MosaikHub Magazine

L’UCLBP à l’écoute des quartiers précaires

samedi 4 octobre 2014

Voix aux quartiers précaires », tel est le thème national retenu pour célébrer la Journée internationale de l’habitat, le 6 octobre prochain.

En prélude à cette célébration, le directeur exécutif de l’Unité de construction de logements et de bâtiments publics (UCLBP) a accordé une interview au Nouvelliste en vue notamment de faire le point sur l’ensemble des projets, dont la construction des bâtiments publics et des logements, que cette jeune institution d’à peine trois ans entreprend dans le pays.

Le Nouvelliste (LN) : On va célébrer la Journée mondiale de l’habitat le 6 octobre prochain, le thème national retenu est « Voix aux quartiers précaires », que disent les quartiers précaires ?

Harry Adam (HA) : Jusqu’à présent on est encore dans un processus où on n’a pas encore suffisamment tout écouté. On met en place cette structure (sic) qui va nous permettre de rencontrer ces quartiers et de pouvoir les écouter pour bien comprendre leurs préoccupations. Notre démarche a été de produire une première réflexion, qui nous a amené à avoir un regard sur ces quartiers précaires. Mais, même si politiquement cette réflexion devrait tourner vers la construction de logements, on se rend compte rapidement que ce n’est pas la voie à suivre puisque les ressources ne sont pas toujours au rendez-vous. De plus, nous avons de sérieux problèmes fonciers. Même quand on voudrait construire des maisons pour satisfaire ce déficit important de logements, on est obligé de garder nos quartiers précaires et d’essayer de trouver la solution avec eux. Nous pensons, à l’occasion de cette Journée mondiale de l’habitat, offrir aux quartiers avec lesquels nous travaillons l’occasion de s’exprimer. Mais on s’attend déjà à des résultats… Il y a quand même des choses sur lesquelles il va falloir se pencher telles que l’aménagement de ces quartiers pour les rendre plus accessibles et pour amener la sécurité en favorisant l’accès aux ambulances et aux camions d’eau. C’est un peu ça, cette journée va être l’opportunité pour nous d’écouter ce qu’ils ont à nous dire.

LN : Ce qui signifie que l’Etat haïtien, en abordant la problématique, réalise deux choses : premièrement, Haïti n’est pas le seul cas où il y a ce type de quartiers précaires et, deuxièmement, on ne peut pas raser ce qui existe...

HA : Cela ne peut pas être le choix, cela nous coûterait trop cher. Donc, il va falloir vivre avec, en sachant maintenant qu’il faut aussi renforcer nos mairies pour que le prochain développement que nous avons soit bien fait. La solution n’est pas de raser, on ne pourra pas raser Jalousie, il y a déjà une population trop importante qui y vit et puis ça nous coûterait beaucoup trop cher. Je ne pense pas que ce soit la solution, je crois qu’il faut compter avec ces populations mais en améliorant leurs conditions de vie.

LN : Quel est le portefeuille de l’UCLBP ?

HA : Qu’est-ce que je peux vous dire puisque nous avons plusieurs axes d’intervention ? Pour l’instant, nous avons six bâtiments publics en construction. Ce sont des projets qui tournent autour de 15 à 17 millions de dollars chacun pour la construction et le mobilier. Le Parlement va coûter 33 millions de dollars. Nous avions 800 000 personnes à retirer sous des tentes et il en reste entre 70 et 80 000 aujourd’hui. Et s’il fallait compter avec l’assistance des institutions internationales qui nous accompagnent comme l’OIM, cela nous coûterait 1 000 dollars par personne. On n’a pas de budget général, mais on a des chiffres et des montants qu’on dépense sur des projets dans les différentes divisions. L’UCLBP a été créée comme une entité attachée à la Primature et qui a pour objectif de regarder le secteur du logement et de faire des recommandations … notre budget tient compte de notre mission et des charges qui nous sont confiées. Et un de nos mandats est de régler la question du logement, des bâtiments publics et des déplacés. On nous confie aussi la supervision et la coordination des plans spéciaux, de l’exécution des projets qui sont inscrits dans le cadre des plans spéciaux. Tous les jours des projets nouveaux nous parviennent.

LN : Une des divisions de l’UCLBP c’est la division logements et bâtiments publics, cette division a mené des projets comme le projet Village Lumane Casimir, aujourd’hui qu’est-ce qu’on peut dire du Village Lumane Casimir ?

HA : Pour nous c’est un projet duquel on apprend beaucoup. La plus grande leçon qu’on est en train de tirer, c’est que nous nous rendons compte que la partie la plus facile de ce projet était la construction des unités de logement… et encore nous avons des problèmes avec cette partie-là. Maintenant amener du monde dans ces maisonnettes et les faire y vivre, créer une communauté, cela constitue la partie la plus difficile. Et dans notre politique nationale de logements, ce n’est pas la solution que nous recommandons. Pour nous, le village est une expérience, on fait face à beaucoup de difficultés sur le plan des infrastructures avec la qualité qui nous est donnée. Parce que quand une entreprise travaille sur 3 000 logements, elle vous remet un premier lot de 1 500, il faut, avant de les recevoir, faire une évaluation exhaustive de ces maisons-là, et quand on regarde ces 1 500 logements, on découvre des imperfections. Maintenant il faut exiger de cette entreprise qu’elle fasse des corrections. Et l’autre difficulté, ce sont les gens qui ont signé un contrat et dit qu’ils sont capables de payer le logement. Mais une fois qu’ils sont entrés dans le village, ils refusent de payer parce qu’ils pensent qu’on leur doit des maisons, ce qu’on ne peut pas faire.

