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JO-2016/Athlétisme

Bolt l’icône, le sauveur, le fardeau

lundi 22 août 2016

L’icône, le sauveur, le fardeau : Usain Bolt, superhéros des temps modernes et nonuple champion olympique de sprint, est tout cela à la fois pour l’athlétisme, sport olympique N.1 qui devra cravacher pour garder son souffle dans le sillage de sa prochaine retraite.

Bolt, c’est l’hyper-athlétisme. Un cadeau tombé du ciel comme la foudre qu’il aime tant faire s’abattre sur les tartans.

Le Jamaïcain n’est pas né d’un coup d’éclair, un soir d’été 2008, aux jeux Olympiques de Pékin. Certes, le sprinteur est devenu superstar cette année-là, triplant l’or et les records du monde sur 100, 200 et 4x100 m.

Mais le prodige était attendu, lui qui faisait déjà parler la foudre dans les catégories jeune.

En 2002, à 15 ans et 332 jours, le natif de la province de Trelawny était devenu le plus jeune champion du monde juniors de l’histoire du 200 m. Un record de précocité qui sera suivi de quelques turbulences, le temps que son corps s’adapte à sa croissance.

Bolt doit composer depuis son plus jeune âge avec un différentiel d’1,4 cm de longueur entre les deux jambes. Rien de bien extraordinaire en soi. Mais une catastrophe pour qui veut faire du sport de haut niveau. Scoliose rédhibitoire, diagnostiquent les médecins. Nul ne sait s’ils ont depuis rendu leurs diplômes.

Bolt l’Eclair est d’abord un hyper-athlète. Et ses simagrées ne doivent pas le faire oublier. Mais la notoriété s’acquiert aussi par la personnalité, et Bolt n’en manque pas.

Bolt se marre

2008, les Jeux de Pékin, ce sont les années Nuggets, dont l’affolant prodige se targue de se nourrir. Un coup de théâtre dans l’univers du sprint, qui évoluait alors autour des axiomes de la boxe : des fauves, des bagarreurs, des durs. Quand on veut sprinter, on doit montrer les muscles.

Bolt, lui, se marre. Il est tout en long, une grande tige d’1,96 m qui a forcément plus de mal à jaillir des blocks que ses rivaux courts sur pattes. Alors, il chante, danse, s’amuse avec le public, renverse la pression pour la mettre sur ses adversaires, dont les épaules paraissent tout à coup bien frêles.

C’est cela, surtout, qui fait de Bolt une icône : un jeune enfant, quelque part dans le monde, qui prend la pose du Jamaïcain après avoir sprinté de toutes ses forces.

Avec le temps, le personnage Bolt a évolué pour atteindre une dimension qui dépasse le principal intéressé.

Qui après Bolt ?

Son aura a pris des allures célestes lors des Mondiaux-2015 de Pékin. Bolt face à l’Américain Justin Gatlin, c’était la lutte du Bien contre le Mal, celle d’un athlète sans tache, jusqu’à preuve du contraire, face à un dopé récidiviste.

A Pékin, le soulagement provoqué par la victoire de +Bolt le Sauveur+, pour un petit centième, avait été ressenti jusque dans les travées du Nid d’Oiseau, où se massait le gratin de la Fédération internationale d’athlétisme. Un sursis avant le dossier russe...

Trop grand, trop populaire, trop +bankable+. Bolt, aussi, est un fardeau pour son sport. Car, comment vivre sans lui ?

Le Jamaïcain, qui aura 30 ans dimanche jour de la clôture des Jeux de Rio, a annoncé qu’il pourrait encore participer aux Mondiaux de 2017, à Londres, pour boucler la boucle en revenant sur la piste de ses exploits, lors de son second triplé olympique de 2012. Mais il n’est plus sûr de recourir un 200 m.

L’athlétisme a d’autres stars, répondent les responsables, qui n’ont pas tort. Mais laquelle peut seulement espérer atteindre la moitié de la notoriété du Jamaïcain ?

Bolt, ce sont des revenus estimés à 20 millions de dollars par an, un ticket d’entrée à 300.000 dollars pour les organisateurs qui le veulent dans leur compétition, un contrat sans équivalent dans son sport estimé à neuf millions de dollars par an avec son équipementier, sûr d’obtenir les retombées adéquates.

Bolt, c’est une enclave richissime dans un sport pauvre. Une bulle spéculative qui éclatera d’un coup au moment de sa retraite : comme gronde le tonnerre lorsque la foudre s’abat.

AUTEUR

AFP


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