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Les incroyables trésors de l’Histoire : le rhinocéros de Louis XV fête ses 245 ans

dimanche 9 novembre 2014

VIDÉO. Offert à Louis XV, il survécut 23 ans à la ménagerie de Versailles avant d’être sabré par un sans-culottes et exposé au Muséum de Paris.

Par Frédéric Lewino et Anne-Sophie Jahn

Depuis vingt ans, le vieux rhinocéros trône paisiblement dans un coin de la Grande Galerie du Muséum national d’histoire naturelle de Paris. C’est le patriarche de cette fabuleuse arche de Noé. Avec 245 ans d’âge, c’est probablement le tout premier animal de grande taille à avoir été naturalisé. Si on le regarde de près, malgré le fantastique travail de restauration du taxidermiste Jack Thiney, on peut observer ses nombreuses cicatrices.

Ce rhinocéros indien à une seule corne naquit probablement la même année que Napoléon (1769), quelque part dans le nord du Bengale. Capturé jeune, il est amené à Chandernagor où le gouverneur de ce comptoir français l’acquiert pour en faire don à Louis XV. Voilà l’animal embarqué à bord du navire le Duc de Praslin de la Compagnie des Indes pour effectuer la traversée jusqu’en France. Parqué sur le pont, le jeune animal ne manque pas de caractère. S’il déteste les cochons voyageant en sa compagnie, il se fait l’ami d’une petite chèvre, la laissant brouter du foin entre ses pattes.

Six mois en mer puis dix-huit jours sur la route

Après six mois de navigation, le navire aborde à Lorient où le précieux passager patiente deux mois dans une étable, le temps de lui construire un carrosse à sa taille. Puis il prend la route, accompagné par trois personnes, dont deux bouchers, pouvant faire office de vétérinaire en cas de besoin. Ceux-ci enduisent sa peau d’huile de poisson pour l’entretenir et lui donnent chaque jour vingt kilos de foin, douze kilos de son et treize kilos d’avoine.

L’animal est tellement lourd que le chariot finit par se briser en deux, obligeant à faire halte pour le réparer. Le 11 septembre 1770, après dix-huit jours de trajet, le rhinocéros arrive à Versailles, où il prend place dans la ménagerie du roi. On a peu de détail sur son séjour, sinon que son enclos mesurait 23 mètres de long sur 20 de large et comprenait un bassin. C’est la star. Les curieux se précipitent pour voir le monstre, la noblesse accourt de toute l’Europe. Deux personnes qui pénétrèrent chez lui sans son autorisation le paient de leur vie. Lors de la Révolution française, certains sans-culottes veulent libérer les animaux de la ménagerie, ces malheureuses victimes du pouvoir royal, mais le lion et le rhinocéros ont vite fait de les décourager. À ce moment-là, il ne restait plus que le rhinocéros, un lion du Sénégal, un bubale, un quagga et quelques paons. La situation empirant à Versailles, l’intendant de la ménagerie demande au directeur du Jardin national des plantes, Bernardin de Saint-Pierre, d’accueillir ces animaux. Celui-ci accepte, créant par ce fait la ménagerie du Jardin des plantes.

Odeur effroyable

C’est lors de son transfert, le 23 septembre 1793, que le rhinocéros aurait été tué par un coup de sabre et ramené à Versailles. Encore que, selon Cuvier, l’animal se serait simplement noyé dans son bassin en juillet 1793. Quoi qu’il en soit, la dépouille finit par être chargée sur une charrette pour être transportée au Jardin des plantes pour autopsie. Elle est placée sous une tente gardée jour et nuit contre les chiens, où elle finit par exhaler une odeur effroyable.


Les incroyables trésors de l’Histoire : le... by LePoint
C’est seulement trois semaines plus tard que l’autopsie est finalement entamée par Jean-Claude Mertrud et Félix Vicq d’Azyr devant de nombreux curieux. Il est dit que la mort de ce dernier, un an plus tard, serait due à une maladie attrapée lors de la dissection. Les organes sont sortis un par un, observés et dessinés. Le squelette est nettoyé et remonté. Il est aujourd’hui visible dans la galerie d’anatomie comparée, tandis que la peau est naturalisée sur une armature cylindrique de chêne et de cerceaux de noisetier. C’est elle qui trône aujourd’hui dans la Grande Galerie du Muséum.


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