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7 octobre 1800. À 26 ans, le corsaire Surcouf s’empare d’un navire anglais 3 fois plus gros que le sien.

lundi 6 octobre 2014

C’est un carnage ! Motivant comme jamais son équipage, il se bat comme un démon pour vaincre les Anglais trop sûr d’eux

La victoire remporté le 7 octobre 1800 par le corsaire malouin Robert Surcouf sur le vaisseau britannique Kent est un des modèles du genre. Il n’a que 26 ans, mais cela fait déjà 13 ans qu’il sillonne les océans à piller les navires ennemis ou à faire le trafic de nègres. Peu importe, pourvu que ça lui rapporte beaucoup d’argent. Quelques semaines avant cette victoire, des armateurs lui ont confié un petit bijou sorti des chantiers bordelais : La Confiance, un trois-mâts de 39 mètres et 491 tonneaux, armé de 16 canons. Ils comptent sur le jeune Malouin aux exploits déjà légendaires pour leur rapporter de riches prises de guerre sous la forme de navires marchands de la Compagnie anglaise des Indes orientales. Surcouf quitte le port avec des lettres patentes pour effectuer la course, ce qui l’autorise à s’emparer de navires appartenant à l’ennemi. Il a embarqué un équipage de 159 hommes aguerris, dont une vingtaine de Cafres (Noirs d’Afrique australe). Surcouf a la pêche d’un Sarkozy croyant pouvoir échapper aux juges...

Un monstre

Fin septembre, voici donc Surcouf en train de rôder dans le golfe du Bengale à la recherche d’une victime. À l’aube du 7 octobre 1800, la vigie s’écrie : "Navire sous le vent à nous, par le bossoir de bâbord, quasi sous le soleil ! - Est-il gros ?" interroge le contremaître du gaillard d’avant. "Très gros, c’est Gérard Larcher !" répond la vigie. En fait, à cet instant précis, le navire qui pointe à l’horizon est trop petit pour être identifié. Surcouf a déjà jailli de sa cabine, sa lunette à la main, pour s’installer à son poste d’observation favori. Pendant ce temps, tout l’équipage s’est rassemblé sur le pont, priant qu’il s’agisse d’un bateau ennemi bourré de marchandises. Surcouf finit par identifier un vaisseau de guerre appartenant à la Compagnie des Indes. "Branle-bas de combat !" hurle-t-il, à la grande joie de l’équipage à qui il fait distribuer du rhum et du café. Peu importe que le navire soit un monstre, trois fois plus gros que La Confiance. C’est la sardine défiant la baleine. Mais rien ne peut effrayer un équipage de Bretons reniflant la poudre et l’or.

Chaque marin prépare le navire au combat. Hamacs et sacs sont disposés derrière le bastingage pour protéger le pont de la mitraille. Les quartiers-maîtres font sortir les coffres bourrés d’armes. Le chirurgien étale ses instruments. Les aides-canonniers apportent les boulets et la poudre. Des bailles remplies d’eau sont installées un peu partout. Envoyé spécial installe ses caméras... Une fois les préparatifs achevés, on fait bombance. Un estomac bien rempli et l’alcool, stimulent l’ardeur au combat. L’équipage plaisante, s’encourage. Cyril Hanouna leur fait la danse de la sardine... Ce soir, c’est sûr, certains seront plus riches, d’autres nourriront les requins. C’est l’excitante vie des corsaires. Chacun l’accepte.

"Du poil à haler pour l’amariner"

