MosaikHub Magazine

Taubira comparée à un singe à la Une de Minute : prison avec sursis requise en appel

jeudi 4 juin 2015

Deux mois de prison avec sursis et 10.000 euros d’amende ont été requis jeudi devant la cour d’appel de Paris contre le directeur de la publication du journal d’extrême droite Minute pour sa Une comparant la ministre de la Justice, Christiane Taubira, à un singe.

En première instance, Jean-Marie Molitor avait été condamné à 10.000 euros d’amende pour injure raciale. Jugeant cette peine trop clémente, le parquet avait fait appel.

Dans son édition du 13 novembre 2013, le journal avait publié une photo de la garde des Sceaux, avec ce titre : "Maligne comme un singe, Taubira retrouve la banane".

Peu de temps avant la parution de cette Une, Mme Taubira avait été la cible de propos racistes du même acabit, de la part d’une jeune fille lors d’une manifestation d’opposants au mariage homosexuel ou encore d’une ex-candidate FN aux municipales dans les Ardennes. Anne-Sophie Leclère a été condamnée sur plainte d’un parti local guyanais à neuf mois de prison ferme par le tribunal correctionnel de Cayenne (Guyane) et attend la décision en appel le 22 juin.

Après cette parution qui avait suscité une vague d’indignation, la ministre avait dénoncé des propos "d’une extrême violence", qui "dénient mon appartenance à l’espèce humaine". "J’encaisse le choc mais c’est violent pour mes enfants, pour mes proches et pour tous ceux qui ont une différence", avait-elle ajouté.

Dans la presse comme devant les enquêteurs, Jean-Marie Molitor, absent à l’audience, s’était défendu de tout racisme, reconnaissant seulement une couverture de "mauvais goût".

Selon lui, l’hebdomadaire n’est "pas un journal d’extrême droite", mais "libre et indépendant". Il a assumé cette Une, selon lui issue d’un "travail collectif".

Battant en brèche l’argumentation de la défense consistant à souligner que Mme Taubira est la supérieure hiérarchique du parquet, l’avocate générale, Nathalie Savi, a souligné qu’elle prendrait des "réquisitions similaires" s’il s’était agi de quelqu’un d’autre.

- Nausée et mains sales -

Pour l’avocat de M. Molitor, Me Frédéric Pichon, Minute a voulu à travers cette Une "volontairement alléchante" mettre en exergue l’"instrumentalisation politique" que ferait selon lui la ministre de la Justice des attaques dont elle fait l’objet.

En première instance, le tribunal, avait estimé que "la rédaction du journal ne pouvait qu’être consciente de réitérer l’attaque reconnue comme raciste" et "de raviver la polémique au lieu de la désamorcer, la réitération de ces allusions à un primate pouvant même être interprétée comme une provocation supplémentaire". Les juges de la chambre de la presse avaient étrillé le "poncif clairement raciste" repris par le journal.

La cour d’appel de Paris s’est également penchée jeudi sur un dessin, paru dans Minute le 30 octobre 2013, passé presque inaperçu à l’époque.

Il représentait un singe, versant une larme, dont l’avocat déclarait : "Mon client porte plainte pour avoir été odieusement caricaturé en madame Taubira".

Le tribunal avait relaxé M. Molitor et le dessinateur David Miège, relaxe dont le parquet avait aussi fait appel.

Dans ce dossier, l’avocate générale a requis un mois de prison avec sursis et 5.000 euros d’amende contre le directeur de la publication, et une amende de 2.000 euros contre le dessinateur David Miège.

Absent devant la cour d’appel, il avait expliqué lors du premier procès que le propos était de dénoncer la "judiciarisation à outrance".

Le dessinateur s’est revendiqué de Pierre Desproges, humoriste qui jugeait plus économique de lire Minute que Sartre car "pour le prix d’un journal, vous avez à la fois la nausée et les mains sales".

Les décisions seront rendues le 17 septembre.


Accueil | Contact | Plan du site | |

Creative Commons License

Promouvoir & Vulgariser la Technologie