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Daech : peut-on sauver la Libye du chaos ?

lundi 16 mai 2016

La communauté internationale est au chevet du pays touché par des divisions politiques et la progression géographique de l’État islamique.

Source AFP

Si l’État islamique enregistre des défaites en Syrie et perd une partie du territoire qu’il contrôlait, il devient de plus en plus menaçant en Libye. Des ministres des Affaires étrangères européens, des États-Unis et des pays voisins de la Libye se réunissent lundi à Vienne pour discuter du chaos qui règne dans ce pays miné par les divisions politiques et la menace djihadiste. « Nous avons beaucoup de travail devant nous », a brièvement déclaré à la presse John Kerry, qui a préalablement rencontré son homologue jordanien Nasser Judeh, également présent dans la capitale autrichienne.

Cette réunion se déroule à un moment crucial : d’une part, les djihadistes du groupe État islamique (EI) ont récemment étendu leur influence à l’ouest de la ville libyenne de Syrte qu’ils contrôlent depuis juin 2015 ; d’autre part, le gouvernement d’union nationale parrainé par l’ONU peine à asseoir son autorité, plus d’un mois et demi après avoir pris ses fonctions à Tripoli. Le sommet, présidé par le chef de la diplomatie italienne Paolo Gentiloni et le secrétaire d’État américain John Kerry, réunira « les principaux acteurs » régionaux et internationaux dans le but de soutenir « le processus de stabilisation » en Libye, a déclaré Paolo Gentiloni au cours d’une récente visite en Tunisie.

Une menace directe pour l’Europe

Les combattants de l’EI se sont emparés la semaine dernière de la localité d’Abou Grein, à une centaine de kilomètres à l’ouest de Syrte, après une série d’attaques contre les forces militaires du gouvernement d’union. C’est la première fois que le groupe extrémiste réussit à étendre son contrôle à l’ouest de cette ville. Dissensions politiques et vide sécuritaire ont facilité depuis 2014 l’implantation de l’EI en Libye, constituant une menace directe pour ses voisins et l’Europe.

Les ministres des Affaires étrangères discuteront du « soutien international au nouveau gouvernement et se concentreront sur les questions sécuritaires », a déclaré le porte-parole du département d’État John Kirby. Des responsables et des diplomates américains ont affirmé jeudi que les États-Unis étaient prêts à assouplir l’embargo de l’ONU sur les armes imposé au début de la révolte contre le régime de Muammar Kadhafi en 2011 pour aider les nouvelles autorités à lutter contre l’EI.

Entre 3 000 et 5 000 combattants en Libye pour l’EI

La guerre contre les djihadistes est au centre d’une autre bataille entre les forces du gouvernement d’union et celles du gouvernement parallèle basées dans l’est du pays et dirigées par le controversé général Khalifa Haftar. Les deux autorités rivales accélèrent les préparatifs pour déclencher une première l’offensive visant à chasser l’EI de Syrte, au risque d’éloigner la perspective d’une réconciliation et d’une victoire sur les djihadistes. « La course » à la libération de Syrte est « une erreur (...) et nous ne pouvons plus accepter cette division », a affirmé le président de la commission de Défense du Sénat italien Nicola Latorre.

Selon lui, la réunion de Vienne sera l’occasion d’unifier les rangs sur la stratégie à suivre en Libye, voire de poser les bases d’une action commune. « Une opération militaire pour libérer Syrte requiert une plus grande coordination des forces de sécurité pour des raisons à la fois tactiques et politiques », estime pour sa part Claudia Gazzini, analyste à l’International Crisis Group. L’EI compte 3 000 à 5 000 combattants en Libye et tenterait d’y attirer des centaines de recrues étrangères, selon des sources françaises et américaines.

L’opération contre les passeurs est « un échec »

Les participants tenteront par ailleurs d’apporter un soutien supplémentaire au nouvel exécutif libyen dirigé par Fayez al-Sarraj au moment où ce dernier fait face à de nombreuses difficultés, dont celle d’imposer son autorité dans un pays rongé par les divisions. Depuis son arrivée à Tripoli fin mars, le gouvernement Sarraj a toutefois réussi à étendre son pouvoir dans la capitale et à rallier à sa cause les milices armées de l’ouest du pays. Il espère encore gagner l’adhésion du gouvernement parallèle installé dans l’Est qui refuse de céder le pouvoir avant un vote de confiance du Parlement, maintes fois reporté. La communauté internationale mise sur un gouvernement d’union plus fort, seul à même de lutter contre la menace djihadiste et d’endiguer le flux migratoire depuis la Libye, à 300 kilomètres seulement des côtes italiennes.

Un récent rapport parlementaire britannique estime que l’opération navale de l’Union européenne contre les passeurs au large de la Libye est « un échec ». Une fois encore, les regards sont tournés vers Tripoli : « Sans le soutien d’un gouvernement libyen stable, l’opération ne peut pas rassembler les informations nécessaires pour s’attaquer aux trafiquants », note le président de la commission.


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