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31 décembre 192. Parano, mégalo et cruel, l’empereur Commode est étranglé par son esclave Narcisse.

mercredi 31 décembre 2014

Le fils de Marc-Aurèle tombe dans la folie, il se prend pour Hercule, décime son entourage. Il est temps de l’expédier ailleurs...

Par Frédéric Lewino et Gwendoline Dos Santos

Le 31 décembre 192, tout Rome attend de célébrer la nouvelle année. L’empereur Commode n’est pas au mieux de sa forme. Il vient de rendre tripes et boyaux et un marteau-piqueur lui défonce le crâne. Il se sent mal, très mal. Que lui arrive-t-il ? A-t-on cherché à l’empoisonner ? Le poison se trouvait peut-être dans le verre de vin servi quelques minutes plus tôt par sa concubine favorite Marcia... Demain, il la fera égorger. Elle et plusieurs autres sénateurs qui ont refusé de faire la quenelle sur son passage....

Étranglement

Ses sympathiques pensées sont brutalement interrompues par une poigne de fer qui lui serre le cou. Il ouvre les yeux pour découvrir Narcisse en train de l’étrangler. Lui, son assassin ? Lui en qui il a toute confiance. Un "ami" de 30 ans. L’empereur se débat, essaie d’échapper à la prise mortelle, mais son agresseur, champion de lutte, est bien trop fort. Commode suffoque. Commode meurt. Dans la bagarre, Narcisse se retrouve assis sur son maître. Patrick Sébastien, qui assiste à la scène dans un coin de la pièce, s’esclaffe grassement : "D’où l’expression mon cul sur le Commode." Ainsi périt, à 30 ans, l’un des plus sanguinaires empereurs romains, de la lignée des Néron et des Caligula. Il a fait disparaître des centaines de supposés comploteurs. Pire, aux yeux de BB : il a exterminé des centaines de lions, d’éléphants, de rhinocéros, d’autruches et même de girafes dans les arènes de Rome.

Commode devient empereur à 18 ans, en l’an 180, lorsque son père Marc-Aurèle décède de maladie à Vienne où il est venu combattre les barbares menaçant les frontières de l’empire. Normalement, dans la dynastie des Antonins, le fils ne succède pas au père. Avant de mourir, les empereurs désignent l’homme le plus digne de diriger l’empire. Mais voilà, Marc-Aurèle veut briser cette tradition. Il croit être capable de façonner un homme d’État avec la chair de sa chair.

Vie de luxe

Marc-Aurèle donne à son fils les précepteurs les plus renommés de l’époque. Avant de s’éteindre, il recommande une dernière fois son fiston à ses fidèles conseillers. Au cours de ses premiers mois de règne, le jeune Commode fait profil bas. Même s’il n’est pas né à Neuilly, il sait se tenir. Respectant le protocole habituel, il fait incinérer papa avant de le faire déifier. Maintenant, que doit-il faire ? Poursuivre le combat contre les barbares et vivre à la dure parmi ses légions ? Ou bien regagner Rome par n’importe quel chemin pour y profiter du luxe, des femmes et de la bonne chère avec Beigbeder ? Vivre à la spartiate ou vivre en débauché ? Doté d’un faible caractère, le jeune empereur suit les conseils de ses compagnons de beuverie de retourner à Rome pour organiser des soirées bunga-bunga.

Commode bâcle un accord de paix avec les barbares avant de filer dans la capitale de l’empire où il se fait adouber par le peuple enthousiaste. Au cours de ses premières années de règne, Commode se montre commode et raisonnable, respectant les conseils des amis de son père. Il se préoccupe davantage de ses plaisirs que de gouverner l’empire. Son sérail comprend 300 jeunes femmes et quasiment autant de beaux jeunes hommes, dit-on.

Le goût du sang

La vie est magnifique jusqu’au jour où Commode échappe à une tentative d’assassinat montée par sa soeur Lucilla (jalouse de l’impératrice régnante) et certains sénateurs. Dès lors, le jeune empereur développe une haine implacable pour le Sénat, basculant dans la plus noire paranoïa. Il laisse le commandant de la garde prétorienne Pérennius exécuter sa soeur et ses complices. Il emploie une armée de délateurs chargés de dénoncer les sénateurs pour des crimes imaginaires. Prenant goût au sang, Commode envoie à la mort tous ceux qu’il soupçonne de trahison. Simultanément, de nombreux soldats désertent pour former des bandes de brigands. L’un d’entre eux, du nom de Maternus, ose même marcher sur Rome pour s’emparer du trône impérial. Il est dénoncé avant d’y parvenir, mais cette nouvelle tentative renforce Commodore dans sa parano.

L’empereur se présente comme le nouveau Romulus. Il rebaptise les institutions, renomme les mois de l’année. Rome devient Colonia Lucia Annia Commodiana. Il affirme bientôt être Hercule, fils de Jupiter, s’habille d’une peau de lion et s’arme d’une massue. Pour se concilier le peuple, il lui offre des jeux de cirque démentiels dans lesquels il massacre des centaines d’animaux sauvages qu’il fait venir d’Afrique, mais aussi d’Inde. Il serait ainsi à l’origine de la disparition du lion de l’Atlas en Afrique du Nord.