Vers dix heures, l’équipage commence à distinguer les 38 canons du vaisseau ennemi, le Kent. Cela jette un froid. Mais Surcouf connaît les mots pour raviver le courage de ses marins. Avec le bagou d’un Mélenchon en campagne présidentielle, il leur promet que ce navire sera à eux le soir même : "C’est moi qui vous le dis, et je ne vous ai jamais trompés, ce navire ne peut nous échapper !" Des hourras lui répondent. Pendant ce temps, le Kent, qui s’est rapproché, tire un boulet d’avertissement pour obliger son minuscule adversaire à hisser ses couleurs afin d’en connaître la nationalité. Le corsaire malouin répond par une bordée d’injures qui déclenche l’enthousiasme de son équipage. Deuxième bordée ordonnée par le capitaine Rivington, qui joue les grands seigneurs au milieu d’un parterre de dames. C’est avec une immense stupéfaction que les marins français découvrent sur la dunette ennemie plusieurs jeunes femmes vêtues avec beaucoup d’élégance en train d’observer La Confiance comme si elles se trouvaient au théâtre. Voilà Valérie Trierweiler qui revient de Madagascar où elle a, bien évidemment, distribué ses droits d’auteurs aux enfants "qui fouillent les ordures".... Ces dames se protègent du soleil sous de jolies ombrelles en se moquant du piètre adversaire qui ose attaquer leur navire. Elles vont même jusqu’à adresser des saluts ironiques aux corsaires français. Foutues Anglaises ! Elles sont d’autant plus guillerettes que le Kent a embarqué, en sus de son équipage, 250 marins et soldats anglais. Le capitaine Rivington peut donc compter sur 450 hommes pour écraser ces maudits Français. Il est aussi confiant que Sarkozy est certain d’emporter la prochaine la présidentielle...

Après un moment de flottement, Surcouf fait hisser les voiles et tirer un coup de canon pour accepter le combat. Puis il adresse un dernier discours à ses hommes : "Mes bons, mes braves amis ! Vous voyez sous notre grappin, par notre travers, et voguant à contre-bord de nous, le plus beau vaisseau que Dieu ait jamais, dans sa sollicitude, mis à la disposition d’un corsaire français !... Sachez-le bien, ce portefaix qui nous débine à cette heure contient un chargement d’Europe qui vaut plusieurs millions ! Il est plus fort que nous, direz-vous, j’en conviens ; je vais même plus loin, j’avoue qu’il y aura du poil à haler pour l’amariner. Oui, mais quelle joie quand, après un peu de travail, nous nous partagerons des millions ! Quel retour pour vous à l’île de France [l’actuelle île Maurice] ! Les femmes vous accableront tellement d’oeillades d’amour et d’admiration que vous ne saurez plus à qui répondre... Et quelles bombances ! Ça donne le frisson rien que d’y penser !" À ces mots, ragaillardi, l’équipage est prêt à affronter le diable en personne. Personne, sinon Surcouf, ne se doute que l’adversaire est deux fois plus nombreux. Pour renforcer encore l’ardeur des hommes, le capitaine français leur promet une part du diable (c’est-à-dire le pillage du navire) pendant deux longues heures.

"Vive la France, vive la nation !"

Les corsaires français brandissent haches, lances, sabres, piques, espingoles à six coups. Certains sont dans les hunes avec une provision de grenades. Surcouf déchire avec les dents la manche de sa chemise pour être plus à l’aise. Il saisit une hache. La colère bouillonne en lui. "À plat ventre, tout le monde !" commande-t-il. Les Anglais tirent une première bordée qui tombe à l’eau, puis une deuxième et encore une troisième qui dévaste La Confiance. Persuadé que l’ennemi est haché menu, l’équipage anglais s’approche du bastingage pour jouir de sa victoire. Surprise ! Ils voient surgir à l’abordage des démons féroces. Des dizaines de grappins volent dans l’air pour lier les deux navires. Après quelques secondes de stupéfaction, les marins anglais courent aux armes. "À l’abordage !" rugit Surcouf. "À l’abordage !" lui répondent ses hommes. Son premier officier, Drieux, mène le premier assaut. Le nègre Bambou, qui avait parié avec ses camarades qu’il serait le premier à bord, saute d’une vergue au milieu des soldats britanniques qu’il découpe en carpaccio avec sa hache. Des tireurs d’élite, judicieusement planqués dans les canots de secours par Surcouf, dégomment les officiers anglais les uns après les autres.

