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Pacs à l’italienne : pourquoi l’Église a fait profil bas

jeudi 12 mai 2016

Le Parlement italien a définitivement adopté mardi la « formation sociale spécifique », formule alambiquée qui correspond à une union civique pour les couples gay. Pour les militants des unions homosexuelles, il était temps.

L’Italie était le dernier des grands pays européens privé de statut juridique pour les couples de personnes de même sexe et la Cour européenne avait plusieurs fois invité Rome à reconnaître une existence légale aux couples homosexuels.

Pour les adversaires du texte, la formation sociale spécifique conduira à la destruction de la « famille naturelle ». Une thèse reprise par monseigneur Nunzio, le secrétaire de la Conférence épiscopale italienne. « La formation sociale spécifique risque d’être assimilée à la famille. Or, la famille naturelle est la cellule fondamentale de la société, l’école de l’humanité qui forme les personnes et il faut éviter qu’elle soit dévaluée. » Mais plus que le fond, monseigneur Nunzio a dénoncé l’utilisation de l’équivalent italien du 49.3 pour faire passer le texte. « C’est une défaite pour la démocratie et pour la conscience de nombreux Italiens. » Davantage que l’adoption de l’union gay, la conférence épiscopale regrette que le gouvernement ait privé le front du non de l’honneur des armes d’un long débat parlementaire.

Silence papal

Sans renoncer à ses valeurs traditionnelles, l’Église italienne s’est en effet davantage employée à « limiter les dégâts » qu’à s’engager dans une bataille qu’elle savait perdue d’avance. Monseigneur Nunzio s’était lui-même prononcé en faveur d’une réglementation des droits et des devoirs des couples homosexuels. En fixant toutefois des limites.

La conférence épiscopale a jeté toutes ses forces et ses relais politiques pour empêcher la stepchild adoption, l’adoption des enfants du partenaire qui, à ses yeux, était l’antichambre de la légalisation des mères porteuses. Un point sur lequel elle a obtenu gain de cause. Parallèlement, pour ne pas créer en Italie un front radical semblable à celui de la Manif pour tous en France, elle n’a pas officiellement soutenu les cortèges organisés par les partisans du non à l’union gay. Les évêques qui ont défilé dans les rues des grandes villes italiennes l’ont fait à titre individuel. Une stratégie imposée par la « rive droite du Tibre », celle où se trouve le Vatican. En effet, s’il a toujours exalté la famille traditionnelle, le pape François s’est bien gardé de prononcer une seule parole qui puisse alimenter le débat. Un silence interprété, à tort ou à raison, comme une sorte d’accord tacite.

Reste que l’union gay, qui a divisé aussi bien la droite que la gauche, est devenue un marqueur politique. Alfio Marchini, candidat de droite à la mairie de Rome, s’est empressé d’affirmer que, s’il était élu, il ne célébrerait pas les formations sociales spécifiques. Leader populiste de la Ligue du Nord, Matteo Salvini a également invité les maires de son parti à la désobéissance civile. Et à la tête des adversaires de la formation sociale spécifique, Massimo Gandolfi a averti Matteo Renzi : « Tu nous retrouveras pour le référendum sur les réformes institutionnelles au mois d’octobre. » Un référendum que Renzi a transformé en plébiscite en annonçant son abandon de la politique en cas d’échec. La bataille de l’union gay n’est pas terminée.


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