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Jovenel Moïse, "l’homme-banane" devenu président d’Haïti

jeudi 5 janvier 2017

Le nouveau président haïtien Jovenel Moïse, élu au terme d’un marathon électoral mouvementé, était inconnu du grand public au printemps 2015 lorsqu’il est apparu sur la scène politique, après une fructueuse carrière d’entrepreneur.

A 48 ans, ce père de deux enfants accède aux plus hautes fonctions dans ce pays extrêmement pauvre des Caraïbes.

Issu d’une famille modeste —un père mécanicien et agriculteur, une mère couturière et commerçante—, ce natif de Trou du Nord, dans le département du Nord-Est, poursuit des études jusqu’à la Faculté des sciences de l’éducation à l’université haïtienne Quisqueya.

Sa famille s’était installée dans la capitale Port-au-Prince en 1974. En 1996, tout jeune marié avec sa camarade de classe Martine, il retourne dans son département natal avec un rêve : refaire de Haïti une contrée "essentiellement agricole" en développant l’arrière-pays.

Selon la biographie disponible sur son site internet, il crée alors grâce à des fonds de capital-investissement un commerce de pièces détachées automobiles, toujours en activité, et une première plantation de bananes de 10 hectares.

Sa dernière bananeraie biologique est la plus vaste du pays (près de 1.000 hectares). D’où son surnom après son entrée en lice dans la course à la présidence : "Nèg Bannan nan", soit "l’homme-banane" en créole.

Sensibilisé à l’importance de l’eau potable, il noue un partenariat avec le spécialiste Culligan et ouvre en 2001 une usine de distribution dans les régions du Nord-Est et du Nord-Ouest. Puis il s’intéresse à l’électrification régionale, créant en 2008 avec des associés une société ad hoc.

En 2012, il lance la première zone franche agricole d’Haïti, et y installe sa société Agritrans pour laquelle il a décroché un prêt participatif de six millions de dollars auprès du gouvernement de son prédécesseur Michel Martelly.

D’après le site de M. Moïse, ce dispositif a permis de développer des dizaines de projets agricoles et "de créer près de 3.000 emplois directs et 10.000 emplois indirects".

- Minorité aisée -

Son entrée fracassante en politique, c’est d’ailleurs à M. Martelly qu’il la doit : le président sortant —qui ne pouvait briguer un second mandat— le choisit au printemps 2015 pour représenter son parti Tet Kale (PHTK), avec l’objectif d’assurer sa succession.

Débute alors une campagne électorale très active, notamment sur les réseaux sociaux encore sous-exploités par la classe politique traditionnelle. Mais il est loin d’avoir le charisme de son mentor.

Il s’adjoint les services de la société espagnole de conseils OstosSola. Elle avait réussi en 2010 à donner à M. Martelly une image respectable —et donc présidentiable— en faisant oublier son sulfureux personnage de Sweet Micky, son nom de scène.

A l’instar de ses nombreux concurrents, M. Moïse n’a pas présenté un programme très développé mais il entend relancer, par l’agriculture, l’économie haïtienne gangrenée par une forte inflation et par la dépréciation galopante de la monnaie nationale.

"Nous allons travailler pour mettre les terres, les rivières, le Soleil avec les citoyens pour que chaque Haïtien puisse mieux vivre", a-t-il répété mardi soir après la confirmation de sa victoire au premier tour de scrutin (55,60% des suffrages).

Il s’exprimait dans un hôtel de luxe de Port-au-Prince, contrastant nettement avec l’image de ruralité et de proximité avec les plus pauvres promue en campagne.

Sa courte carrière politique a été financée par de grands industriels et des membres de l’élite économique, la même minorité aisée qui entourait M. Martelly.

Avec une campagne centrée sur lui, il est impossible d’entrevoir pour l’instant la composition de son futur gouvernement.

"Je prends devant vous l’engagement de travailler avec tous les Haïtiens main dans la main pour mettre le pays sur la route de l’ordre, de la discipline et du progrès", a-t-il affirmé, prévenant que "les jours à venir seront durs".

Saisissant l’occasion de présenter ses voeux de Nouvel An, M. Moïse a souhaité à "tous (ses) compatriotes la santé, la paix, l’ordre, l’ordre, l’ordre", "avec la sécurité pour l’année 2017".

Fin août 2016, il a été accusé de corruption et de blanchiment d’avoirs par l’unité centrale de renseignements financiers, administration haïtienne indépendante.

05/01/2017 09:14:16 - Port-au-Prince (AFP) - © 2017 AFP


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