Sur le pont anglais, c’est un carnage indescriptible. Les chairs s’ouvrent, les membres tombent à terre, les entrailles dégringolent, les yeux jaillissent des orbites, les sourires s’élargissent à 180 degrés, les cervelles dégoulinent, les artères crachent des flots de sang, les corps agonisent. Les bouches hurlent de fureur, les mourants râlent, les blessés sont piétinés. Un nuage de poudre couvre le pont. Le bruit est infernal. Les dames ont depuis longtemps trouvé refuge dans leur cabine. Le spectacle promis par le capitaine est devenu une vision de l’enfer. Les grenades balancées par les gabiers français déciment les rangs ennemis. Mais les Anglais sont nombreux. Le sort de la bataille reste indécis. Jusqu’à ce que Dieu tranche : il en a marre de cette boucherie. C’est qu’il est maintenant l’heure de Scènes de ménages à la télé, qu’il ne manquerait pour rien au monde. Aussi ordonne-t-il à un éclat de grenade de tuer le capitaine du Kent. Surcouf, qui s’en aperçoit aussitôt, crie victoire pour encourager ses hommes. À coups de hache, il les conduit jusqu’au gaillard d’arrière et à la dunette de commandement. La lutte devient grandiose, les cadavres s’accumulent sur le pont. Épouvantés par tant d’audace, les Anglais lâchent pied. C’est la victoire. "Plus de morts, plus de sang, mes amis ! Le Kent est à nous. Vive la France ! Vive la nation !" s’écrie le glorieux Breton.

"Chacun se bat pour acquérir ce qu’il n’a pas"

Comme promis, les marins français ont droit à leurs deux heures de pillage, dépouillant les marins et les passagers du Kent de leurs affaires. Seules ces dames sont épargnées grâce à la protection de ce gentleman de Surcouf. Les prisonniers sont transbordés sur un trois-mâts maure qui passe par là, en échange de leur promesse de faire libérer un nombre égal de prisonniers français retenus à Madras et à Calcutta. Le corsaire malouin fait réparer les deux navires tant bien que mal pour rallier l’île Maurice, alors française, qui lui fait un accueil triomphal. Pas d’or ni de trésors à bord du Kent, mais des armes et de la poudre.

Le 29 janvier 1801, à bord de La Confiance désarmée et les cales pleines d’une riche cargaison, Surcouf met le cap sur Bordeaux qu’il atteint le 13 avril suivant, après de multiples péripéties. Il revient épouser son amour de jeunesse, la belle Marie-Catherine. Mais il ne se calme pas pour autant. Bientôt, le voilà reparti à courir les mers pour dépouiller les Britanniques et faire la traite des nègres. Bien trop indiscipliné, il refuse le commandement d’une escadre offert par Napoléon. Lorsque la paix est revenue, un de ses anciens adversaires anglais lui dit : "Enfin, monsieur, avouez que vous, Français, vous vous battiez pour l’argent, tandis que nous, Anglais, nous nous battions pour l’honneur..." La réponse de Surcouf relève du génie : "Certes, monsieur, mais chacun se bat pour acquérir ce qu’il n’a pas."

Le Malouin sait investir intelligemment l’argent retiré de ses pillages et autres trafics. Il devient immensément riche, au point de couvrir, dit-on, le sol de sa maison de napoléons en or. Un jour, l’empereur, qui le visite, trouvant peu agréable de se laisser ainsi marcher sur la figure, lui en fait le reproche. "Qu’à cela ne tienne, Sire, je les ferai poser sur la tranche." Dernier exploit qu’on lui attribue : alors que la Prusse occupe la France, Surcouf défie en duel tous les officiers de la garnison prussienne de Saint-Malo. Il tue ou blesse les douze premiers, laissant partir le treizième pour qu’il puisse témoigner de l’affaire. Il meurt "bêtement" d’un cancer à 53 ans. Le seul ennemi devant lequel il est entièrement désarmé. Ainsi périt l’un des plus vaillants corsaires de tous les temps.
C’est également arrivé un 7 octobre

1957 - Pose de la première tôle de la quille du paquebot France.

1950 - Mère Teresa fonde l’ordre des Missionnaires de la charité.

1947 - Présentation du combat de boxe entre Marcel Cerdan et Billy Walker.

1933 - Inauguration d’Air France, au Bourget.

1931 - Al Capone est condamné pour fraude fiscale à 11 ans de prison et 80 000 dollars d’amende.

1919 - Fondation de la compagnie d’aviation néerlandaise KLM.

1913 - L’usine Ford utilise la technique du montage en série. Le travail à la chaîne est né.

1879 - Le Royaume-Uni envahit l’Afghanistan.

1849 - Décès de l’écrivain américain Edgar Allan Poe.

1806 - R. Wedgwood dépose un brevet pour le papier carbone.

1337 - Début de la guerre de Cent Ans.

3761 av. J.-C. - Naissance mythique du monde, selon les juifs religieux


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