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FF - Angleterre : Sterling a basculé du bon côté

dimanche 8 juin 2014

A quelques jours de l’ouverture du Mondial au Brésil, francefootball.fr vous propose des portraits de joueurs qui devraient faire parler d’eux. Après l’Espagnol Gérard Piqué et l’Ivoirien Serge Aurier, coup de projecteur sur Raheem Sterling, le jeune ailier de Liverpool et de l’Angleterre.

Il semble implausible aujourd’hui, vu le rôle de premier plan qu’il a joué dans la meilleure saison de Liverpool en Championnat depuis 24 ans, que, il y a seulement neuf mois de cela, Raheem Sterling courait le danger de devenir un autre des talents perdus de l’Angleterre. La réputation de l’adolescent allait grandissant, mais plus en dehors que sur le terrain, et pas de la manière la plus flatteuse. Sa forme avait péréclité au point qu’il passa les quatre premiers mois de la saison à ruminer sa frustration sur le banc. Une discussion à coeur ouvert avec Brendan Rodgers changea tout cela. « Il a besoin de donner de la stabilité à sa vie, de se rendre compte de l’opportunité qui lui est offerte dans l’un des plus grands clubs du monde, et de se concentrer exclusivement sur sa carrière », dit le manager de Liverpool. Rodgers critique rarement ses joueurs en public. L’ancien coach de l’académie de Chelsea est particulièrement attentif à éviter de se montrer négatif vis-à-vis des jeunes. Mais Sterling testait sa patience. Le jour même où Rodgers avait lancé son avertissement, l’ailier des Reds avait été reconnu non coupable d’une agression sur la personne d’une ancienne compagne. Il avait aussi été inculpé de coups et blessures plus tôt la même année, en 2013. Là aussi, il y avait eu non-lieu. Mais deux comparutions devant un tribunal en douze mois avaient forcé le manager de Liverpool à durcir le ton. Sterling sut l’écouter - comme il avait su écouter d’autres mentors auparavant, par bonheur - et sa carrière, son club et sa sélection en ont largement profité.

Sa mère craignait qu’il rejoigne un gang de St Raphael, et choisit de quitter Londres alors que la réussite de son fils à QPR avait attiré l’attention des plus grands clubs de Premier League.
Le joueur de 19 ans commença par fuir les tentations du centre-ville de Liverpool pour aller s’installer dans la ville côtière de Southport, comme d’autres footballeurs de la Merseyside l’avaient fait avant lui, dont Kenny Dalglish et Steven Gerrard. Ce fut un pas décisif dans la vie de l’adolescent. Sa famille avait émigré de Kingston, en Jamaïque, quand il avait six ans, pour s’établir dans le quartier de St Raphael, dans le nord-ouest de Londres, à deux pas de Wembley. Sterling attira rapidement l’attention des scouts de Queen’s Park Rangers. Des problèmes de comportement l’obligèrent à quitter le système éducatif normal, et il passa trois ans dans l’école de Vernon House, réservée aux élèves en difficulté. L’un de ses professeurs, Chris Beschi, lui dit alors : « quand tu auras 17 ans, si tu continues comme ça, soit tu joueras pour l’Angleterre, soit tu seras en prison ». Beschi le décrivit ainsi : « un gamin qui est habité d’une passion innocente, et gentil ». Et, malgré les grands titres dont il aurait bien voulu se passer, beaucoup de ceux qui le cotoient à Liverpool seraient d’accord avec ce jugement.

