec les équipes qui ont déjà présenté des défis et avec celles qui nous ont indiqué leur intention de le faire avant la date limite [pour les inscriptions] du 8 août. »


En écho, les défis européens engagés dans la prochaine édition ont publié un communiqué commun, repris sur le site de la Coupe de l’America. L’Italien Luna Rossa de Patrizio Bertelli (Prada) a été le premier à l’envoyer au médias, vendredi 25 juillet. Quelques heures plus tard, c’était au tour de Team France, tenu à bout de bras par le marin multitâche Franck Cammas, de faire de même.
Dans ce texte, Luna Rossa, Team France, Ben Ainslie Racing (Angleterre) et Artemis Racing (Suède) « confirment leur total soutien à l’événement, quelle que soit la ville d’accueil qui sera sélectionnée. [...] Et réitèrent également leur engagement à coopérer de manière constructive avec le Défender [Oracle Team USA] pour la réussite sportive et commerciale de la 35e Coupe de l’America ».

Une belle lettre d’allégeance, qui, entre les lignes, promet des belles escarmouches entre le tenant du titre et les challengers sur le protocole de 78 pages, publié le 2 juin dernier (à consulter ici). Outre les batailles sur l’aspect technique des bateaux, seront au centre des discussions les choix des plans d’eau de la finale et des régates de sélection (les America’s Cup World Series en AC 45, les qualifications et les playoffs), qui assurent une manne économique aux villes hôtes. Mais, parmi les auteurs, manque à l’appel un certain Emirates Team New Zealand, finaliste de la dernière édition.
Mardi 29 juillet, les équipes challengers ont rendez-vous à Londres pour discuter droits TV et aspects commerciaux. Les Kiwis ont décliné l’offre, ou plutôt n’ont-ils pas été conviés à la table des négociations. Après avoir entendu que l’équipe de Grant Dalton ne viendrait pas à Londres, Russell Coutts a pris les dévants.

« Je les ai appelés et leur ai dit que c’était mieux qu’ils ne viennent pas. Je ne prétends pas qu’on soit d’accord sur tout mais qu’on travaille positivement et intelligemment pour offrir un futur à l’America’s Cup. Rien que ça est un énorme pas en avant, plutôt que d’utiliser une approche conflictuelle où on se tire dessus par médias interposés. »


Les raisons du refus des Kiwis de venir à Londres sont mutltiples. Comme son voisin australien, le défi néo-zélandais considère comme une erreur le choix de quitter San Francisco, et les coûts encore trop élevés pour parvenir à mettre en péril Oracle. Comme en 2013, leur budget dépendra fortement de l’aide de l’Etat, or la période électorale approche (des législatives sont prévues en septembre 2014) et le team n’a pas envie de devenir un argument de campagne.

Au-delà de l’aspect sportif, Coutts et Dalton se vouent une haine réciproque. Quand un journaliste a demandé à Grant Dalton pourquoi les Kiwis ne figuraient pas dans le clip promotionnel de la prochaine édition, ce dernier répliquait : « Pourquoi aurions-nous envie de souffler de la fumée dans le cul d’Oracle ? » Comprendra qui voudra.

En attendant, le Team New Zeland préfère donc garder le silence du moins jusqu’au 8 août prochain. A cette date, tous les challengers devront verser 2 millions de dollars (1,5 million d’euros) de frais d’inscription à l’organisation. Dès lors, tous auront l’obligation de participer aux tables rondes afin de modifier, ou pas, le protocole et de parler ouvertement. Mais, d’ici là, tout peut encore changer.


Accueil | Contact | Plan du site | |

Creative Commons License

Promouvoir & Vulgariser la Technologie