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Francophonie

Michaëlle Jean laisse l’OIF avec amertume...

lundi 15 octobre 2018 par Charles

À l’issue du Sommet de l’Organisation internationale de la francophonie vendredi à Erevan, en Arménie, c’est la Rwandaise Louise Mushikiwabo que les membres de l’Organisation ont désigné pour succéder à Michaëlle Jean au grand dam de cette dernière. Visiblement déçue, l’ancienne gouverneure du Canada a dénoncé de « petits arrangements entre États. »

National -

Le vote d’Haïti n’avait pas suffi à Michaëlle Jean pour obtenir un autre mandat de quatre ans à la tête de l’OIF. Abandonnée par Ottawa et Québec, la France et l’Union africaine, la Canadienne d’origine haïtienne n’avait aucune chance face à la ministre des Affaires étrangères du Rwanda, Louise Mushikiwabo. Visiblement frustrée, Madame Jean n’a pas mâché ses mots.
« Sommes-nous prêts à accepter que la « démocratie », les « droits » et les « libertés » soient réduits à de simples mots que l’on vide de leur sens au nom de la real politique, de petits arrangements entre États, ou d’intérêts particuliers alors que cette aspiration légitime à plus de liberté, plus de justice, plus de dignité, plus d’égalité est une aspiration universelle, portée toujours plus énergiquement par les jeunes et par les femmes ? », s’est interrogée Michaëlle Jean comme pour dénoncer les arrangements diplomatiques et géopolitiques entre la France, le Canada et le Rwanda contre elle.
« Sommes-nous prêts à accepter que les organisations internationales soient utilisées à des fins partisanes, alors que nous avons besoin, comme jamais, de nous unir dans un multilateralisme rénové et volontaire pour trouver des réponses et des solutions transnationales à des menaces et des défis désormais transnationaux ? », a-t-elle fulminé dans son discours.
« C’est sous votre impulsion que la francophonie a élargi ses missions, qu’elle s’est affirmée comme une francophonie politique et diplomatique », a-t-elle lancé à l’adresse des 84 chefs d’État et de gouvernements présents au 17e Sommet de l’OIF. « Les valeurs valent pour tous les temps, pour tous les peuples et toutes les nations », mais « nous voyons métastaser le désenchantement de la démocratie », a-t-elle affirmé.
Pour défendre son bilan de quatre ans à la tête de l’OIF, Michaëlle Jean estime que ses réalisations sont aussi celles de tous les membres de la francophonie. « …le bilan de mon mandat, que je vous présenterai, est aussi votre bilan, la somme de tout ce que nous avons porté et construit, ensemble, durant ces quatre années, dans le droit fil de ce que mes illustres prédécesseurs avaient engagé aussi, et ce grâce à la mobilisation constante et à l’expertise de tous les acteurs et de tous les réseaux de la francophonie. »
Pour Michaëlle Jean, « une organisation qui ruse avec les valeurs et les principes est déjà une organisation moribonde. »
Faisant une attaque voilée contre le Rwanda sans le citer, Madame Jean a déclaré : « Nous voyons, tant à l’intérieur des nations qu’entre les nations, se durcir de graves inégalités en matière de droits politiques… » « Alors, au moment où nous marchons vers le cinquantième anniversaire de la francophonie, demandons-nous, ici à Erevan, en toute conscience et en toute responsabilité, de quel côté de l’Histoire nous voulons être ».
Pour sa part, le président du Rwanda, Paul Kagame, a estimé que Michaëlle Jean est amère et frustrée. « Il y a un consensus africain autour de Louise Mushikiwabo, et d’autres pays aussi… voir Michaëlle Jean leur dire que c’est la mauvaise personne qui vient du mauvais pays, c’est triste », a laissé tomber Paul Kagame en entrevue avec La Presse canadienne, vendredi matin.
« Ce n’est pas seulement le fait qu’elle a (tenu ces propos), c’est surtout la façon dont elle l’a fait… on pouvait voir qu’elle est amère, qu’elle est frustrée », selon Kagame. « Ce n’est pas à moi de décrire le caractère d’une personne, de présumer de ce (…) qui l’influence, ce n’est pas de mes affaires (mais) dire aux gens qui ont fait un choix (…) qu’ils ont tort, que ce devrait être elle et personne d’autre… en ce sens, je pense que ça montre le problème », a ajouté le président rwandais.
De son côté, le président français, Emmanuel Macron, a déclaré : « Personne n’a de leçon à donner à qui que ce soit, mais chacun a une exigence contemporaine à porter. »
Malgré les critiques, la Rwandaise de 57 ans, Louise Mushikiwabo dont la famille a été tuée dans le génocide de 1994, a été élue, vendredi, secrétaire générale de l’Organisation internationale de la francophonie.

Robenson Geffrard
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