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L’agenda législatif : entre espoir et appréhensions

jeudi 13 avril 2017

National -
L’agenda législatif 2017, présenté lundi, à la BRH, lors d’une cérémonie à laquelle ont pris part le président de la République, Jovenel Moïse, le Premier ministre Jack Guy Lafontant, les présidents du Sénat et de la Chambre des députés, Youri Latortue et Cholzer Chancy, comporte « des axes thématiques allant du climat des affaires et développement économique à la sécurité nationale ».

Si les drafts ne sont accessibles au public pour alimenter le débat, au bout de l’exercice comptable, on retient que l’agenda compte une cinquantaine de projets et propositions de loi concernant les finances, le commerce, les investissements, l’agriculture, le transport, l’énergie, la gouvernance, la décentralisation, la nationalité, la citoyenneté, l’éducation, la justice, la santé, la lutte contre la corruption, l’identité nationale, le protocole républicain, le notariat, l’arpentage, la gestion de l’eau et des déchets solides, l’armée et la sécurité.

Les projets et propositions de loi, objets de colloques, sont souhaités depuis des années pour pouvoir créer plus d’emplois. L’Association des industries d’Haïti, depuis plusieurs années, a soutenu que le projet de loi sur l’organisation du travail en trois-huit avec des salaires harmonisés devrait permettre aux usines de travailler plus, d’augmenter leurs bons de commandes et leurs employés. Le texte portant réglementation des opérations de crédit-bail, non réalisé en Haïti à cause d’un vide juridique, est susceptible, une fois voté, de permettre aux petites et moyennes entreprises de disposer de matériels de production payé à crédit avant d’en être le propriétaire. Avec moins de contraintes, ceux qui disposent d’un plan d’affaires et d’un peu de ressources financières pour investir et des collatérales pour amortir leur crédit, pourront se lancer dans la production et la fourniture de service. L’accès à ce crédit, en plus des emplois créés, facilitera la formalisation des entreprises qui constitueront une base taxable pour le fisc. Il y a aussi le crédit-bail à usage professionnel. L’agenda législatif a d’autres projets de lois censés améliorer le climat des affaires, dont celui sur la protection des consommateurs et la réforme du droit des sûretés. Le projet de loi portant création du Centre national de la normalisation, de certification et de promotion de qualité. Pour l’agriculture, à côté du projet de loi relatif au contrôle de la qualité des denrées alimentaires, une exigence internationale par rapport à la traçabilité, au respect, entre autres, des normes phytosanitaires, il y a la proposition de loi relative au relèvement agricole, celle portant sur l’encadrement technique et financier des agriculteurs pour la revalorisation de l’agriculture et le statut de l’exploitant agricole. Dans l’agenda législatif, il y a le projet de loi révisant le décret du 1er juin 2005 relatif à l’immatriculation des véhicules et portant création, organisation et fonctionnement de l’autorité nationale du transport routier. En ce qui concerne l’énergie, il y a trois avant-projets de lois régissant le secteur de l’électricité, celui portant organisation et fonctionnement de l’autorité de régulation et celui fixant le régime juridique de l’hydroélectricité à petite échelle. Ces textes, comme les autres, ne sont pas encore accessibles au grand public. Il importe seulement de souligner que l’ex-président Michel Martelly, avant la fin de son mandat, avait pris trois décrets sur le secteur de l’énergie électrique. Dans le chapitre gouvernance, il y a le projet de loi modifiant les articles 42-1, 48,49, 54, 62,62-1,62-2. 65,66 et 69 de la loi du 10 juin 2009 fixant les règles générales relatives aux marchés publics et aux conventions de concession d’ouvrage de service public. La passation des marchés publics est l’activité par excellence où la transparence, le refus du népotisme, du favoritisme et autres crimes et délits économiques et financiers au détriment du bien public sont évalués. Il y a aussi le projet de loi portant organisation et fonctionnement de l’Unité centrale de renseignement financier (UCREF).

L’agenda comporte des propositions de lois fixant les nouvelles règles relatives à l’exécution des travaux de cadastres et établissant une nouvelle administration du cadastre. Ainsi que deux propositions de lois réglementant la profession de notaire et établissant le cadre juridique de l’exercice de cette profession. Il y a une proposition de loi similaire pour la profession d’arpenteur- géomètre. L’agenda comporte la loi portant création, organisation et fonctionnement du Fonds national pour l’éducation, le projet de loi organisant l’agence nationale de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, celui sur l’organisation, le fonctionnement et la modernisation de l’enseignement supérieur et la proposition de loi donnant accès au crédit étudiant.

