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Football - Angleterre : pourquoi Mourinho a perdu la main

jeudi 17 décembre 2015

L’entraîneur portugais a été démis de ses fonctions deux ans et demi après son retour à Chelsea. Les conséquences d’une situation qui devenait intenable.

Par Tidiany M’Bo

Le couperet a fini par tomber sur José Mourinho. L’entraîneur portugais a été démis de ses fonctions ce jeudi par son président Roman Abramovitch après un début de saison calamiteux. Les Blues occupent actuellement la 16e place en Premier League, avec un point d’avance sur la zone de relégation et 14 de retard sur la 4e place synonyme de qualification en Ligue des champions. La 9e défaite du club en championnat lundi dernier sur la pelouse de Leicester (1-2) aura été celle de trop pour le propriétaire russe.

Si la sanction a mis autant de temps à tomber, c’est aussi probablement parce que le « Special One » bénéficiait d’un contrat en or massif qui donne à ses indemnités de licenciement des allures de parachute doré : 40 millions de livres, soit 55 millions d’euros, c’est ce qu’il devrait recevoir après avoir signé à la fin de saison dernière un nouveau bail de 4 ans avec un salaire estimé à 340 000 euros par semaine.

Un bilan comptable en chute libre

Comment l’un des meilleurs entraîneurs du monde a-t-il pu tomber si bas ? Si les raisons sont multiples, le déclin sportif des Blues de l’ère Mourinho trouve ses racines au premier jour de l’année 2015 et une défaite (3-5) sur la pelouse de Tottenham durant laquelle la défense londonienne vole en éclats. Si cette déroute n’a pas empêché Chelsea de conquérir le titre de champion d’Angleterre quelques mois plus tard, elle marque néanmoins une vraie rupture dans le style et l’approche du jeu.

Envolé, le Chelsea chatoyant, porté par un trio Fabregas-Hazard-Diego Costa alors en pleine bourre. Durant la phase aller de la saison 2014-2015, Chelsea tournait à 2,15 buts marqués par match. La moyenne descend à 1,73 sur la phase retour, avec 8 de ses 13 victoires obtenues avec un seul but d’écart. Une période durant laquelle Chelsea est aussi éliminé par le PSG dès les 8es de finale de la Ligue des champions. La période estivale, conjuguée à une fracture de plus en plus nette entre Mourinho et son vestiaire, a accentué ce déclin dans les résultats, en témoigne le classement actuel des Bleus, où la moyenne de buts marqués en Premier League est tombée à 1,1 par match.

Rupture avec les joueurs

Depuis le début de saison, l’incompatibilité d’humeur entre José Mourinho et certains cadres de son vestiaire était devenue de plus en plus visible. Pas plus tard que lundi dernier après la défaite à Leicester, il estimait avoir été « trahi » par certains d’entre eux. Au mois d’août, il n’hésitait pas à nommer Ivanovic, Cahill, Hazard, Azpilicueta et Matic comme les responsables de la mauvaise passe de l’équipe en raison de leur manque de forme. Pas la meilleure idée qui soit pour un entraîneur qui a souvent utilisé comme socle, y compris dans ses précédents clubs, la capacité à inculquer à ses joueurs l’idée de « mourir pour lui ».

À défaut de piquer l’orgueil des joueurs, le Portugais a semble-t-il fait en sorte que la plupart d’entre eux le lâchent. Principal dynamiteur du jeu, Eden Hazard n’a plus marqué un but depuis près de 30 heures, soit 26 matches. Cesc Fabregas, meilleur passeur de Premier League en 2014-2015 (18 assists), possède cette saison l’un des pires ratios de passes réussies du championnat. Diego Costa, qui avait marqué 20 fois durant cette même période, plafonne actuellement à 3 réalisations… Quant à John Terry, capitaine emblématique, il a connu la mésaventure d’être remplacé à la mi-temps pour la première fois en 176 matches par José Mourinho lors de la lourde défaite (0-3) à Manchester City en août dernier.

Un phénomène d’usure récurrent

Mourinho, qui a toujours su fédérer ses joueurs et leur insuffler un esprit de sacrifice, a donc fini par user son vestiaire et une partie de son staff. Au point de paraître plus isolé que jamais. Les gestes d’humeur de Diego Costa - qui lui avait jeté une chasuble sur le banc lors d’un match au mois de novembre - et d’Eden Hazard, qui l’avait snobé à sa sortie du terrain contre Porto il y a quelques jours, sont des voyants visibles, comme l’avait été « l’affaire Carneiro », du nom de l’ancienne médecin du club, licenciée durant l’automne après une passe d’armes en plein match face à Swansea (2-2) au mois d’août.

Ses relations avec la presse britannique étaient par ailleurs de plus en plus exécrables, tout comme celles qu’il entretenait avec les arbitres anglais, pris pour cible de manière quasi systématique pour expliquer chaque contre-performance de l’équipe.

Le départ de Mourinho dans ces conditions tumultueuses semble confirmer une tendance : la deuxième et la troisième année du Portugais dans ses clubs sont rarement synonymes de réussite. Cela avait été le cas déjà lors de son premier passage à Chelsea (départ en 2007), et lorsqu’il avait quitté le Real Madrid (en 2013), là encore en raison de problèmes relationnels avec ses joueurs ou sa direction. Quel que soit son avenir, ses dernières expériences ont clairement desservi sa réputation. Reste désormais à savoir quel impact cela aura sur l’équipe, dont les objectifs sont désormais clairement établis : se maintenir en Premier League et miser sur la Coupe d’Europe, avec la perspective d’un rendez-vous en février-mars contre le PSG en 8es de finale de la Ligue des champions.


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