MosaikHub Magazine

Légion d’honneur aux victimes des attentats : le choix absurde de François Hollande

mercredi 9 décembre 2015

Pourquoi attribuer la Légion d’honneur, censée récompenser le mérite, à ces innocents morts d’avoir été au mauvais endroit au mauvais moment ?

Par Violaine de Montclos

L’Élysée fait savoir depuis quelques jours, comme le révélait Europe 1 le 8 décembre, que François Hollande envisage sérieusement de décerner la Légion d’honneur, à titre posthume, aux 130 victimes des attentats du 13 novembre. Comme elle devient gênante, en pleine période électorale, cette surenchère victimaire. Et combien est absurde, surtout, l’option Légion d’honneur.

On comprend évidemment que la nation rende hommage à ces 130 innocents fauchés par la barbarie djihadiste, morts de s’être trouvés au mauvais endroit et au mauvais moment. Mais il y avait mille façons de leur témoigner le respect du pays. L’Espagne, en 1999, a créé une décoration spécifique aux victimes d’attentats terroristes. Les États-Unis ont érigé un monument aux morts du 11 septembre. Choisir dans la précipitation la Légion d’honneur, qui n’est pas une prime au drame, ni au deuil, mais est censée récompenser le mérite, c’est faire de la communication malvenue, et c’est faire fi de l’esprit d’une institution à laquelle les Français, quelles que soient les fréquentes critiques qu’ils lui adressent, sont tout de même dans leur majorité attachés.

C’est même au fond, bien plus grave encore, donner un sens à ces tueries perpétrées au hasard : aussi injuste et intolérable soit leur mort, quel mérite avaient les victimes du Bataclan et des terrasses du 11e arrondissement ? Leur fin est absurde et doit rester gravée comme telle dans la mémoire de la nation.

Des règles d’attribution voulues par de Gaulle

D’ailleurs jamais, depuis sa création en 1802, la Légion d’honneur, dont ce n’est encore une fois pas la fonction, n’a été ainsi automatiquement décernée à des victimes. Après la Première et la Seconde Guerre mondiale, d’innombrables décorations posthumes ont été décernées, mais à des civils et à des militaires qui s’étaient battus. Qu’on songe, pour prendre un peu de hauteur, qu’il ne "suffit" pas d’avoir été déporté pour être décoré de la Légion d’honneur, mais qu’il faut avoir été, par exemple, déporté pour faits de résistance…

Car enfin à ce compte combien de morts, combien de victimes innocentes de l’histoire du pays mériteraient cette décoration ? Combien de nouvelles victimes du terrorisme, hélas, la recevront sans doute encore ? Dans le code de la Légion d’honneur, sorte de législation du mérite profondément remaniée par le général de Gaulle en 1962, un article autorise la décoration posthume à des personnes mortes dans l’exercice de leur fonction. C’est à ce titre, après le 7 janvier, que les trois policiers décédés ont été décorés. Mais aussi, déjà très étonnamment, les quatre victimes de l’Hyper Cacher. Cette fois, pour décorer 130 victimes, il faudra réformer dans l’urgence et sous le coup de l’émotion le code voulu par de Gaulle. La grande chancellerie, probablement prise de cours, n’a pas souhaité s’exprimer sur le sujet. François Hollande, grand maître de la Légion d’honneur, aura de toute façon le dernier mot.


Accueil | Contact | Plan du site | |

Creative Commons License

Promouvoir & Vulgariser la Technologie