Des réactions Grégory Brandt, le président de la Chambre de commerce franco-haïtienne, souhaite que tout se fasse pour le mieux et bien.« Il faut que les lois qui sont dans l’agenda soient discutées dans des commissions ouvertes à la société civile. Des parlementaires, nos frères, n’ont aucune notion des domaines sur lesquels ils vont voter des lois. Nous nous plaignons qu’ils ne votaient rien ; j’ai presque peur de ce qu’ils vont voter. Il faut des auditions, des débats et pas de précipitations. Il faut des consultations avec les secteurs concernés. Il faut faire appel aux professionnels et aux personnes des secteurs concernés », a exhorté Grégory Brandt.

« Le forum a travaillé sur un agenda socioéconomique qui sera rendu public bientôt. Cet agenda comporte une majorité de lois qui, nous pensons, devraient être revues et votées qui pourraient permettre un meilleur climat des affaires pour attirer des investissements. Nous avons retrouvé dans l’agenda législatif présenté par le président « une bonne partie des lois » qui devraient être votées. « C’est une très bonne chose qu’il y ait un agenda. Nous espérons que le Parlement pourra rapidement se pencher sur ces lois et qu’elles seront votées dans les meilleurs délais », a confié Bernard Craan, le président du Forum économique du secteur privé, un grand regroupement d’associations patronales. Le notaire Lesly Alphonse dit oui à la réforme des métiers de notaire et d’arpenteur-géomètre.« Je pense que c’est une très bonne chose de réformer.. Ce sont des réformes articulées à partir du CIAT. Je sais que le syndicat des notaires avait participé à l’élaboration de ces lois-là », a indiqué le notaire Lesly Alphonse. « Je ne sais pas si le produit fini sera totalement ce que nous avons souhaité. Mais nous ne pouvons pas dire que nous n’avons pas été consultés. Il faut adapter les lois cadres de ces professions aux réalités actuelles et particulièrement en matière d’arpentage, de notariat parce qu’il y a les nouvelles technologies. Il faut tenir de cette technologie particulièrement celle de l’arpentage », a-t-il souligné. Ici où l’insécurité foncière constitue un frein à l’investissement, Lesly Alphonse veut plus que des lois.« Ce texte peut avoir une utilité mais texte ou pas texte de loi, l’insécurité foncière reste l’insécurité foncière. Il faut des hommes pour faire appliquer la loi. Si ces hommes sont défaillants, cela ne sert à rien d’avoir des lois », a-t-il dit.

« Je suis agréablement surpris de cette démarche du Parlement qui, en publiant l’agenda législatif de la 50e législature, a fait un pas de géant dans la modernité. Je pense important de signaler que bien que l’agenda ne parle que de trois textes de lois déposés devant le Parlement quant au secteur énergie, quatre textes semblent avoir été soumis à l’appréciation de nos législateurs. Le projet de loi manquant serait celui concernant l’organisation et le fonctionnement de l’EdH. D’entrée de jeu, il faut dire que les textes soumis pour réglementer le secteur énergie par l’administration Moïse-Lafontant sont substantiellement différents des décrets adoptés par l’administration Martelly-Paul. Cela dit, j’encourage le Parlement à inviter tous les secteurs de la vie nationale concernés par ces 50 projets de loi à en débattre publiquement avec leurs élus », a conseillé Daniel Rouzier de E-Power, l’un des fournisseurs privé de courant électrique à l’Etat haïtien.

« Dans le secteur énergie en particulier, le pays gagnerait franchement à ce qu’un dialogue national soit engagé pour que nous arrivions collectivement à créer un écosystème énergétique cohérent, durable, respectueux de l’environnement et générateur de richesse et d’emplois. Dans ce contexte, j’encouragerais nos dirigeants à aller un peu plus loin et à ajouter un texte de loi de plus à l’agenda législatif qui serait un projet de traité fiscal équitable entre Haïti et ses pays amis, de sorte que par exemple, des taxes payées en Haïti soient reconnues par les autorités fiscales d’autres pays (et vice versa) de sorte que nous n’ayons pas de double taxation et que nous puissions vraiment être attrayants pour des investissements directs étrangers », a proposé Daniel Rouzier.

Roberson Alphonse

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