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Khaled Sharrouf, le djihadiste qui défie l’Australie’’’

mardi 12 août 2014

"Ça, c’est bien mon fils." Le commentaire pourrait être anodin dans la bouche de n’importe quel parent du monde, fier de l’acte accompli par sa progéniture. Mais écrit sur son compte Twitter par Khaled Sharrouf, en légende d’une photo montrant un petit garçon de 7 ans tenant à bout de bras la tête d’un soldat syrien décapité, le commentaire a provoqué de vives réactions en Australie.

Repérée par News Corps, la photo aurait été prise à Rakka, une ville du nord de la Syrie, pays où s’est réfugié depuis le début de l’année Khaled Sharrouf, un Australien condamné en 2009 à quatre ans de prison pour avoir participé à la préparation d’un attentat à Sydney, dans l’affaire dite des "Terror nine". Ce père de quatre enfants âgé de 31 ans avait déjà publié plusieurs photos le mettant en scène avec ses fils, notamment devant un drapeau portant les insignes de l’Etat islamique, le groupe djihadiste ultraviolent qui a récemment fondé un califat à cheval sur la Syrie et l’Irak.

En visite en Australie, le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, a qualifié l’image de "photographie la plus monstrueuse qui ait jamais été montrée, à en avoir l’estomac retourné". La ministre des affaires étrangères australienne, Julie Bishop, a dénoncé l’"idéologie barbare" des djihadistes, et le premier ministre, Tony Abbott, a dénoncé des "atrocités".

Mais, derrière ces réactions outrées, ce sont surtout les services de sécurité australiens qui sont mis en cause. En février, une enquête avait été ouverte pour éclaircir les conditions dans lesquelles Khaled Sharrouf avait réussi le 6 décembre à embarquer dans un avion pour Kuala Lumpur, en dépit de sa condamnation pour terrorisme et de la saisie de son passeport, rappelle Le Daily Telegraph. L’homme avait en outre été arrêté quelques semaines avant son départ d’Australie pour port d’arme non autorisé – une affaire pour laquelle il était censé passer devant un tribunal – et faisait toujours l’objet d’une surveillance dans le cadre d’une enquête de contre-terrorisme.

Selon les premiers éléments de l’enquête, Khaled Sharrouf avait réussi à déjouer les contrôles de sécurité en empruntant le passeport de son frère. Les autorités australiennes avaient ensuite pu confirmer qu’il avait gagné la Syrie, sans pouvoir établir le trajet exact qui l’avait mené auprès de l’Etat islamique. L’homme est pourtant prolifique sur les réseaux sociaux et n’hésite pas à narguer ses concitoyens. Selon The Australian, il a même continué à percevoir une indemnité de handicap versée par le gouvernement plusieurs mois après son arrivée en Syrie. L’homme a également pris contact avec des médias australiens au début d’août, demandant notamment la libération de douze prisonniers islamistes en Australie. La police australienne avait lancé un mandat d’arrêt international contre lui, en vain.

La personnalité de Khaled Sharrouf reste assez trouble pour les responsables de la sécurité intérieure. Comme le rapportait le Sydney Morning Herald, plusieurs voix ont exprimé "des doutes sérieux" quant à la véracité des propos du terroriste, et à la crédibilité de ses menaces. Des expertises psychiatriques menées au moment de ses procès avaient établi un diagnostic de dépression en 1999 et de schizophrénie en 2002, rappelle le quotidien australien. "Faites-leur savoir que je les ai toujours dupés et que je n’ai jamais été mentalement malade ni avant ni maintenant", avait écrit dans son courrier au début d’août l’homme, qui se revendique "djihadiste" depuis l’âge de 19 ans.

Après cette publication, le gouvernement australien a fait part de son intention de porter devant les Nations unies le dossier des djihadistes étrangers partis pour la Syrie et qui reviennent dans leurs pays. "Il y a un certain nombre d’Etats dans le monde qui rapportent des incidents provoqués par leurs ressortissants devenus des combattants extrémistes", a mis en garde Julie Bishop. Au début de 2014, des experts estimaient que près de 120 Australiens avaient rejoint la Syrie pour y mener le djihad.

A l’instar de la France, le gouvernement australien a récemment rédigé un projet de loi pour renforcer la lutte contre le terrorisme. Parmi les propositions figurent notamment la possibilité d’étendre le temps de détention de djihadistes présumés, mais aussi une définition plus large du terrorisme, incluant la promotion et l’incitation, ou encore le retour forcé des Australiens enregistrés dans des zones d’activités terroristes afin qu’ils prouvent qu’ils n’étaient pas liés à des activités illégales.

Enfin, le plan prévoit également que les entreprises de téléphonie et les fournisseurs d’accès à Internet conservent pendant deux ans toutes les données de leurs utilisateurs (emails, historique Internet, communications...) et puissent les rendre accessibles aux autorités sur demande judiciaire.


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