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Une crise dont on ne tire pas les leçons est une crise inutile

mardi 27 novembre 2018 par Charles

Le mois de novembre avait commencé avec les violences meurtrières contre la population à La Saline et l’incapacité des forces de l’ordre de donner libre accès aux marchandises qui devaient quitter le Port de Port-au-Prince ou y entrer.

Editorial -

Novembre se poursuit avec les violences au poste douanier de Malpasse où des douaniers abandonnés par les forces de l’ordre sont morts dimanche dans l’exercice de leurs fonctions de protéger le pays de l’entrée de marchandises sans contrôle.
Entre ces deux scènes macabres et la perte d’autorité et de moyens de l’État, nos politiciens se sont évertués à nous faire balancer entre le mal et le pire.
Pendant une semaine, les écoles n’ont pas pu fonctionner. Les commerces ont fait peu d’affaires. Les institutions publiques ont fermé leurs portes. Les entreprises ont perdu de l’argent. Tous les Haïtiens ont perdu leur temps. Pendant une semaine.
En une semaine, le président de la République a fait trois discours. Deux furent rendus publics. Le Premier ministre en a fait un que peu de gens ont écouté à cause de l’heure indue de sa diffusion. Les communiqués se sont multipliés. Les rencontres de tout genre aussi.
La semaine écoulée a été aussi celle des journées de grève. Avec ou sans raison, les Port-au-Princiens surtout, les Haïtiens en général, sont restés chez eux. Les manifestations ont occupé le béton le dimanche 18 novembre pour finir en queue de poisson le vendredi suivant.
La Police nationale d’Haïti a connu le meilleur et le pire. Elle a failli se perdre dans une querelle entre la Direction générale et l’Unité de sécurité présidentielle. Elle a failli à sa tâche d’apporter la paix dans les quartiers troublés. Elle n’a pas pu sauver les douaniers en difficulté. La PNH n’a pas su protéger tous les quartiers de la même façon.
Pendant la même semaine, le Parlement n’a pas pu jouer son rôle. Le gouvernement n’a pas pu faire fonctionner l’administration. Les associations de la société civile ont dû choisir leur camp pendant que la peur se répandait sur la ville. Jovenel Moïse a un sursis. Jean Henry Céant a pris du galon. Personne ne peut donner de garantie sur la durée de l’embellie.
Haïti vient de perdre une semaine. Le pays a enfilé une nouvelle crise. Les problèmes restent intacts. La crise pétrolière. La crise budgétaire. Les problèmes de change. L’inefficacité gouvernementale. La faiblesse des institutions. La perte de contrôle du territoire. L’insécurité. Tout ce qui allait mal de puis janvier 2018 continue de se détériorer.
Avant, pendant et après la présente crise, on ne constate toujours pas l’émergence d’une coalition de la société civile pour dire « ça suffit ! ». Il n’existe toujours pas une coalition de l’opposition pour dire « voilà ce que nous proposons ». On doute encore de la solidité de la coordination entre les pouvoirs de l’État pour proposer des solutions à la hauteur de la crise multidimensionnelle nationale.
Nous sommes en crise. Depuis des mois. En crise aiguë depuis début novembre. Alors que l’on croit voir la sortie du tunnel, on craint déjà que nous ne vivions qu’un simple épisode d’une très longue crise dont personne ne veut tirer les leçons de chaque péripétie pour y trouver les vraies solutions à nos problèmes.

Frantz Duval
Auteur


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