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Garderies et collèges gratuits : Obama entrevoit une nouvelle ère pour les États-Unis

vendredi 1er mai 2015

Sur un ton nettement optimiste, le président américain Barack Obama a énoncé mardi soir une série de mesures pour tenter de contrecarrer la flambée des inégalités sociales aux États-Unis lors de son discours sur l’état de l’Union.

Un texte de Lili BoisvertTwitterCourriel

Prenant acte des bons indicateurs économiques, le président a prononcé un discours très progressiste et a invité les Américains à tourner la page sur la récession, tout en appelant à une plus grande redistribution de la richesse.

« Nous voici 15 ans dans le nouveau siècle. Quinze années qui ont débuté avec une attaque terroriste sur notre territoire, qui ont engendré deux guerres longues et coûteuses, qui ont vu une récession violente se répandre à travers notre pays et le monde. Mais ce soir, nous tournons la page », a dit le président.

« Aujourd’hui, avec une économie en croissance, des déficits en réduction, une industrie en plein boom et une production d’énergie en forte hausse, nous sommes sortis de la récession plus libres de déterminer notre avenir que n’importe quelle autre nation sur Terre. Il nous incombe maintenant de choisir qui nous voulons être dans les 15 années à venir », a déclaré le président, avant de livrer un vibrant plaidoyer pour la classe moyenne.

« Allons-nous accepter une économie où seul un petit nombre obtient des résultats spectaculaires ou allons-nous nous engager à une économie qui génère une amélioration des revenus et des perspectives d’avenir pour tous ceux qui livrent l’effort requis ? », a martelé Barack Obama, tentant de donner un nouveau souffle au rêve américain.

« Ce pays se dépasse quand chacun a une chance égale, quand chacun participe, quand chacun suit les mêmes règles. »
— Barack Obama

À l’heure actuelle, une poignée de familles américaines (0,1 %) détient 22 % de la richesse du pays, alors qu’elle en possédait seulement 7 % à la fin des années 1970, selon les travaux de deux économistes français, Emmanuel Saez et Gabriel Zucman.

À lire aussi : Où en est la classe moyenne aux États-Unis ?

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Congés de maternité et services de garde abordables

Parmi ses propositions les plus à gauche, le président souhaite notamment donner des congés de maternité aux Américaines. Et il voudrait rendre les services de garde plus abordables, grâce à une réduction fiscale allant jusqu’à 3000 $ par enfant par année, dans un pays où faire garder un enfant peut parfois coûter jusqu’à 1200 $ par mois.

« Ce n’est pas juste une politique sympathique, c’est une politique nécessaire », considère Obama.

« Il serait temps que nous cessions de voir les garderies comme une question secondaire ou une affaire de femmes et que nous l’abordions comme une priorité économique nationale. »
— Barack Obama

Le plan du président envisage aussi de donner un minimum de sept jours de congé payé aux 43 millions d’Américains dont les congés de maladie ne sont pas assurés.

Barack Obama aimerait par ailleurs rendre gratuits les collèges communautaires, qui offrent des formations universitaires courtes.

« Le Tennessee, sous la gouverne des républicains, et Chicago, où les démocrates sont au pouvoir, montrent que les collèges communautaires gratuits sont possibles. Je veux répandre cette idée partout en Amérique pour que deux années au collège communautaire puissent vraiment être gratuites et universelles, au même titre que le secondaire. »

À lire aussi :

Le retour d’Obama (le blogue de Christian Latreille)

Politique étrangère

Concernant la politique étrangère des États-Unis, le président a évoqué lors de son discours le dossier de la guerre contre le terrorisme islamiste, deux semaines après les attentats djihadistes en France.

« Nous sommes unis avec tous les gens dans le monde entier qui ont été pris pour cible par des terroristes, que ce soit à l’école, au Pakistan, ou dans les rues de Paris. Nous allons pourchasser les terroristes, nous allons perturber leurs réseaux et nous allons [les] vaincre. Nous nous réservons le droit d’agir unilatéralement afin de [les] éliminer », a clamé le président, demandant au congrès d’autoriser formellement l’usage de la force contre le groupe armé État islamique.

Barack Obama a également profité de l’occasion pour défendre sa décision de normaliser les relations américano-cubaines.

« À Cuba, nous mettons fin à une politique qui était vraiment périmée. Quand ce que vous tentez ne fonctionne pas pendant 50 ans, serait-ce le temps d’essayer quelque chose de différent ? Notre transition face à Cuba a le potentiel de mettre fin à cet héritage de méfiance dans notre hémisphère », a-t-il dit, s’adressant au Congrès pour qu’il envisage dès cette année la fin de l’embargo.

Rare sujet sur lequel il peut espérer un vote favorable de ses adversaires républicains, Barack Obama a en outre sollicité auprès du Congrès l’adoption d’une « procédure accélérée » de négociation sur les accords de libre-échange avec l’Union européenne et la région Asie-Pacifique qui lui donnerait des pouvoirs accrus de négociation.

Réformes possibles ou coup d’épée dans l’eau ?

Lors de son discours, Barack Obama a exhorté ses opposants républicains à participer au débat sur l’avenir « sans que nous nous diabolisions ». Lui donnant la réplique et rivalisant de bonnes intentions, la sénatrice républicaine Joni Ernst a déclaré qu’avec « un peu de collaboration du président, nous pouvons arriver à faire fonctionner Washington de nouveau ».

Quoi qu’il en soit, le discours sur l’état de l’Union de Barack Obama, en raison de son caractère progressiste, a probablement indisposé plusieurs républicains du Congrès, comme le souligne le correspondant de Radio-Canada à Washington, Christian Latreille. Les mesures envisagées par le président, qui s’adressait au Congrès pour la première fois depuis que les républicains se sont emparés du Sénat lors des élections de mi-mandat de novembre, pourraient bien sûr être bloquées par les élus du Grand Old Party.

Le sénateur républicain Marco Rubio, qui pourrait se lancer dans la course à la Maison-Blanche en 2016, juge « dépassées » les propositions de Barack Obama, qui se résument selon lui à « plus d’impôts et plus de dépenses ». Curt Clawson, du Tea Party, a renchéri en déclarant qu’il était impossible « d’être prospère en dépensant ». Il a plutôt proposé de réduire les taux d’imposition aux entreprises de moitié.

Le président n’est toutefois pas sans recours. Il a déjà rappelé à ses adversaires ces dernières semaines qu’il n’hésiterait pas à se servir de son veto pour bloquer à son tour les propositions républicaines qui arrivent sur son bureau, à propos, par exemple, du nucléaire iranien ou de la construction de l’oléoduc Keystone XL.


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