LN : Cependant, à côté du Village Lucmane Casimir, il y a Canaan qui grandit très vite, pourquoi c’est beaucoup plus facile de faire dans le précaire que dans le structurel ?

HA : Ce n’est pas qu’il soit beaucoup plus facile, il paraît que cette solution est beaucoup plus innovante… comment demander à une personne qui vivait par exemple à Jalousie d’aller vivre en périphérie de Port-au-Prince, et de rentrer à Port-au-Prince pour venir travailler. Donc il faut amener du boulot, sans compter les autres services. Il faut qu’il y ait la police, le service des pompiers et ça coûte beaucoup d’argent. Ce que nous recommandons, c’est au lieu de développer de nouveaux quartiers, il faut travailler de préférence dans ces quartiers défavorisés et dans les périphéries urbaines de manière que les gens aient accès à ces infrastructures qui coûtent cher aussi.

LN : Le gouvernement a fait un pari risqué, courageux, celui d’entrer et de travailler dans les quartiers précaires, dans les bidonvilles. Est-ce qu’on aura le temps d’implémenter des solutions, d’échouer ou de réussir ? Mais au moins d’apprendre et de pouvoir transmettre un savoir-faire.

HA : On a beaucoup appris. Les solutions sont là et on les connaît. Le gros effort qu’il va falloir faire est sur le plan institutionnel. Il va falloir mettre des institutions en place avec un mandat très clair, car pour l’instant il y a un flou. Qui a cette responsabilité de gérer les logements ? Quand on parle de la ville (sic), plusieurs institutions se positionnent pour avoir cette thématique sur leur contrôle, le MTPTC, le CIAT, le ministère de la Planification, l’EPPLS, mais qui a vraiment cette responsabilité ? Donc il va falloir refaire cette ingénierie institutionnelle pour qu’il y ait des mandats très clairs [pour chaque institution].

LN : La plus belle réussite de l’UCLBP jusqu’à aujourd’hui c’est quoi ?

HA : On a pas mal de projets. Sur le plan des bâtiments publics, mis à part les ministères pour lesquels on est en train de perdre un petit peu de temps, nous constations de très bonnes avancées. Je veux parler du ministère du Commerce et de l’Industrie où on est arrivé au dernier niveau et du ministère de l’Intérieur et c’est un très bon point . Les échecs pour nous c’est le MAE, mais par contre le bâtiment du CIMO est terminé et on devrait l’inaugurer. Autres points positifs : Le ciné Triomphe est terminé, on va l’inaugurer en décembre parce que le président a décidé de faire l’inauguration en décembre quand le kiosque Occyde Jeanty sera terminé. Ce dernier sera terminé avec toute la place du Champ de Mars en décembre et la Villa d’accueil sera terminée aussi en décembre. Nous avons construit six centres sportifs dans les villes de province, telles que les Cayes, Jacmel, Mirebalais, Ouanaminthe et Gonaïves. Toutes les places publiques qu’on est en train de refaire, ça a un impact sur la ville. On refait la place du Canapé-Vert, on a terminé avec les places Boyer, Sainte-Anne et Geffrard est terminée. Celle de l’aéroport finira bientôt. A côté de tout cela, il y a des projets que nous faisons dans les villes de province dans le cadre des plans spéciaux. A Bernard Gousse dans la Grand’Anse et on est en train d’aménager un plan de développement pour La Gonâve, on va y construire 300 maisonnettes. En termes de réalisation, je crois qu’il y a beaucoup de choses qui ont été faites. Il reste la thématique de l’entretien, ce qui nous renvoie au renforcement des mairies parce que l’UCLBP ne pourra pas continuer à assurer l’entretien de toutes ces réalisations.

LN : Quand est-ce que des projets de construction tels ceux du ministère de l’Intérieur et des Collectivités territoriales et de la Cour de cassation pourraient-ils être inaugurés ?

HA : Le MICT, la Cour de cassation et tant d’autres projets doivent être inaugurés sous le mandat du président Martelly. La Cour de cassation va plus vite car elle est beaucoup plus sous notre contrôle que des bâtiments pour lesquels les contrats ont déjà été signés et qu’on a rejoint en route. C’est que ce sont les conditions d’attribution des contrats qui déterminent l’allure des choses. S’il y avait des problèmes dans le contrat, cela pourrait empêcher de respecter l’échéance fixée.


Accueil | Contact | Plan du site | |

Creative Commons License

Promouvoir & Vulgariser la Technologie