C’est Nadine, la mère de l’international anglais, qui a eu la plus grande influence sur sa carrière. Elle craignait que son fils rejoigne un gang de St Raphael, et choisit de quitter Londres, alors que la réussite de son fils à QPR avait attiré l’attention des plus grands clubs de Premier League. Chelsea, Arsenal et Fulham s’intéressaient tous à lui, Manchester City également, mais c’est Liverpool qui fut le plus rapide à se décider, sur le conseil de l’ancien directeur de l’académie des Reds Farnk McParland, et qui lui fit signer son premier contrat pro. L’argent avait joué son rôle, évidemment (un premier versement de 525 000€ qui, avec primes, atteindrait 2,4m€), mais l’éloignement géographique de Londres également. Sterling fit sa première apparition sous le maillot de Liverpool contre les U18 d’Everton, à Finch Farm, le centre d’entraînement des Toffees. Au bout de quelques minutes, il fut la victime d’un tacle très appuyé de l’arrière gauche d’Everton, typique de ce que l’on voit dans les derbys de la Mersey. Le staff technique de Liverpool, qui était alors accompagné de l’ambassadeur du club Kenny Dalglish, craignit le pire. Comment ce garçon de 15 ans, au physique fluet, pourrait-il survivre aux exigences de Liverpool et de la Premier League ? Sterling se releva, sourit, et rendit la pareille à son agresseur aussitôt qu’il en eut l’occasion. Ils tenaient leur réponse.

« Je suis reconnaissant envers mon manager de croire en moi autant qu’il le fait »

Quelques mois plus tard - Roy Hodgson était alors l’entraîneur de Liverpool -, alors qu’il n’avait pas encore seize ans, Sterling se leva du banc lors d’un match de pré-saison contre le Borussia Moenchengladbach. Dalglish, successeur de Hodgson à Anfield, le fit entrer en cours de match lors de trois rencontres de Premier League la saison suivante, avant que Rodgers ne prenne charge des Reds et lui fasse immédiatement confiance en le titularisant contre Manchester City en août 2012, lors du premier match que l’ancien manager de Swansea dirigeait à Anfield. En décembre de la même année, Sterling signait un nouveau contrat revalorisé de cinq ans, assorti de primes à la performance. Comme tout jeune joueur, il a connu des hauts et des bas depuis, mais Rodgers n’a jamais perdu confiance en son ailier. « Je suis reconnaissant envers mon manager de croire en moi autant qu’il le fait, dit Sterling. C’est tout ce qu’espère un jeune joueur ». Mais ce sont pas seulement les conseils de sa mère et de son entraîneur, ou son déménagement à Southport qui ont permis à Sterling de concrétiser son énorme potentiel pour Liverpool la saison passée. Lui aussi doit partager le mérite. Il s’est astreint à un programme d’entraînement intensif pour développer sa masse physique, comme Younes Kaboul s’en rendit compte lorsque Sterling l’écarta de son chemin épaule contre épaule lors de la victoire 4-0 de Liverpool sur les Spurs à Anfield au mois de mars.

Il a fait des progrès spectaculaires dans la finition, achevant la saison avec un bilan de 10 buts l’an dernier. Sa compréhension du jeu s’est améliorée au point que Rodgers a pu le déployer dans plusieurs positions sans nuire à son efficacité. Il a aussi exercé de plus en plus d’influence au sein d’une équipe qui n’a échoué que de justesse dans sa quête d’un premier titre de champion depuis 1990. Voilà pourquoi son manager n’a aucun doute sur la capacité de son joueur à réussir son Mondial, pour autant qu’il soit utilisé correctement. « Selon moi, si on lui donne la chance de jouer comme il peut jouer, que ce soit à la pointe d’un diamant ou sur les flancs, il peut être l’une des stars de la Coupe du monde, dit Rodgers, N’oublions pas qu’il s’agit d’un garçon de 19 ans qui a été l’un des meilleurs joueurs dans l’un des Championnats les plus compétitifs du monde. Il a déjà montré qu’il avait sa place dans un Championnat qui n’est pas seulement britannique, mais aussi plein d’internationaux de classe mondiale. Il a joué ses meilleurs matchs contre les meilleures équipes - Arsenal, Manchester United et Manchester City. S’il garde cette même confiance et joue sans crainte, il peut être se détacher du lot si on lui demande de jouer de cette façon. C’est ça la clé. »

Andy Hunter, The Guardian


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