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26 août 1660. Nouveau-marié, Louis XIV défile dans Paris, admiré par la borgne qui l’a dépucelé à 16 ans.

mercredi 26 août 2015

Sur le balcon de son hôtel, Cateau la Borgnesse assiste avec Anne d’Autriche à l’arrivée de Marie-Thérèse à Paris.
Frédéric Lewino et Gwendoline Dos Santos

Il n’y a que du beau linge sur le balcon de l’hôtel de Beauvais cet après-midi du 26 août 1660 : Anne d’Autriche, Mazarin, la reine d’Angleterre et sa fille, le vicomte de Turenne et tous les plus hauts dignitaires de la cour. Tout ce beau monde attend le passage du cortège triomphal de Louis XIV ramenant d’Espagne sa jeune épouse, Marie-Thérèse. Peu importe que la nouvelle reine de France ressemble à un improbable croisement entre Mimi Mathy et Régis Laspales... Paris est en fête, Paris pavoise. Cachée derrière Anne d’Autriche, se tient la propriétaire de l’hôtel de Beauvais, Catherine-Henriette Bellier - dite Cateau la Borgnesse. Non seulement, elle a perdu l’usage d’un oeil, mais elles est vieille, laide et lubrique. Mais voilà, elle jouit de la gloire d’avoir dépucelé le roi six ans plus tôt, lorsqu’il avait 16 ans et elle 40 ! D’où sa fortune. D’où son hôtel.

L’ascension de Cateau est époustouflante. Fille du commerçant en rubans Martin Bellier, elle épouse un certaine Pierre Beauvais. Lequel la fait engager comme femme de chambre d’Anne d’Autriche qui en fait sa favorite car elle excelle à la purger avec un doigté hors du commun. Personne ne sait, comme elle, introduire un clystères dans un anus . Ce qui n’est pas un mince atout à une époque où la médecine recommande des lavements fréquents pour éclaircir la bile et rester en bonne santé. Les grands du royaume se lavent donc les intestins comme aujourd’hui on s’injecte du Botox.

Protection du Roi-Soleil

En 1654, la reine mère s’inquiète pour la libido de son petit Louis. À 16 ans, il devrait déjà sauter les bonnes avec l’énergie d’un Hollande, mais rien de tout cela. Il ne semble pas du tout attiré par la gent féminine. D’où l’énorme crainte d’Anne d’Autriche de le voir aussi mou du genou et du reste que son père Louis XIII. N’a-t-il pas fallu vingt-deux ans à ce dernier pour enfin réussir à planter la petite graine qui deviendra Louis XIV ? À noter que c’est pour remercier Dieu d’être tombée enfin enceinte de petit Louis qu’Anne d’Autriche fait ériger l’abbaye du Val-de-Grâce.

Bref, constatant que son fils n’a pas d’amourette, Anne d’Autriche le pousse dans les bras de la vieille borgne, sa femme de chambre, reine de la purge. Celle-ci s’empresse de s’introduire dans la chambre du jeune Louis pour introduire le mini-clystère royal dans sa docte personne. Aucun témoignage ne précise si celui-ci a goûté l’exercice, mais force est de constater qu’il n’a plus, depuis lors, cessé de multiplier les conquêtes. Rassurée sur la sexualité de son petit mâle, la reine mère couvre Cateau la Borgnesse d’honneurs et d’argent. Elle récompense même son époux, peu jaloux, Pierre Beauvais en le faisant conseiller du roi et baron. La reine du clystère consacre sa nouvelle fortune à la construction de l’hôtel de Beauvais, rue Saint-Antoine (dans une portion devenue la rue François-Miron). Faute d’un terrain suffisamment vaste, le premier architecte du roi, Antoine Le Pautre, établit le corps principal du bâtiment sur la rue. Au rez-de-chaussée, Cateau lui demande de prévoir des boutiques pour les louer à des marchands. C’est une première. Jusqu’à sa mort en 1690, à 76 ans, la lubrique borgne bénéficiera toujours de la protection du Roi-Soleil.

Vive les mariés

Pour en revenir au 26 août 1660, le jeune Roi-Soleil monté sur un cheval bai couvert d’une housse brodée d’argent et de pierreries, est heureux de présenter son épouse, Marie-Thérèse, aux Parisiens qui, il n’y a pas si longtemps, menaient la Fronde contre lui. Les façades sont parées de feuillages, de tapisseries et de tableaux. Vive les mariés ! Le peuple est en liesse. Stéphane Bern est présent pour TF1. Lui qui a débuté comme homme-pipi à Versailles ne pouvait pas rater cet événement. De huit heures à midi, le roi et son épouse reçoivent les hommages et les soumissions de tous les corps et compagnies supérieures, assis sur un trône à l’extrémité du faubourg Saint-Antoine (aujourd’hui la place de la Nation).

À 14 heures, le couple royal, suivi par un immense cortège, traverse Paris pour se rendre au Louvre. Précédé par les troupes de sa maison, le roi caracole sur son cheval, accompagné par les princes et les plus grands seigneurs de France, tous magnifiquement vêtus. La timide Marie-Thérèse suit dans un carrosse couvert d’or et d’argent, tiré par six chevaux gris perle. Elle est entourée par les princesses et les dames les plus qualifiées. Derrière suivent, dans un cortège interminable, toutes les confréries, tous les corps de métier, des religieux, des magistrats... Le soir, quand enfin les deux mariés se retrouvent au lit, on imagine que Louis a une pensée pour celle qui l’a initié aux joies du sexe.


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