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Martelly et Lamothe rencontrent le CEP, pas une gourde pour aller vers des élections de plus en plus incertaines

jeudi 18 septembre 2014

Le chef de l’Etat consulte les membres du CEP sur la possibilité de trouver des provisions légales pour réaliser les élections dans le plus bref délai en conciliant l’article 19.1 de la loi électorale de 2013 et l’article 12 de l’Accord d’El Rancho. La question a été abordée, mardi, lors d’une rencontre au palais national avec les conseillers électoraux, à l’exception de Max Mathurin et de Léopold Berlanger.

Alors qu’on attendait la reprise du dialogue, c’est une rencontre que la présidence annonce avec le CEP. Impuissant face au refus du groupe des six sénateurs de voter les amendements à la loi électorale, le président de la République se tourne vers le CEP pour trouver une formule magique. Au palais national, mardi, Michel Martelly a rencontré les membres du CEP « sur la possibilité de trouver des provisions légales pour réaliser les élections en conciliant l’article 19.1 de la loi électorale de 2013 et l’article 12 de l’Accord d’El Rancho », a confié au Nouvelliste le conseiller électoral Néhémy Joseph.

Le président Martelly, a-t-il ajouté, voulait avoir le point de vue des sept conseillers qui étaient présents à la rencontre sur la possibilité d’utiliser cette option au cas où l’amendement de la loi électorale ne serait pas voté par les sénateurs.

Selon un communiqué de la présidence, pendant plus d’une heure, le chef de l’Etat et sept des conseillers ont échangé sur les pas déjà franchis et les étapes à venir dans le cadre de la réalisation des prochaines compétitions électorales dans le pays. « S’étant déroulée dans une ambiance très cordiale, cette rencontre a été l’occasion pour le président de la République de réaffirmer la détermination de son administration à faciliter, dans les meilleurs délais, la tenue du scrutin devant permettre de renouveler les deux tiers du Sénat, la totalité de la Chambre des députés et les membres des collectivités territoriales », a rapporté le communiqué.

« Les conseillers électoraux, lit-on dans le communiqué, très satisfaits de l’initiative du chef de l’Etat, lui ont présenté les différentes avancées réalisées. Ils ont parlé, entre autres, du processus de recrutement des membres des BED et des BEC, et n’ont pas manqué de réitérer leur volonté de réaliser des élections crédibles et transparentes. Ils ont aussi rappelé qu’ils sont en attente des amendements à la loi électorale qui doivent leur permettre de conduire le processus sans ambages. »

Selon le palais national, à l’issue de la rencontre, le président et les conseillers ont convenu de se revoir pour continuer à aplanir le sentier électoral. « Le président Martelly a, une fois de plus, renouvelé sa foi dans l’organisation d’élections libres, honnêtes, transparentes et inclusives pour renouveler le personnel politique et ainsi maintenir le pays sur les rails de la démocratie et de l’Etat de droit. »

Le conseiller électoral Néhémy Joseph a indiqué au Nouvelliste que leur position n’a pas changé. « Nous avons déjà écrit au président pour lui dire que les élections ne pourront pas avoir lieu en octobre prochain et notre position demeure la même, a-t-il dit. Ce n’est pas à nous de doter le CEP d’un cadre légal. Le Parlement a la responsabilité de voter les lois et l’exécutif de les publier. S’il y a des inconvénients majeurs qui empêchent que la loi soit votée et publiée, que les acteurs discutent entre eux pour trouver une décision consensuelle ayant force de loi pour mettre à la disposition du CEP. »

Alors que le communiqué du palais national sur la rencontre avec le CEP n’a mentionné nulle part la présence du Premier ministre, c’est Me Néhémy Joseph qui a souligné au Nouvelliste la présence de Laurent Lamothe aux côtés de Michel Martelly à cette réunion. « Ils ont été assez sages et ont compris notre position, car nous avons seulement la responsabilité technique de réaliser les élections, a-t-il avancé. Ils sont allés dans le même sens que nous en priorisant le dialogue avec tous les acteurs pour doter le Conseil électoral d‘un cadre légal l’habilitant à réaliser les élections. »

