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La mobilisation s’intensifie, la PNH augmente le niveau de violence

vendredi 20 novembre 2015

Ils étaient plusieurs dizaines de milliers de sympathisants à gagner les rues de la capitale ce mercredi, à l’appel de Fanmi Lavalas, Pitit Dessalines, LAPEH, Renmen Ayiti, d’organisations estudiantines et populaires. Cette manifestation contre la publication des résultats partiels des élections a été dispersée à coups de gaz lacrymogène et de projectiles en caoutchouc, non loin du siège du CEP. Plusieurs blessés, notamment le sénateur et candidat à la présidence Steven Irvenson Benoît, ont été décomptés.

Parce qu’ils désapprouvent les résultats préliminaires plaçant le candidat du PHTK à la tête du peloton, des leaders de l’opposition et leurs sympathisants ont été dans les rues de la capitale, ce mercredi. Les manifestants continuent de dénoncer des fraudes massives, d’exiger « le respect du verdict des urnes » par l’organisme électoral et la formation d’une commission indépendante de vérification, entre autres. Les protestataires ont tour à tour arpenté les venelles des quartiers du Bel-Air, de Delmas 2, de la route de Delmas, avant d’atteindre Pétion-Ville. Alors que les organisateurs prévoyaient de manifester devant le siège du CEP, avant de descendre au centre-ville de Port-au-Prince, la manifestation a été dispersée par des agents du CIMO non loin de la rue Stephen Archer. Les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogène et de projectiles en caoutchouc pour empêcher les protestataires d’atteindre les parages de l’institution électorale. En colère, des manifestants ont brisé les pare-brise des véhicules se trouvant sur leur passage. Présent dans à la manifestation, le candidat à la présidence Steven Benoît a été atteint de plus de deux projectiles en caoutchouc. Le sénateur en fonction explique que la manifestation se déroulait dans le calme quand les policiers ont décidé de la disperser. « J’ignore qui leur a intimé l’ordre de s’attaquer au peuple, mais ils l’ont fait. On a dénombré plusieurs blessés. Ils m’ont également tiré dessus. Je suis atteint à la tête. C’est dommage », s’est-il plaint. Le sénateur Benoît a été soigné dans un centre hospitalier de Pétion-Ville avant de regagner son domicile en fin de journée. Le cheval sur lequel était monté le candidat à la présidence Moïse Jean-Charles a été atteint de plusieurs projectiles. Selon les témoignages d’Assad Volcy, Moïse Jean-Charles a chuté du cheval et a eu des égratignures au visage. Assad Volcy croit que la réaction « brutale » des forces de l’ordre a été commanditée par Sandra Honoré et le Core Group. « Cela prouve que le peuple haïtien approche vers la victoire finale. Aujourd’hui, il y a une unité entre LAPEH, Fanmi Lavalas, Pitit Dessalines et les autres candidats à la présidence. C’est une réponse au CEP qui refuse de former une commission indépendante de vérification », a-t-il fait savoir, expliquant que cette unité est un message « fort » qui indique qu’on ne peut pas voler le vote du peuple haïtien. « Le pouvoir n’aura d’autre choix, si Michel Martelly persiste à maintenir Jovenel Moïse dans la course, il risque de voir nos actions déboucher sur une grande insurrection populaire », avertit Assad Volcy. Si la police a dispersé la manif à Pétion-Ville, elle a poursuivi ses opérations ailleurs dans la région métropolitaine. Des agents de la PNH ont poursuivi et intercepté une voiture transportant des sympathisants de Renmen Ayiti. Ces derniers étaient en train de se rendre au cabinet de Jean Henry Céant après la dispersion de la manif. Contacté par Le Nouvelliste dans la soirée, le notaire, candidat à la présidence, confirme les faits qu’il assimile à une tentative d’intimidation. « Les policiers ont suivi une voiture dans laquelle se trouvaient mes partisans. Ils avaient l’impression que je m’y trouvais et ont voulu m’interpeller », explique-t-il, indiquant avoir fait appel à ses avocats après que les policiers