Il n’hésite pas, non plus, à descendre dans l’arène pour combattre comme gladiateur, une profession pourtant réputée infâme. Aux yeux des Romains, c’est aussi scandaleux que si François Hollande participait à Koh-Lanta ! Totalement insensé, Commode fait ériger des statues colossales de lui. Les Romains commencent à se lasser de ses excès.

Provocation suprême

Commode précipite sa fin lors de la fête des saturnales de novembre 192. Il promet un spectacle de cirque extraordinaire aux Romains, qui accourent des quatre coins de l’empire pour y assister. Depuis une plateforme surélevée ceinturant l’arène, il commence par abattre à l’arc et à la javeline des centaines de lions, d’ours, de léopards, de cerfs, de gazelles et d’autruches. Mais aussi un tigre, un hippopotame et un éléphant.

Chaque jour, il descend dans l’arène pour combattre une flopée de gladiateurs qui se laissent vaincre, et même tuer, sans moufter. Fin décembre, provocation suprême, il annonce vouloir inaugurer la nouvelle année non pas revêtu du costume pourpre traditionnel dans son palais, mais déguisé en gladiateur dans le gymnase de ces derniers. Sa concubine préférée Marcia le supplie à genoux de renoncer à sa folie pour ne pas déshonorer Rome. Furieux, il ne l’écoute pas. Au contraire, il convoque l’intendant du palais Eclectus et le préfet du prétoire Laetus pour leur demander de lui installer un appartement dans le gymnase des gladiateurs. À leur tour, les deux hommes tentent de lui faire abandonner ce projet iconoclaste. Rien à faire.

Pris à son propre piège

Rendu enragé par ces avis contraires, l’empereur rentre dans sa chambre, saisit une tablette taillée dans de l’écorce déliée de tilleul pour y inscrire le nom de ceux qu’il compte faire exécuter la nuit suivante. En tête de liste, il inscrit Marcia, Eclectus et Laetus, suivis des noms de plusieurs autres sénateurs. Il pose la tablette pour prendre un bain coquin avec quelques-unes de ses favorites. Sans qu’il y prenne garde, un des garçonnets préposés à ses petits plaisirs pédérastiques s’empare innocemment de la tablette pour jouer avec.

Marcia, qui passe par là, la lui confisque. En y jetant un coup d’oeil, elle découvre avec effarement sa condamnation à mort. "Courage, Commode, se dit-elle, voilà récompense que tu prépares à mon amour, à ma tendresse, à la résignation avec laquelle, pendant de si longues années, j’ai supporté tes brutalités et tes débauches ! Mais un homme toujours plongé dans l’ivresse ne triomphera pas d’une femme sobre."

Marcia prévient aussitôt Eclectus et Laetus et, ensemble, ils décident d’assassiner l’empereur le jour même. C’est une question de vie ou de mort pour eux. Comment procéder ? Marcia a l’habitude de lui présenter une coupe de vin à la sortie de son bain. Cette fois, elle y glissera du poison. Aussitôt, elle passe à l’action. Sans se méfier, Commode boit le vin et s’endort sur son lit. Bientôt de violents maux d’estomac le réveillent. Il est pris de vomissements. Les trois conjurés s’inquiètent : si Commode rejette le poison, il vivra et eux mourront. Ils n’ont qu’une solution, convaincre l’esclave Narcisse de tuer son maître. Celui-ci accepte contre une forte récompense. Il se dirige vers le lit de Commode, qu’il saisit au cou pour l’étrangler... Ainsi périt l’empereur romain qui se prenait pour Hercule.

C’est également arrivé un 31 décembre

1992 - La Tchécoslovaquie est dissoute et divisée en deux États : la République tchèque et la Slovaquie.

1985 - Mort du chanteur américain Rick Nelson dans un crash d’avion.

1978 - Les États-Unis cessent leurs relations officielles avec Taïwan pour reconnaître la Chine communiste.

1968 - L’avion supersonique Tu-144 construit par les Soviétiques effectue son premier vol.

1965 - Début du coup d’État de Jean Bédel Bokassa en Centrafrique.

1951 - Fin du plan Marshall.

1923 - Pour la première fois, la radio retransmet les douze coups de minuit de Big Ben.

1916 - Dîner en l’honneur d’Apollinaire avec Picasso, Max Jacob, Gide, Cendrars, etc.

1891 - Installation des services d’immigration sur Ellis Island, à New York.

1879 - Edison fait la première démonstration publique de la lampe à incandescence.

1687 - Les premiers huguenots quittent la France pour le cap de Bonne-Espérance.

1600 - Élisabeth Ire d’Angleterre accorde une charte royale à la Compagnie anglaise des Indes orientales.


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