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Les bonnes manières selon Julien Lepers : "Pissons assis !"

mercredi 12 novembre 2014

L’animateur de "Questions pour un champion" publie "Les mauvaises manières, ça suffit !", un traité de savoir-vivre "actuel" et édifiant.
Par Marion Cocquet

Julien Lepers est un homme courtois, mais simple. Ne s’installe-t-il pas chaque soir dans le salon des Français ? L’animateur vedette de France 3 a, aussi, l’audace de sa simplicité. En témoignent les quelques confessions qu’il glisse dans Les mauvaises manières, ça suffit !, traité de savoir-vivre qui fait suite à son manuel d’orthographe : Les fautes de français, plus jamais !. Au chapitre "Boire, mode d’emploi", il écrit ainsi : "Je l’avoue, je trinque. Je trinque avec mes parents, avec mes amis, avec les équipes des galas que je présente à travers la France. [...] Il se trouve toujours, dans le restaurant où la scène se déroule, quelque bon bourgeois pour me regarder de travers, car c’est souvent moi qui lance le rituel. Trinquer, c’est bruyant, vulgaire, provincial, en un mot, populaire." Et pourtant, quelle belle chose que "le choc des verres", "la franchise des regards échangés" ! Julien Lepers trinque donc et trinquera, n’en déplaise à Mme de Rothschild.

En effet, son livre ne se contente pas de répéter un ensemble de préceptes confits dans les salons de la haute bourgeoisie. Il "s’adresse à tous", il est "adapté à notre époque". Mieux, il a l’ambition de proposer "un nouvel art de vivre ensemble". Outre les règles de maintien, les effets indispensables à une garde-robe élégante ou les principes que devra suivre la "puissance invitante" d’un dîner, on y apprendra, par exemple, qu’il est bon dans les fast-foods d’arriver au comptoir en ayant déjà fait son choix. Que débattre sur un forum web implique d’être "tolérant" avec autrui et de présenter ses arguments de façon claire et concise. Que la toile cirée, quoique désagréable au toucher, peut être tolérée dans le cercle familial. Que, dans le métro, une saine solidarité est de mise entre les voyageurs qui pourraient être victimes des "gangs habituels qui écument la ville" : pickpockets, musiciens non autorisés par la RATP ou mendiants professionnels ("beaucoup d’entre eux sont dans la détresse, mais d’autres ont fait de la mendicité un nouveau métier, qui les dispense de chercher un emploi").

Sadomasochisme et "porte dérobée"

Cela, pour les trépidations de la vie moderne. Mais Les mauvaises manières, ça suffit ! ne s’interdit aucun sujet et se risque sans fausse pudeur dans le lit de ses lecteurs. Le port du préservatif, explique Julien Lepers dans le chapitre "Les chemins de l’amour", n’est pas une "bonne manière", mais une obligation. "Ne nous lançons dans des pratiques sadomasochistes qu’avec le consentement préalable de notre partenaire, poursuit-il. Tout n’est permis qu’ensuite, dans la limite des conventions que nous aurons établies. Un consentement préliminaire est également indispensable avant toute tentative de passer par une porte dérobée". Polisson, mais raisonnable.

L’animateur n’hésite pas davantage à lancer un appel aux hommes : "À ceux qui urinent encore debout, je dis qu’ils peuvent, en changeant leurs habitudes, contribuer à la naissance d’un monde meilleur, un monde plus propre, où nos femmes et nos compagnes se sentiront mieux respectées, un monde moins machiste. [...] Ce sera un pas de géant pour l’hygiène et la propreté. Pissons assis !" Sur le chapitre de l’égalité des sexes, notons encore ce rappel, frappé au coin du bon sens, des règles de l’enterrement de vie de jeune fille et de vie de garçon. On épargnera aux demoiselles des défis humiliants - pourquoi ne pas plutôt organiser au Louvre un parcours-découverte des plus beaux fessiers de la sculpture antique ? Les jeunes mâles, évidemment, donnent plus de fil à retordre. "Si l’on ne peut éviter la présence d’une strip-teaseuse qu’au moins les règles du respect qui lui est dû soient établies à l’avance. Strip-teaseuse ne veut pas dire prostituée", rappelle justement l’auteur.

Julien Lepers, au fond, propose un combat. Une lutte, pied à pied, contre "toutes nos attitudes discourtoises". "Il y va de notre intérêt, mais aussi de notre bonheur, résume-t-il en quatrième de couverture, dans une société où renaîtraient les vertus de la civilité, du souci de l’autre et de la bienveillance." Plus qu’un manuel, un programme politique.

Julien Lepers, Les mauvaises manières, ça suffit !, Michel Lafon, 719 pages, 20,95 euros


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