« Le chef de l’Etat et le Premier ministre ont encouragé les conseillers électoraux à mettre en branle la machine électorale, pour être prêts techniquement à réaliser les élections dès que nous aurons la loi électorale à notre disposition », a rapporté le conseiller Joseph, qui a indiqué au Nouvelliste qu’ils ont annoncé au président Martelly la publication de la liste des personnes retenues pour la formation des BED. Cette liste a été effectivement publiée mercredi.

« Après les BED, nous nous consacrerons aux examens de concours pour les BEC, a-t-il annoncé. S’il n’y a pas de difficultés financières, nous ferons tout pour installer les membres des BEC, ainsi que ceux des BED, avant la fin du mois de septembre. Une façon de rendre fonctionnelle la machine électorale ».

Le CEP fait face à de grandes difficultés financières

« Les récents voyages que nous avons effectués dans le cadre du recrutement des membres des BED, les conseillers électoraux ont dû puiser dans leurs ressources personnelles pour acheter le carburant et payer les frais de déplacement, a déploré le conseiller électoral Néhémy Joseph. Tout ceci parce que la ministre des Finances a passé des consignes aux comptables des deniers publics de signer seulement ce qui a rapport avec les salaires. »

« Depuis plus d’un mois, les conseillers électoraux n’ont pas de frais de fonctionnement, a-t-il dénoncé. Et en parallèle, nous devons travailler pour faire fonctionner la machine. Il faut que l’exécutif, à travers ce dont l’Etat dispose comme moyens passe des instructions au ministère des Finances pour qu’il y ait une mainlevée en ce qui a rapport à l’exécution des réquisitions ».

L’Etat haïtien a déjà déposé des millions de dollars dans le fonds géré par le Programme des Nations unies pour le développement(PNUD), a-t-il dit. « Je crois qu’il serait mieux de mettre cet argent réservé aux opérations électorales à la disposition du CEP pour son fonctionnement. Ce qui aiderait le Conseil à mieux se préparer en attendant le déclanchement des opérations électorales », a ajouté Me Néhémy.

Selon lui, les conseillers électoraux évoluent dans une situation très précaire qui peut entacher leur crédibilité et leur honnêteté. « Le conseiller électoral, a-t-il souligné, occupe une fonction fragile et ne devrait s’exposer à aucun risque de corruption. Mais le fait est que le salaire et les frais de fonctionnement du conseiller sont insignifiants aujourd’hui. Une situation qui met le conseiller dans une posture très fragile. Il faut les mettre dans une situation de sécurité financière pour ne pas les exposer à la tentation. »

« Si cela persiste, je démissionnerai »

Visiblement, Me Néhémy Joseph en a marre de cette situation. « Si ça ne change pas, je m’en vais, a-t-il menacé dans cette interview accordée au Nouvelliste mercredi au CEP. Je suis prêt à travailler, je fais tout mon effort. Mais je suis un citoyen, un cadre qui se met au service de son pays, pour travailler au service de la patrie. Donc, si je ne trouve pas les moyens pour le faire, je serai obligé de partir. Au lieu de porter la responsabilité de l’échec, je rentrerai chez moi. Mon cabinet est là, il m’attend. Je n’ai aucun problème pour réaliser tout ce qui est possible, mais à l’impossible nul n’est tenu. »

A date, on ne savait pas que le CEP avait des soucis économiques pour fonctionner, puisque la Primature n’a pas raté une occasion pour dire qu’elle met des moyens à la disposition de l’institution électorale. Parallèlement, alors que les partis politiques fixent des conditions pour rencontrer le président Martelly, le palais national, qui a l’initiative, n’a encore communiqué ni la date ni le lieu pour la série de rencontres annoncée par la présidence.
Robenson Geffrard et Louis-Joseph Olivier


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