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Politique, jeunesse et rébellion

Ces temps-ci, la politique nous accapare comme une secte. Bloc-Notes

mercredi 24 février 2016

Comment parler d’autre chose quand on ose proposer d’anciens Premiers ministres pour occuper de nouveau ce poste ? Ils ont si bien géré la cause du peuple qu’ils méritent de revenir ? Comment parler d’autre chose quand on ne sait quels jeux et quels enjeux individuels ou sectaires se cachent derrière les tractations et tergiversations ? Il y a pourtant tant d’autres choses dont il faudrait parler. Ne serait-ce que pour ramener la politique à sa vérité ultime : quelle cause sert telle pratique. Invité à prononcer une causerie sur la citoyenneté par l’association Café Philo, puis, quelques jours plus tard avec le poète et enseignant Rodolphe Maturin, à rencontrer des élèves du Centre d’études secondaires, de l’institution Georges Marc et du Collège classique féminin pour parler du présent et de l’occupation américaine, trois choses me sont venues à l’esprit, qui renvoient au politique et pourraient lui donner du sens. La première est un devoir de transmission et de réception. J’ai pu entendre l’ignorance qui sévit chez les jeunes en ce qui concerne les pratiques de solidarité, l’histoire des mouvements revendicatifs, leur ignorance quasi totale de la masse critique qui les précède. Comme j’ai pu entendre en moi l’ignorance des tourments et conditions propres aux nouvelles générations. Il y a pourtant entre eux et nous quelque chose à fédérer, cette quête lucide d’une belle amour humaine pour plus de liberté et d’égalité. Plus que jamais, il faut installer le dialogue, transmettre, recevoir, transmettre… La deuxième chose est l’absence d’espaces, de cadres, de structures de rencontres entre jeunes originaires de milieux différents. Cette société a installé l’apartheid au sein de sa jeunesse. On peut ici avoir le même âge, partager les mêmes inquiétudes, sans jamais avoir l’opportunité de les mettre ensemble, pour les transformer en idées et actions positives pour tous. La bourgeoisie n’a que l’éloignement comme stratégie de distinction pour ses enfants. Il faut fuir les autres comme le diable. Et dans toutes les couches, semblent s’installer des logiques de gangs ou de clans. La troisième : le respect qu’il faut avoir pour les initiatives lancées par des jeunes appelés eux-aussi à vieillir. Café Philo en est un bel exemple qui survit, grandit, sans se trahir. Il y en a, des associations culturelles sans grands moyens, des groupes de réflexion… Il faut les encourager et les aider à éviter les deux écueils qui les menacent : la fermeture sur soi sur fond dogmatique ou clanique et l’inféodation à des puissances de type ONG qui pourrait les détourner du militantisme qui les a fondées. Aujourd’hui, la tendance est parfois d’aller chercher l’argent d’une institution pour commencer quelque chose. Cela fait une sacrée différence lorsque tout vient au départ d’un engagement individuel dans le collectif. Il faut les encourager et distinguer ce qui relève du militantisme de ce qui relève de l’assistanat. Ce qui naît de l’assistanat meurt avec ses mécènes. Ce qui relève du militantisme dure tant qu’il y aura des gens pour y croire. En liant ces trois choses, une quatrième apparaît : le risque d’oser est l’avenir de la jeunesse, et l’avenir de la jeunesse est notre avenir. Renouer avec cette vieille tradition qui veut que jeune on commence à discuter, se réunir, en dialogue peut-être avec les aînés mais sans chercher de parapluie économique ou autre. Se réunir, discuter, produire. Dans des domaines spécifiques. Le poids de la famille, le poids du clan ou de la religion sont énormes. Si nombreuses les forces qui encouragent la soumission, l’inertie. Ce pays a besoin de la belle rébellion de la jeunesse. Pas celle qui détruit les biens publics. Mais celle qui détruit la reproduction de structures et d’idées qui enferment et divisent. Pour les remplacer par les idées et structures qui ouvrent vraiment la voie à l’égalité et la liberté. Penser, penser ensemble, c’est déjà se rebeller. Que dès l’adolescence nos jeunes de tous les milieux commencent à mettre en question, avec la nécessaire connaissance de l’histoire, ce que nous avons produit de pire ici, et à valoriser, en le dépassant si possible, ce que nous avons fait ou tenté de mieux.
Antoine Lyonel Trouillot
zomangay@hotmail.com


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