MosaikHub Magazine

Ces femmes qui dansent

mardi 2 décembre 2014

« Nan dans fanm » est un recueil de poèmes publié par Bonel Auguste en mai 2012 chez les Éditions Bas de Page. Dans chaque vers, la poésie coule aisément. Les mots se laissent docilement manipuler par le poète qui se perd dans les danses d’un ensemble de femmes. Mariline est le nom qu’il voudrait attribuer à l’une d’entre elles

En écrivant ce texte, Bonel Auguste semble avoir été en extase, repassant dans son esprit une superbe chorégraphie qui l’a profondément marqué. Un spectacle sans doute qui l’oblige à faire entendre sa lyre. « Chak fanm ki sou planche a/Se yon toupi tou limen/ k ap simen etensèl nan san m ».

Deux images sont à considérer ici : « toupi tou limen » et « etensèl ». La toupie étant un jouet de forme conique ou sphérique muni d’une pointe sur laquelle on le fait tourner, illustre parfaitement les mouvements corporels de ces femmes qui s’installent dans la pensée du poète. « Une toupie enflammée ! » En les contemplant se tourner gracieusement, il voit se dégager de leurs corps si charmants une flamme et des étincelles qui viennent réchauffer son sang « froid ». Cette image traduit donc le brûlant désir que font naître soudain en lui tant de sensations : « Tan an gen vètij nan mouvman kò yo/Kò yo lage pou plezi gaye ».
Qui sont-elles, ces femmes ?

« Gen yon ti piti mens/Cheve alagasòn ». « Gen yon lòt ki wo byen seksi/Li gen yon ti wòb kapris/Bèl zanno afriken ». « Gen yon lòt ankò…/M anvi rele l Mariline… » Trois femmes sont ici identifiées par le poète lui-même, et chacune d’elles fait sur lui un effet particulier, en fonction de ses traits, de sa beauté et de sa forme.
Le nom de certaines femmes laisse dans la bouche de l’auteur le goût de thé. D’autres noms, le goût d’un café chaud. D’autres encore, celui du rhum sur de la glace. Une autre catégorie le fait patiner carrément sur le temps, en pleine chute artistique. Ces métaphores traduisent tout simplement le rôle important que joue la femme dans sa vie. L’être féminin façonne en quelque sorte son existence, égaie son quotidien et lui donne une raison d’exister.

Le secret de leurs danses

On dirait que chaque mouvement corporel de ces femmes est une vibration capable de faire exploser le cœur : « Chak yayad se yon vag / Ki mennen kè m ale/Ki mennen l tounen tou dous ». Il faut surtout retenir que les femmes ne dansent pas que pour le plaisir de danser. Si elles dansent partout, « ak pye bwa, ak zwazo, nan lanmè » même « nan zetwal », c’est qu’elles dansent leur vie, leur âme : « Yo danse nanm yo, yo danse vi yo ». Mais à quelle fin ? Pour que la vie retrouve sa danse « pou lavi rejwenn dans li ».

Loin d’être des danseuses de cabaret, encore moins des strip-teaseuses, des débauchées, des marie-salopes, des marie-couche-toi-là, ces femmes sont plutôt porteuses d’espoir, des libératrices. La vie avait perdu son sens depuis longtemps ; elle avait perdu sa danse. Elle était morte. Ces dernières la ressuscitent à travers leurs danses magiques. Même en proie à toutes sortes de difficultés, elles dansent…une valse de délivrance, de réconfort, de courage…La valse de la vie.

AUTEUR

Lucmane Vieux lucmanov@yahoo.fr


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