MosaikHub Magazine

Les femmes universitaires perçues comme femmes de pouvoir

samedi 28 mars 2015

« Femmes universitaires, femmes de pouvoir en Haïti et dans les Caraïbes », est le thème autour duquel des spécialistes, cubaines, haïtiennes québécoises et dominicaines sont intervenues jeudi à l’Université Quisqueya, Port-au-Prince, dans le cadre d’un colloque régional organisé par l’Agence universitaire de la francophonie (AUF) en partenariat avec le ministère à la Condition féminine et aux Droits des femmes dans le cadre de la quinzaine de la francophonie.

Denyse Côté, Rose-Lourdes Elysée, María Isabel Soldevilla, Yolanda Wood, respectivement Québécoise, Haïtienne, Dominicaine et Cubaine, ont dressé des portraits de la situation des femmes dans leurs pays à travers les différents espaces, notamment dans le secteur de l’université, de la culture, de l’art, des finances et des médias. Ces portraits ont mis l’accent sur le chemin parcouru et le chemin qui reste encore à parcourir, sur les acquis mais aussi sur les disparités.

Intervenant sur le thème « Les politiques publiques en faveur des femmes et notamment de l’accès des femmes à l’éducation », la coordonnatrice générale de l’Unité centrale de gestion des partenariats public-privé (UCGPPP) au ministère de l’Economie et des Finances, Rose-Lourdes Elysée, a dressé un tableau pour le moins acceptable.

74% de femmes sont alphabétisés pour 79% d’hommes, a-t-elle avancé, selon une enquête réalisée en 2012 sur un échantillon de près de 94 500 femmes et 10 000 hommes, âgés entre 15 et 59 ans. Les résultats de cette enquête ont aussi révélé que 49% de femmes pour 54% d’hommes ont atteint le niveau secondaire ou plus.

Il a été aussi confirmé une tendance à l’amélioration de l’accès à l’éducation et surtout de la rétention des filles et des femmes à l’école lors du recensement scolaire 2010-2011 du ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle. On compte 36% de filles contre 37% de garçons au niveau primaire alors qu’au niveau secondaire, il y a 43% de femmes contre 46% d’hommes.

Au niveau professionnel, d’après les données fournies par l’Institut nationale de la formation professionnelle datant de 2013, 42% des personnes inscrites au cours professionnel sont des femmes alors qu’au niveau supérieur il y a 6% de femmes pour 8% d’hommes.

Des politiques publiques en faveur des femmes

Aujourd’hui, le décret portant sur l’organisation de l’administration de l’État ne fait pas expressément mention de différence entre les hommes et les femmes, souligne la coordonnatrice de l’UCGPPP. Il en est de même pour le payroll de l’administration.

Bien que le barème intermédiaire des salaires contienne des failles, reconnaît Rose-Lourdes Elysée, il ne fait pas de différence entre un chef ou une cheffe de service, entre un pensionnaire ou une pensionnaire. « Tout le monde est traité de la même façon. Le salaire minimum ne différencie pas la travailleuse du travailleur », a-t-elle argué, notant, par contre, que les processus de recrutement ont souvent démontré un clientélisme, un népotisme, une inégalité et une iniquité selon le genre. Elle estime que des dispositifs seront mis en place pour corriger cela.

Se souvenant de sa première visite en Haïti dans les années 80, Denyse Côté, directrice de l’Observatoire sur le développement régional et l’analyse différenciée selon les sexes (OREGAD) à l’Université du Québec en Outaouais, qui a profité de l’occasion pour livrer son impression sur la situation des femmes en Haïti, estime que de grandes avancées ont été réalisées et surtout à tous les niveaux sur la question des droits des femmes en Haïti. « Certes, de grands pas ont été franchis, mais ce n’est pas suffisant », croit-elle, plaidant en faveur d’un changement de comportement et de conscience sociale ainsi que d’une réforme politique et juridique.

Si certains pensent qu’on devrait commencer par scolariser et alphabétiser les femmes les plus démunies en Haïti, Denyse Côté suggère parallèlement de permettre aux femmes d’avoir accès à l’université. Car Haïti a besoin d’une classe moyenne bien formée pour sortir de ce bourbier dans lequel il se trouve.

« Il est aussi essentiel, selon elle, de valoriser les savoirs féminins et d’accueillir les savoirs féministes proprement haïtiens dans les universités », suggère Denyse Côté qui intervenait sur le thème « Savoirs féminins, savoirs féministes : des savoirs universitaires ».

Situation discriminatoire des femmes dans les médias dominicains

Au cours de son intervention au colloque, María Isabel Soldevila, directrice en chef du journal Listin Diaro, a présenté un tableau sombre de la situation des femmes au sein des médias en République dominicaine. Une journaliste-reporter n’a pas droit au même salaire qu’un journaliste-reporter en République dominicaine. Le salaire moyen d’un journaliste est supérieur par rapport à celui d’une journaliste.

« À la base de la pyramide des médias en République dominicaine, hommes et femmes partagent les travaux, mais avec une différence de salaire de 30% », a-t-elle expliqué.

Quant au poste de gouvernance dans les médias, la présence des femmes est très timide. « On décompte une directrice de la tv et deux rédactrices en chef », fait-elle savoir en citant les résultats d’un rapport de l’UNESCO datant de 2011 sur l’état des femmes dans les médias.

Dans ce rapport, il est démontré clairement que 83% des postes de gouvernance sont occupés par les hommes. Et les femmes qui occupent les 20% des postes de haute direction touchent un salaire de moins de 18% de celui d’un homme.

La femme à Cuba est protagoniste dans tous les sens, elle est active

S’il reste beaucoup à faire en Haïti et en République dominicaine, à Cuba, il y a de grands pas qui ont été franchis par rapport aux droits des femmes. La femme cubaine constitue 66% du personnel technique du pays. Et 17 % du personnel scientifique intellectuel et technique du pays sont des femmes, a précisé Yolanda Wood, directrice du centre d’Etudes caribéennes, qui intervenait sur la place des femmes à Cuba dans l’éducation et dans la culture.

64 % de la force du travail du pays repose sur les femmes diplômées alors que dans les années 50, seulement 17% de femmes travaillaient, a poursuivi la professeure à l’Université de La Havane, précisant que les salaires sont identiques dans tous les postes entre hommes et femmes.

« Ces résultats mettent en évidence le caractère massif et sans distinction de genre, d’âge, de race de l’éducation cubaine », a conclu Yolanda Wood.

AUTEUR

Edrid St Juste

edrid@lenouvelliste.com


Accueil | Contact | Plan du site | |

Creative Commons License

Promouvoir & Vulgariser la Technologie