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La Cour pénale internationale ouvre une enquête sur la guerre Géorgie-Russie de 2008

mercredi 27 janvier 2016

Par Nicolas DELAUNAY | AFP

La procureure de la Cour pénale internationale va mener sa première enquête en dehors d’Afrique, les juges l’ayant autorisée mercredi à se pencher sur la guerre d’août 2008 ayant opposé Géorgie et Russie en Ossétie du Sud.

Cette enquête, la première de la CPI concernant un conflit impliquant la Russie, arrive à un moment de tensions entre l’Occident et Moscou : les relations, déjà dégradées avec l’annexion de la Crimée et le conflit dans l’est de l’Ukraine, se sont encore tendues avec les frappes russes en Syrie.

La procureure Fatou Bensouda avait affirmé en octobre avoir des preuves que des crimes contre l’humanité et crimes de guerre avaient été commis, des deux côtés.

Les juges l’ont autorisée mercredi à enquêter, estimant qu’"il y a une base raisonnable de croire" que des crimes incluant des meurtres, persécutions, déplacements forcés de population et pillages, ont été commis entre le 1er juillet et le 10 octobre 2008.

La décision a été largement saluée par les ONG, qui affirment qu’aucun des deux camps n’avait encore répondu de ces crimes présumés.

Le président géorgien d’alors, Mikheïl Saakachvili, soutenu par l’Occident, avait lancé dans la nuit du 7 au 8 août 2008 une offensive pour reprendre l’Ossétie du Sud, indépendante de facto depuis un conflit au début des années 90 ayant suivi le démantèlement de l’ancien bloc soviétique.

La Russie avait répondu à l’offensive géorgienne en engageant une opération militaire d’envergure et en envahissant une partie de la Géorgie.

A l’issue de cette guerre, Moscou avait reconnu l’indépendance de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie, un autre territoire séparatiste géorgien jouxtant son territoire, et y avait installé des bases militaires.

Le conflit a fait plusieurs centaines de morts, selon un bilan d’août 2008 du Haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés.

Même si la plupart ont pu rentrer chez eux, le bureau du procureur estime que plus de 138.000 personnes d ?origine géorgienne ont alors été déplacées d ?Ossétie du Sud et que la population géorgienne de cette zone avait été "réduite d ?au moins 75%".

- "Pillages, destructions" -

Dans un rapport de 2014, le bureau du procureur affirme que "les forces d ?Ossétie du Sud auraient systématiquement battu, tué et cherché à intimider des personnes d ?origine géorgienne".

Entre 51 et 113 civils d’origine géorgienne ont été tués dans le cadre de cette campagne menée "par les autorités de facto d ?Ossétie du Sud, avec l’implication possible de membres des forces armées russes".

Le rapport évoque pillages, incendies et destructions "afin de chasser cette partie de la population du territoire d ?Ossétie du Sud vers des régions contrôlées par les autorités géorgiennes".

La procureure souhaite en outre enquêter sur des attaques "dirigées contre des soldats chargés du maintien de la paix", aussi bien par les forces géorgiennes que par les forces sud-ossètes.

Sept ans après cette guerre éclair, la Géorgie panse toujours ses plaies. En août, Tbilissi accusait encore Moscou de déplacer les marqueurs de la frontière entre la Géorgie et l’Ossétie du sud, augmentant ainsi le territoire ossète aux dépens du sien.

Tbilissi soupçonne la Russie de vouloir grignoter le territoire géorgien afin de faire passer par Ossétie du sud l’oléoduc reliant Bakou, la capitale de l’Azerbaïdjan, au port géorgien de Soupsa, sur la mer Noire.

Il s’agit de la première enquête de la CPI en dehors d’Afrique. La Cour, qui mène ses huit autres enquêtes sur ce continent, est accusée par l’Union africaine de mener "une sorte de chasse raciale".

L’accusation mènait depuis 2008 un examen préliminaire sur la situation en Géorgie. Mme Bensouda avait expliqué en octobre le dépôt de la requête par le fait que les procédures nationales engagées en Géorgie ont récemment été "suspendues".

La procureure mène par ailleurs un examen préliminaire sur le conflit dans l’est de l’Ukraine, une autre guerre dans lequel l’implication de Moscou pourrait être ciblée par la CPI.
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