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La cravate, symbole de pouvoir, examinée sous toutes ses coutures à Zurich

mardi 14 octobre 2014

La cravate, symbole de pouvoir, se décline sous toutes ses formes le temps d’une exposition au Musée National Suisse à Zurich, qui examine cet accessoire qui en dit long sur celui qui la porte.

Cravates de régiment, cravates aux couleurs des grandes universités britanniques, cravates présidentielles, impérativement rouges pour les candidats républicains lors des campagnes électorales, bleues pour les démocrates....

L’exposition étudie pas à pas le protocole autour de cet accessoire longtemps utilisé comme un signe de hiérarchie sociale.

Parmi les pièces présentées figurent des cravates que les chefs d’État ont porté avec fierté, à l’instar d’une longue bande de dentelle qui finissait la tenue de Christian VII (1749-1808), roi de Danemark et de Norvège, pour son couronnement.

Mais aussi l’exemplaire envoyé en 1979 au président Jimmy Carter par l’artiste américain Jeffrey Vallance, qui avait adressé des cravates à plusieurs chefs d’Etat, leur demandant d’en expédier une autre en retour, accompagné de la missive de la Maison Blanche qui expliquait poliment pourquoi elle déclinait l’offre.

L’exposition fait au passage la part belle aux cravates d’artistes, notamment avec des pièces ayant appartenu à l’américain Andy Warhol, le maître du Pop Art, ainsi qu’à la cravate rebelle, portée avec insolence par l’actrice allemande Marlene Dietrich, ou détournée par le mouvement punk.

"Le concept de l’exposition est de montrer les différentes facettes et contextes de la cravate mais aussi ses différentes significations selon les époques", a indiqué Joya Indermühle, commissaire adjointe de l’exposition à l’AFP.

- La cravate féminine -

La cravate a fait son apparition au XVIIème siècle lorsque la noblesse française s’inspira de la simple écharpe que portaient les soldats croates pour ajouter à leur cou un ornement raffiné et élégant.

Elle avait alors sa place dans les garde-robes des dames de la Cour, comme le rappelle l’exposition qui consacre une section entière à la cravate féminine.

"Ce n’est que plus tard qu’elle est devenue une forme d’affirmation, quand George Sand ou Colette ont commencé à l’utiliser comme un symbole d’émancipation", décrypte Joya Indermühle.

Déclinée en jabot, lavallière ou noeud papillon, elle est devenue au fil du temps une partie intégrante de l’habit masculin, contribuant à la prospérité de Zurich qui a longtemps été un des principaux centres de production de tissus pour cravate, aux côtés de Côme en Italie, et de Krefeld, en Allemagne.

Les visiteurs pourront d’ailleurs venir découvrir les secrets de leur fabrication, notamment avec un vaste dessin de mise carte de 2,20 mètres de haut représentant en détail un dragon à reproduire à petite échelle sur un métier à tisser Jacquard.

Destinées à être retravaillées par les tailleurs, les étoffes étaient exportées vers l’Angleterre au XIXème siècle puis majoritairement vers les États-Unis et le Japon au siècle suivant, retrace Alexis Schwarzenbach, un historien qui mène actuellement des recherches sur l’industrie de la soie à Zurich.

"La dévaluation du dollar dans les années 1970 a quasiment détruit le marché américain", explique-t-il. Les exportateurs suisses ont alors été confrontés à une concurrence grandissante des producteurs asiatiques alors même que la cravate, avec l’évolution des codes vestimentaires, amorçait un lent déclin.

Les fabricants japonais ont cependant continué de se fournir en Suisse, en particulier pour venir y chercher des coupons en petite quantité afin de proposer à leurs clients des motifs qu’ils ne retrouvaient pas partout.

- Cravate tricotée -

Libérée des obligations, la cravate se pose désormais d’avantage comme un accessoire de mode permettant aux hommes de personnaliser leur tenue.

"Le port de la cravate est tombé dans le côté statutaire et revient par la mode", constate Isabelle Lartigue, responsable de la mode masculine au sein du cabinet de tendances parisien Peclers.

Sur les podiums, la cravate devait affronter cette année une rude concurrence des foulards et des longues étoles, plus décontractés, pointe Isabelle Lartigue qui relève cependant un retour de la cravate en laine, "tricotée", "à bout carré", dans un esprit "rétro branché".

Elle retrouvait également sa place dans le chic à l’italienne, portée "de manière presque théâtrale" ou "ton sur ton" pour se fondre avec la chemise chez les créateurs américains.

L’exposition, qui a ouvert ses portes mi-septembre, se tiendra à Zurich jusqu’au 18 janvier.


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