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L’exportation de mangues, une industrie qui peine à se développer

mardi 18 août 2015

Si, en matière d’exportation des denrées agricoles, la mangue occupe les premiers rangs, très peu de progrès ont été, néanmoins, réalisés dans la production de cette manne verte. En plus de quarante ans, le pays n’arrive toujours pas, en volume, à doubler son exportation. Selon Jean Maurice Buteau, qui a œuvré pendant trente ans dans l’exportation de ce produit et qui continue de travailler dans le secteur, tout un ensemble de facteurs contribue à cette lamentable situation. Il a exposé certains d’entre eux.

Les exportations formelles de la mangue d’Haïti vers les États-Unis d’Amérique ont commencé vers les années 70. Au cours de cette période, le volume d’exportation se situait aux alentours de 1,5 million de caisses. Depuis, le secteur privé des affaires manifeste, à bien des égards, son intérêt à propulser cette production afin d’augmenter l’exportation pendant que tous les Haïtiens continuent d’avoir accès à cette denrée. Des contraintes majeures, de divers ordres, empêchent ce dernier d’atteindre son objectif. Encore aujourd’hui, l’exportation des mangues atteint très difficilement 2,5 millions de boîtes tandis que le Mexique, pour ce même intervalle, a sextuplé son exportation vers les USA. Sans vouloir dresser un tableau sombre de ce qui se fait dans cette filière, M. Buteau déplore qu’il n’y ait pas un plan bien élaboré incluant l’ensemble des acteurs pour augmenter la production. Les problèmes, explique-t-il, sont à tous les niveaux de la chaîne. Le manque d’incitatifs financiers et d’infrastructures adéquates, en passant par l’inexistence d’un plan définissant les filières porteuses par les autorités gouvernementales, sans oublier les problèmes relatifs au titre de propriété sont parmi les causes qui expliquent cet état de fait. Dans les moments de difficultés, l’apport des autorités gouvernementales, en témoignent les multiples efforts consentis en 2007, est considérable. Cependant, ce partenariat ne tient pas compte de l’existence d’un plan définissant la stratégie des autorités compétentes à augmenter la production. Rien n’a changé dans la production de la mangue. Ce qui, selon l’entrepreneur, rend le secteur plus risqué de jour en jour. Parmi les fournisseurs des États-Unis, les exportateurs haïtiens sont les seuls qui ne peuvent pas soumettre leurs prévisions hebdomadaires aux instances importatrices. La façon dont s’organise la filière demeure donc un handicap de premier ordre pour ces investisseurs. À l’actif des autorités gouvernementales, les rares travaux effectués sont réalisés dans les années 80. Cette filière de laquelle dépend totalement ou partiellement plus de 200 000 familles haïtiennes est, selon toute vraisemblance, sous-estimée. Ce secteur n’attire presque plus les investisseurs qui ont consenti d’énormes investissements en matériel et équipement pour le traitement et le conditionnement de ces produits. Pour se maintenir sur le marché américain, le Département de l’Agriculture des États-Unis a fait, en termes de règlements phytosanitaires, d’énormes exigences aux exportateurs. Ceux d’Haïti ne sont pas exempts. Ces difficultés, doublées d’un manque de formation des producteurs, ne favorisent pas la mise en place de plantations de mangues. Plus de 95% de la production est réalisée par des petits producteurs. Ce qui rend la tâche plus difficile pour les exportateurs qui ont du mal à changer la donne. Les rares tentatives faites en ce sens se sont soldées par des échecs criants. La production se fait toujours par des paysans qui n’ont ni la science ni les moyens adéquats et qui, en majeure partie, se fait dans des jardins créoles sur des petites parcelles ne dépassant pas 1,5 hectare. Pour l’entrepreneur, deux facteurs sont à prendre en compte si l’on veut augmenter l’exportation de la mangue qui constitue un élément important pour diminuer le déficit dans la balance commerciale du pays. En plus de l’augmentation de la production, la réduction des pertes postrécoltes demeure l’un des handicaps du secteur. Malgré le nombre d’organisations non gouvernementales (ONG) évoluant dans ce secteur, il est difficile de trouver des chiffres actualisés relatifs à cette filière. L’État, par le biais des ministères de l’Agriculture et de la Planification, n’évalue pas vraiment le travail de ces instances. Ces dernières n’ont de compte à rendre à personne. Toujours est-il que la mangue demeure une filière porteuse et génératrice de revenu pour le pays. Ce secteur mérite bien le support des autorités gouvernementales. Les chiffres de l’exportation n’atteignent toujours pas les 2,654 millions de caisses de l’année 2006. C’est l’un des produits dont l’offre est largement inférieure à la demande. Pour maintenir ce produit sur le marché international, de grands efforts méritent d’être consentis en commençant par encourager la production commerciale et la mise en place des infrastructures adéquates en vue de diminuer les risques.


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