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25 décembre 507. Baptême de Clovis à Reims après le harcèlement de sa catho d’épouse

jeudi 25 décembre 2014

En embrassant la religion chrétienne, le roi des Francs inaugure une nouvelle ère de paix, d’amour et de fraternité. Tu parles...

Par Frédéric Lewino et Gwendoline Dos Santos

Le 25 décembre 507, l’évêque de Reims, Rémi, baptise Clovis et trois milles de ses guerriers. C’est qu’il a la santé le curé ! La queue est plus longue que le jour où TF1 auditionne pour The Voice... Le roi des Francs est en tête de file. À 32 ans, blond et musclé, il ressemble à Matt Pokora. Au premier rang de l’assistance, la reine Clotilde rayonne. Enfin, Cloclo l’a écoutée en devenant chrétien comme elle.

Cela fait des années qu’elle le tanne avec la Boutin pour qu’il jette aux oubliettes ses innombrables dieux guerriers, au profit du seul, de l’unique, du Dieu chrétien qui n’est fait que d’amour et de charité. Alléluia ! Derrière Clovis, ses guerriers francs piétinent d’impatience. Chacun, avec sa serviette et son bonnet de bain, attend l’immersion dans la piscine du baptistère. Yannick Agnel leur a passé la consigne : à l’entrée, il faut frotter les pieds sur le paillasson anti-mycose. Si la cérémonie se déroule un 25 décembre - jour de Noël -, en revanche l’année n’est pas connue avec exactitude. Elle se situerait entre 496 et 511, avec une préférence pour 507.

Émotion intense

On ne connaît pas non plus le déroulement précis de la cérémonie. La reine Clotilde décore la cathédrale magnifiquement pour impressionner son époux et ses guerriers. Bien entendu, il ne s’agit pas de la cathédrale gothique actuelle, mais d’un bâtiment trapu de 20 mètres sur 55 mètres, flanqué d’un baptistère de forme carrée. À l’intérieur, un bassin de forme circulaire où les candidats à la conversion font trempette avant la bénédiction de Rémi. Celui-ci dépose sur le front de chacun d’eux le chrême, un mélange d’huile d’olive et de résine aromatique. Si vraiment il y avait eu trois mille guerriers à baptiser, Rémi en aurait eu pour cinquante heures à raison d’une minute par baptême. Invraisemblable ! Le vrai nombre de guerriers baptisés ce jour-là est certainement bien inférieur au nombre annoncé par Grégoire de Tours.

Clovis est donc le premier. Il hésite avant de descendre dans le bassin, mais, y voyant Laure Manaudou en tenue d’Ève, il plonge furieusement. Rémi fait le signe de croix et l’interpelle : "Courbe doucement la tête, fier Sicambre ; adore ce que tu as brûlé, brûle ce que tu as adoré", avant de lui apposer le chrême sur le front. Moment d’émotion intense. Stéphane Bern partage son émoi avec la France entière sur France 2. Il explique que le roi des Francs a très sérieusement préparé sa conversion en suivant des cours du soir avec l’évêque de Reims.

Il lui a fallu apprendre qui est le seigneur, comprendre ce que vient faire Jésus dans cette histoire. Rémi lui enseigne la catéchèse suivant les préceptes des conciles de Nicée, de Constantinople et de Chalcédoine. Le roi des Francs doit encore se coltiner des cours de moralité, l’apprentissage du rituel et l’histoire du Salut. Et le dogme trinitaire ? Il l’a étudié, de même que les crédos. Quand Rémi lui raconte l’histoire de la Passion, Clovis a du mal à la gober. Qu’est-ce que c’est que cette histoire de Dieu tout-puissant qui se laisse crucifier ? C’est de la daube, mec. Pas crédible. Il s’exclame : "Si j’avais été là avec mes Francs, j’aurais vengé cette injure !"

