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Inauguration du Mémorial ACTe

Hollande : « Quand je viendrai en Haïti, j’acquitterai à mon tour la dette que nous avons. »

mardi 12 mai 2015

Le président Michel Martelly et des chefs d’Etat et de gouvernement de la région et de l’Afrique ont participé dimanche, à Pointe-à-Pitre (Guadeloupe) à l’inauguration du Mémorial ACTe, grand centre caribéen d’expressions et de mémoire de la traite et de l’esclavage. Le moment a été fort et hautement symbolique ce 10 mai, date de commémoration de l’abolition de l’esclavage. Surtout quand le président François Hollande, attendu à Port-au-Prince ce mardi, a lancé : « (…) quand je viendrai en Haïti, j’acquitterai à mon tour la dette que nous avons. »

Le moment le plus fort lors de l’inauguration du Mémorial ACTe est l’annonce surprenante du président François Hollande de l’acquittement de la dette d’Haïti. Envers le président Michel Martelly, François Hollande a exprimé sa « fierté » de le voir participer à ce 10 mai un peu particulier. Le président français a souligné l’exceptionnel combat pour la liberté d’Haïti", "première colonie libre, première République noire ayant fait échec au rétablissement de l’esclavage" par Napoléon en 1802. François Hollande a aussi admis qu’Haïti a dû verser une "rançon d’indépendance" (150 millions de francs or) à la France jusqu’au milieu du XXe siècle. « Eh bien, quand je viendrai en Haïti, j’acquitterai à mon tour la dette que nous avons », a déclaré le président sous un « standing ovation ».

L’annonce un peu ambiguë de M. Hollande ne cesse d’alimenter les débats notamment sur le « comment » de l’acquittement de la dette. Réponse ce mardi.

Dans un long discours, le président français a fait un sursaut dans l’histoire, convoquant l’abbé Grégoire, Victor Schœlcher, les Nègres marrons ou encore Toussaint Louverture, et bien d’autres, pour rappeler l’histoire de la traite et le long combat pour l’abolition. Le mot « réparation » a évidemment été évoqué. Une nouvelle fois. « Le débat sur les réparations, je le sais, n’est pas épuisé, a déclaré François Hollande. Je reprends à mon compte les mots d’Aimé Césaire quant à la nature irréparable du crime. Cependant, en lui donnant un nom et un statut en 2001, le Parlement français accomplissait un acte de vérité, de courage et de justice, indispensable, la première des réparations. »

« En l’inscrivant dans les programmes scolaires, à tous les niveaux d’enseignement, conformément à la loi, réparation est faite de l’oubli et de l’occultation, a poursuivi le président. Mais il reste à explorer l’incommensurable legs laissé par toutes ces générations. »

Le Mémorial ACTe, pour dire non à la traite et l’esclavage

C’est désormais la signature de Pointe-à-Pitre, ville cœur de l’archipel guadeloupéen. Composé de deux bâtiments formant un gigantesque serpent tapissé de granit noir, troué par une arche monumentale, surmonté d’un lacis en aluminium anodisé, le Mémorial ACTe est splendide. Un bijou architectural. Accueilli au son grave des tambours et des conques, le président François Hollande, à la tête d’une imposante délégation, a inauguré l’édifice conçu pour être le centre le plus important au monde consacré au souvenir de la traite négrière et de l’esclavage. Des chefs d’Etat et de gouvernement de la Caraïbe et de l’Afrique (Bénin, Sénégal, Mali) – des pays dont le passé est tissé de la traite et de l’esclavage – n’ont pas raté un tel événement.

Au lieu de bateaux négriers, c’est plutôt des paquebots de croisière qui accosteront au ponton du Mémorial ACTe, qui ouvrira ses portes le 7 juillet. Comme le soulignent les responsables, ce n’est pas un musée de beaux-arts ou de société, mais un lieu aux multiples activités, aux multiples approches, aux multiples ambitions… Un lieu de mémoire dédié à l’histoire de l’esclavage. Un geste mémoriel fort. « Silver roots on a black box » (des racines d’argent sur une boîte noire). Un ensemble de 7 124 mètres carrés, solidement enraciné sur le site de l’ancienne usine sucrière de Darboussier, la plus grande unité sucrière des Petites Antilles.

Le Mémorial ACTe est vraiment bien plus qu’un musée. Son exposition permanente de 1 500 mètres carrés permet une visite d’au moins une heure. Une salle d’exposition temporaire de 700 mètres carrés prévue pour une grande exposition par an et de multiples activités allant du festival au salon ; une salle polyvalente de 300 places pouvant accueillir un spectacle, une projection de film ou encore des conventions ou autres événements ; un espace dédié aux chercheurs invités est associé à un centre de documentation ouvert au public ; plusieurs espaces de restauration et un restaurant gastronomique ; un centre de recherches généalogiques où les familles antillaises pourront consulter des fonds d’archives publiques et privées, ainsi que des actes d’état civil…

Le président François Hollande - qui a dénoncé les "nouveaux négriers" tels ceux qui œuvrent en Méditerranée pour faire passer des migrants - ainsi que le président de la Région Guadeloupe, Victorin Lurel, et le maire de Pointe-à-Pitre, Jacques Bangou se sont tous félicités de la concrétisation du « Centre caribéen d’expressions et de mémoire de la traite et de l’esclavage ». Ils ont tous insisté sur le symbolisme du Mémorial ACTe, qui a coûté 83 millions d’euros, . Un monument, disent-ils, à la hauteur du crime commis.

AUTEUR

Valéry Daudier

vdaudier@lenouvelliste.com


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