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À Hong Kong, les touristes chinois se bouchent les oreilles

vendredi 3 octobre 2014

REPORTAGE. Hong Kong et la population chinoise vivent toujours sur deux planètes différentes en dépit du nombre croissant de touristes et émigrés du continent depuis la rétrocession en 1997.

Fiona a vingt-deux ans, deux iPhone dans la poche de son minishort en jean, et des lunettes de geek rectangulaires noires, comme Joshua Wong, l’icône de la jeunesse de Hong Kong. Comme lui, elle est étudiante, parle cantonnais et se débrouille même en anglais. Elle aussi a passé sa journée de jeudi au coeur du quartier commerçant de l’ancienne colonie britannique. Mais pour faire du shopping. Et devant les manifestants ayant pris le contrôle de la chaussée face aux grands magasins de Causeway Bay, elle affiche une moue dubitative. "Je n’ai jamais vu ça. Mais, ils perdent leur temps. Il s’agit d’une cause perdue", affirme la jeune fille. Fiona vient de Zuhai, dans la province chinoise du Guangdong, à une heure de ferry d’ici. À des années-lumière de la contestation politique qui bouscule le pouvoir chinois.

Les touristes du continent sont légion à Hong Kong, particulièrement cette semaine de vacances, autour de la fête nationale du 1er octobre. Mais ils évitent les zones occupés par les manifestants, et s’accrochent à la version délivrée par les médias officiels. "Occupy central ne nous affecte pas. C’est un petit groupe de gens. Nous sommes certains que les autorités vont pouvoir gérer la situation", affirme M. Zhou, venu avec sa petite famille depuis Shanghai. Pas question d’aller jeter un oeil curieux à la marée humaine qui a paralysé depuis plusieurs jours le coeur de la ville à Admiralty. Hong Kong et la population chinoise vivent toujours sur deux planètes différentes en dépit du nombre croissant de touristes et d’émigrés du continent depuis la rétrocession en 1997.

"Illégal et stupide"

Et la révolte de la jeunesse n’inspire guère celle du continent, de passage sur l’île. Pour Daisy Chan, 20 ans, ses homologues de Hong Kong sont à côté de la plaque. "Ce qu’ils font est illégal et stupide", explique la jeune fille chaussée de Dr Martens. Pour elle, le combat politique est un mauvais calcul à l’âge où il s’agit d’abord de préparer son avenir professionnel. "Leur engagement va laisser une marque sombre dans leur futur", juge Daisy. Inconsciemment, elle exprime le contrôle social et politique efficace imposé par le régime chinois sur sa population depuis Tiananmen, isolé du monde par une censure habile.

Ainsi, les images de la révolte hongkongaise sont diffusées avec parcimonie par les médias officiels, qui décrivent les meneurs comme des "extrémistes". Ces derniers jours, les censeurs ont détruit un nombre massif de messages évoquant la crise, sur Weibo, le Twitter chinois. Et une équipe de la BBC a été empêchée de couvrir un rassemblement d’artistes soutenant la cause, dans la banlieue de Pékin. Hong Kong reste une île isolée dans l’océan de la Chine communiste.


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