Vie dure

Si Clovis persiste à rejoindre le camp des chrétiens, c’est qu’il y trouve de nombreux avantages. D’abord, la paix à la maison. Son épouse Clotilde cessera de le bassiner, maintenant qu’il a plongé dans le bassin. Et Dieu sait si elle peut se montrer aussi emmerdante que la Trierweiler quand elle veut quelque chose. Elle lui répète à tout bout de champ : "Les dieux que vous adorez ne sont rien, puisqu’ils ne peuvent se secourir eux-mêmes ni secourir les autres ; car ils sont de pierre, de bois ou de quelque métal. Les noms que vous leur avez donnés sont des noms d’hommes et non de dieux." Ce à quoi il répond : "C’est par l’ordre de nos dieux que toutes choses sont créées et produites ; il est clair que votre Dieu ne peut rien ; bien plus, il est prouvé qu’il n’est pas de la race des dieux."

Lors de la naissance de leur enfant Ingomer, Clotilde exige le baptême. Il laisse faire. Une semaine plus tard, quand Ingomer meurt, le roi passe un savon à son épouse : "Si l’enfant avait été consacré au nom de mes dieux, il vivrait encore ; mais comme il a été baptisé au nom de votre Dieu, il n’a pu vivre." Et vlan dans les dents ! Mais il en faut plus pour décourager Clotilde. Elle a réponse à tout. "Je rends grâce au puissant Créateur de toutes choses, qui ne m’a pas jugée indigne de voir associé à son royaume l’enfant né de mon sein..." Quelques mois plus tard, la reine est de nouveau enceinte. C’est encore un fils, qu’elle baptise Chlodomir. Lui aussi tombe malade. Le père triomphe, mais l’enfant guérit grâce aux prières de sa mère. À partir de ce moment, celle-ci ne cesse de mener la vie dure à son époux pour qu’il se convertisse.

"Fils de Dieu vivant"

Durant au moins deux ans, Clovis résiste à son épouse. Jusqu’au jour où, se trouvant en fâcheuse posture dans une bataille contre les Wisigoths, il se dit que c’est le moment de tester la puissance du Dieu de sa femme. Il n’a plus rien à perdre, son armée est sur le point d’être balayée. Il lève les mains vers le ciel, prend un ton pleurnichard en s’écriant : "Jésus-Christ, que Clotilde affirme être fils du Dieu vivant, qui, dit-on, donne du secours à ceux qui sont en danger, et accorde la victoire à ceux qui espèrent en Toi, j’invoque avec dévotion la gloire de Ton secours. Si tu m’accordes la victoire sur mes ennemis, et que je fais l’épreuve de cette puissance dont le peuple, consacré à Ton nom, dit avoir reçu tant de preuves, je croirai en Toi et me ferai baptiser en Ton nom..."

Le Christ, se trouvant de bonne humeur ce jour-là, dirige une flèche (à moins que cela ne soit une hache) sur le roi alaman, qui tombe raide mort. Privée de chef, l’armée ennemie se disperse. Dieu a fait gagner le roi des Francs ! Rentré à la maison, Clovis raconte cette bonne blague à Clotilde. Mais qu’est-ce qu’elle est heureuse ! Autant que Cécile Duflot apprenant sa nomination comme ministre.

Un royaume plein d’amour

La reine des Francs s’empresse d’envoyer un texto à Rémi pour lui demander de rappliquer dare-dare. Il faut battre le fer tant qu’il est chaud. L’évêque de Reims accourt, saoule Clovis d’arguments en faveur de la vraie foi. Il se montre aussi convaincant qu’un imam islamiste dans une mosquée de la banlieue parisienne. Pour autant, le roi a d’autres raisons pour devenir chrétien. L’une d’elles tient à la population de son royaume qui compte une majorité de Gallo-romains déjà chrétiens. Une autre est le pacte de non-agression que les Bretons acceptent de signer avec lui, à condition qu’il embrasse la religion chrétienne.

Le dernier obstacle à lever : ses guerriers francs, qui ne renonceront pas facilement à leurs dieux traditionnels. Il prend plusieurs cours de rhétorique avec Mélenchon avant de les rassembler. Miracle, avant qu’il n’ouvre la bouche, ceux-ci l’approuvent déjà : "Pieux roi, nous rejetons les dieux mortels et nous sommes prêts à obéir au Dieu immortel que prêche saint Rémi." C’est ainsi que la France devient le premier royaume chrétien d’Occident. Un royaume plein d’amour, de piété, de charité, de fraternité. Merci Clovis, et surtout Clotilde. Et dire que, sans eux, la France aurait pu rester un royaume barbare marqué par les massacres, les guerres, les mensonges...


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