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Haïti, francophonie, David Bongard en parle

mercredi 3 décembre 2014

Le Nouvelliste

Après une longue mission de plus de quatre ans couronnée de nombreux succès, Chantal Moreno a cédé son bureau à David Bongard pour diriger le Bureau régional de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) pour les pays de la Caraïbe dont le siège est à Port-au-Prince. David Bongard est né en 1969 à Fribourg, en Suisse. Il a étudié les sciences politiques aux universités de Lausanne, de Londres et de Paris. Après avoir occupé un poste similaire dans les pays d’Europe orientale et centrale depuis la Roumanie, il est en poste en Haïti. Le Nouvelliste l’a rencontré a Dakar dans le cadre du 15e Sommet de la francophonie.

Le Nouvelliste : Pouvez-vous nous présenter votre fonction ?

David Bongard : La fonction principale du Bureau de l’OIF pour les pays de la Caraïbe (BRPC) est de contribuer à l’action politique et diplomatique de l’organisation dans les Etats membres de la région (Haïti, Sainte-Lucie et la Dominique) ainsi que dans quatre pays observateurs (Costa Rica, République dominicaine, Mexique, Uruguay). Il intègre des fonctions de représentation et de concertation mais aussi de veille, d’observation, d’analyse, d’alerte et de propositions tout en étant étroitement associée à la politique et aux actions de coopération que développe l’OIF dans la region, notamment en matière d’éducation, d’environnement, de culture et de droits de l’homme.

Le Nouvelliste : Quels sont les axes de l’action de l’Organisation internationale de la francophonie en Haïti ?

David Bongard : L’OIF est avant tout un espace de solidarité internationale envers les pays qui ont la langue française en commun ou en partage. Alors bien sûr, c’est un terme à géométrie variable, les situations sont bien distinctes parce que la place qu’occupe la langue française n’est pas la même, que ce soit dans l’histoire des pays en question ou dans leur système éducatif. La francophonie a quatre missions principales : promouvoir la langue française et la diversité culturelle et linguistique, promouvoir la paix, la démocratie et les droits de l’homme, appuyer l’éducation, la formation, l’enseignement supérieur et la recherche ainsi que développer la coopération au service du développement durable. Une attention particulière est accordée aux jeunes et aux femmes, ainsi qu’à l’accès aux TIC.

Le Nouvelliste : Quels dossiers avez-vous poussés pour Haïti lors du Sommet de Dakar ?

David Bongard : Les missions que j’ai présentées précédemment sont définies tous les dix ans dans un cadre stratégique adopté par les chefs d’État et de gouvernement lors des Sommets de la francophonie. A Dakar par exemple, les 29 et 30 novembre dernier, un nouveau Cadre stratégique ainsi qu’une nouvelle programmation ont été adoptés. Ces instruments ont été élaborés en amont et pendant de longs mois en étroite collaboration avec nos Etats et gouvernements membres. Ces derniers déterminent par eux-mêmes leurs besoins en matière de développement. Notre rôle est de les accompagner. Il n’est pas dans l’usage de notre organisation de s’immiscer dans les affaires intérieures d’un pays membre. Il appartient aux autorités nationales de « pousser les dossiers » qui leur semblent pertinents pour leur pays ou leur région auprès de nos instances.

Le Nouvelliste : L’OIF est considérée comme une organisation jeune et plutôt en retrait dans la coopération multilatérale, est-ce que l’action de l’OIF en Haïti vous laisse cette impression ?

David Bongard : Notre organisation est une émanation de pays du Sud (Tunisie, Niger, Cambodge et Sénégal) qui a été créée il y a 45 ans à Niamey. Il est faux de croire que l’OIF se meut et agit en autarcie. Au contraire, c’est une organisation qui est pleinement intégrée à la communauté internationale et qui a su, notamment sous le mandat de son Secrétaire général sortant M. Abdou Diouf, se hisser parmi les organisations qui non seulement sont respectées - j’en veux pour preuve les récentes déclarations du Secrétaire général des Nations unies, M. Ban Ki- moon, à l’encontre de l’OIF- mais également qui comptent sur le plan international. Cela est d’autant plus remarquable que nos moyens d’action ne sont pas aussi importants que ce que bon nombre pourraient penser. Notons aussi que l’OIF n’a pas pour vocation d’être un bailleur de fonds.

En ce qui concerne Haïti, de nombreux accords nous lient avec des acteurs majeurs de la coopération multilatérale. A titre d’illustration, dans le cadre de la préparation des élections, nous sommes en contact avec l’Organisation des Etats américains (OEA) avec laquelle nous comptons mettre en œuvre un accord de partenariat qui nous lie depuis 2012. Plus récemment encore, avec le ministère de l’Environnement d’Haïti et le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), l’Institut de la francophonie pour le développement durable (IFDD) a coorganisé à Port-de-Paix, au début du mois de novembre, une rencontre de formation sur la gestion décentralisée des ressources naturelles.

Le Nouvelliste : L’OIF c’est un réseau d’organismes, c’est beaucoup de réunions et de rencontres, Haïti arrive-t-elle à suivre le rythme ?

David Bongard : Au fil du temps, depuis 1985 exactement, l’OIF a mis en place une quinzaine de réseaux institutionnels de la francophonie qui sont porteurs de la spécificité de l’action francophone déployée en faveur de la promotion de la paix, de la démocratie et des droits de l’homme. Ils apportent une contribution majeure au rayonnement des engagements francophones et à la mise en œuvre, en particulier, de la Déclaration de Bamako, texte normatif et de référence de l’action de la francophone en faveur de la promotion de la paix, de la démocratie et des droits de l’homme (3 novembre 2000), de la Déclaration de Saint-Boniface sur la prévention des conflits et la sécurité humaine (14 mai 2006), et de la Déclaration de Paris adoptée par la IVe Conférence des ministres francophones de la Justice (14 février 2008). Les réseaux institutionnels fédèrent les institutions de mêmes compétences installées dans les pays francophones. Ils sont les acteurs principaux d’une coopération professionnalisée et de proximité, privilégiant l’échange d’expériences, de connaissances et le développement de solidarité entre pairs.

Un certain nombre d’Institutions haïtiennes sont membres, sur une base volontaire, d’un réseau à l’instar de la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif qui préside actuellement l’Association des institutions supérieures de contrôle ayant en commun l’usage du français (AISCCUF) ou encore de l’Office de protection du citoyen et de la citoyenne (OPC) qui est membre de l’Association des ombudsmans et médiateurs de la francophonie (AOMF). Ces réseaux ont pour objectif de se réunir afin d’échanger et de mettre ensemble un plan d’action commun qu’ils pourront décliner par la suite sur le plan national. L’idée étant aussi de reconnaître et de valoriser l’expertise et l’expérience de pays, tel qu’Haïti, par le biais de ses instruments sur le plan international.

AUTEUR

Propos recueillis par Frantz Duval


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