MosaikHub Magazine

Qui arrêtera la conquête de Daech ?

dimanche 24 mai 2015

Les sites archéologiques sont menacés par les djihadistes de l’organisation État islamique

L’État islamique (Daech) est-il en train de réussir son pari de bâtir un « État » ? Si les fondations administratives sont loin d’être posées pour son projet de « califat », le groupe terroriste, fort d’une armée multinationale de plusieurs dizaines de milliers de combattants occupe, après la prise ce jeudi de la cité antique de Palmyre, un territoire à cheval sur la Syrie et l’Irak de plus en plus vaste.

La frontière entre ces deux pays est désormais caduque. L’« empire » de Daech s’étend sur 300.000 km² , soit « l’équivalent du Royaume-Uni avec l’Irlande, une population de huit millions de personnes, où il contrôle les ressources, prélève l’impôt », nous décrit Fabrice Balanche, expert reconnu de la Syrie (*). Palmyre, au-delà du symbole et du danger qui pèse sur son joyau patrimonial et sa prison emblématique, ouvre une nouvelle route vers l’Irak, et Ramadi, ville prise la semaine dernière par le groupe djihadiste. Palmyre représente aussi « un carrefour de communication, d’où Daech peut lancer des raids vers Homs, Deir-ez-Zor, ou même Damas ».

L’impuissance de la coalition

La capitale syrienne est-elle dans la ligne de mire djihadiste ? Jean-Pierre Filiu, autre spécialiste de la Syrie et professeur à Sciences Po, ne croit guère à cette hypothèse. « Il n’y aura pas de bataille de Damas. Il y en a déjà une depuis 2013 entre Bachar et les révolutionnaires. Le centre est tenu par le régime, la banlieue par la rébellion ». La chute du régime syrien n’est pas pour demain, pense aussi Fabrice Balanche : « Bachar al-Assad va se concentrer sur l’ouest du pays, où il est soutenu par les minorités ».

La conquête de la Syrie s’inscrit depuis longtemps dans les plans de l’organisation d’Abou Bakr Al-Baghdadi. Dès 2006, dans une prison américaine en Irak, l’actuel leader de Daech y faisait déjà allusion. Chaque jour, l’État islamique s’enracine donc un peu plus alors que la communauté internationale affiche son impuissance. « Que peut-elle faire ? » s’interroge Fabrice Balanche, « la Turquie – une vraie passoire – refuse que la coalition utilise ses bases, l’Arabie saoudite et le Qatar jouent encore un rôle ambigu… » Même certains pays, partie intégrante de la coalition anti-État islamique montée à l’automne 2014, ont « intérêt à ce que Daech s’implante… » Pour in fine « casser l’axe pro-Iranien » qui se dessinait. Quant à l’efficacité des raids aériens américains et français, l’impact ne se fera sentir que si « des alliés finissent le travail au sol ». Comme ce fut le cas à Kobané, avec le soutien des Kurdes. Pour le moment, les Occidentaux n’envoient que des « conseillers ».

Avec la chute de l’oasis de Palmyre, l’horizon s’assombrit un peu plus sur le terrain syro-irakien. On se dirigerait, prédit Fabrice Balanche vers « l’éclatement de la Syrie et de l’Irak sur des bases ethnico-confessionnelles, ce qui veut dire nettoyage ethnique, déplacement de populations, avec l’inexorable montée en puissance de Daech ». La lutte contre l’État islamique, a régulièrement martelé Barack Obama, serait longue et comporterait « des avancées » et « des reculs ».


Accueil | Contact | Plan du site | |

Creative Commons License

Promouvoir & Vulgariser la Technologie