ont voulu perquisitionner le véhicule. Avant de se rencontrer à la rue St-Martin (Bel-Air), les manifestants se sont rassemblés dans divers endroits, notamment devant l’église St-Jean Bosco, à Delmas 2, au Pont-Rouge, devant la Faculté d’ethnologie et à Carrefour. Cette fois, pour une fois, les divers secteurs ont trouvé opportun de faire front. « Kote moun ki te di nou divize yo ? Nou pral wè si se vre ! », scande un militant, tenant une photo de Maryse Narcisse et portant un tee-shirt de Moïse Jean-Charles. L’ancien sénateur Louis Gérald Gilles croit que c’est dans l’unité que tous les candidats arriveront à dévier ce coup d’Etat électoral qui augure d’un futur sombre pour le pays. « Je crois que Michel Martelly comprendra l’impérieuse nécessité de reculer sur ce plan macabre qu’il fomente contre le pays », analyse-t-il. Si Assad Volcy parle d’unité, André Michel, lui, parle de manifestation de l’opposition plurielle. « Nous voulons signaler que ce coup d’Etat électoral organisé par Michel Martelly, avec la complicité de la communauté internationale, ne passera pas. Le peuple ne va pas l’accepter », a fait savoir l’avocat André Michel, main dans la main avec l’ancien candidat au Sénat, René Civil, qui ne cesse de réclamer l’instauration d’un gouvernement de transition. Pour sa part, Myrlande Manigat évoque une unité solennelle. Présent également à la marche, le bruyant avocat Reynold Georges veut dénoncer ce qu’il appelle une « sélection ». « Pierre-Louis Opont ne peut pas organiser d’élections dans le pays. Il y a un principe en droit stipulant que la fraude corrompt tout. Aujourd’hui, le président du CEP reconnaît qu’il y a eu des cas de fraude. Donc, ces élections sont à refaire », argue-t-il. Cette manifestation coïncide avec la célébration du 212e anniversaire de la bataille de Vertières. Le sénateur Jean-Baptiste Bien-Aimé croit qu’aujourd’hui, il faut une autre bataille de l’indépendance pour libérer le pays du « projet dictatorial de Michel Martelly ». En plus des partisans des candidats à la présidence, des proches de candidats aux municipalités ont été également sur le béton. Les manifestants n’ont pas raté l’occasion de lancer des propos injurieux à l’égard de Michel Martelly, d’Evans Paul et de Jovenel Moïse, candidat à la présidence du PHTK. Cette journée de manifestation succède au refus du CEP d’instituer une commission indépendante de vérification (réclamer par 8 candidats), le recours au BCEN du candidat Maryse Narcisse exigeant une vérification au Centre de tabulation des votes, et la publication des résultats partiels des municipales. Tous les projecteurs sont fixés dorénavant sur le CEP qui doit publier les résultats définitifs tandis que la mobilisation semble s’intensifier. Alors que les manifestants parcouraient les rues de la capitale, le président de la République, Michel Joseph Martelly, accompagné du Premier ministre Evans Paul, a déposé une gerbe de fleurs au Musée du Panthéon National Haitien (MUPANAH) en mémoire des artisans de la mémorable bataille de Vertières, livrée le 18 novembre 1803 contre l’armée expéditionnaire française. « En présence du président du Sénat de la République, M. Andris Riché, de représentants de la Cour de cassation, des membres du gouvernement, de hauts fonctionnaires de l’Etat et du commandement de la Police nationale d’Haïti, le chef de l’Etat a rendu un hommage vibrant à nos illustres ancêtres de l’armée indigène qui réalisèrent la fameuse épopée de 1803 à Vertières, l’ultime bataille pour nous forger cette nation libre, fière et indépendante », rapporte un communiqué de la présidence. « Le président de la République demeure convaincu, 212 ans après, que la bataille de Vertières, à travers ses valeurs d’unité et d’abnégation, doit continuer à servir de guide à nos actions politiques pour poursuivre l’œuvre commune de construction de notre chère Haïti », a conclu la note du palais national.
Jean Daniel Sénat jdsenat@lenouvelliste.com


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