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Tract, vote et exactions

vendredi 25 janvier 2019 par Charles

National -

Il circule sur Internet, accompagnés d’une faute d’orthographe à mon prénom, des propos qui me sont prêtés, que je n’ai jamais prononcés. Je ne me savais pas assez grand pour que des gens se cachent derrière mon nom pour parler. Il est bien temps dans ce pays que les gens osent prendre la parole, assumer leur point de vue sur tous les aspects de la vie : la politique, la citoyenneté, les libertés… On ne peut construire du vivant dans le silence ni dans le mensonge. Que les idées s’affrontent pour alimenter la conversation qu’une société appelée à changer doit entretenir avec elle-même !
Si le rôle des acteurs est déterminant en politique, contrairement aux propositions inefficaces dans la pratique d’un structuralisme pour lequel les acteurs de la politique ne seraient que des entités abstraites, comme si l’histoire faisait l’histoire et non les hommes, une autre bêtise consisterait à remplacer l’exigence d’une pensée par la jouissance morbide de vilipender les acteurs. Entre la dénonciation des pratiques et l’injure, il y a un pas que la colère permet de franchir, mais qui ne convient pas forcément à la réflexion. Personnellement, je ne parlerai pas de « Ti Nicolas » dans une prise de position publique. Cela fait vilain. Et cela ressemble au tristement célèbre « Ti Lili » de Michel Martelly. Tout en reconnaissant qu’il n’y a pas de comparaison possible entre une grande dame de l’histoire d’Haïti et l’héritier biologique d’un pouvoir qui a tué et pillé.
Je ne connais pas dans le détail la réalité politique du Venezuela, c’est aux Vénézuéliens de trancher. Concernant le vote d’Haïti, c’est une vérité de La Palice que c‘est un vote d’esclave. Et nul besoin de passer par moi pour le dire. Le paradoxe est qu’il révèle le manque de légitimité de la présidence haïtienne. Je ne suis pas certain qu’une moitié des Haïtiens lutteraient pour maintenir cet exécutif en place, ce qui est le cas pour le pouvoir de Maduro. Et si l’exécutif haïtien se sentait légitime, représentant d’un peuple qui lui accorde sa confiance et son soutien, il aurait voté autrement. Et, venant d’un « élu » haïtien, parler d’illégitimité du processus électoral, c’est comme nommer Ali Baba au poste de chef de la police. Et puis, ainsi finissent les mariages de coquins. L’ambassadeur du Venezuela en Haïti n’avait-il pas dit que l’argent de PetroCaribe avait été correctement géré par l’État haïtien ! Le plus bête dans cette histoire, c’est que le jour où la colère populaire s’exprimera vraiment, les États-Unis lâcheront le président Moïse comme ils ont lâché d’autres avant lui. C’est une trahison pour rien. Quant à parler de « défense de la démocratie », à quelle démocratie ont eu droit les massacrés de La Saline ? De telles vilenies tiennent de la honte et du mensonge. Et quand un mensonge ne tient pas, il ne reste, hélas, que la honte.
Le Premier ministre se débat comme un diable dans un bénitier pour essayer de regagner la confiance. Ses efforts semblent vains. En dehors de son discours individuel, tous les signes vont dans le sens du mépris des discours revendicatifs. L’un de ces signes, dont on ne doit pas minimiser la portée, c’est la programmation de la Télévision nationale d’Haïti : Moïse, Martelly et propagande. Outrance et satisfecit. Il y en a d’autres dont nous sommes victimes au quotidien. Dimanche, embouteillage sur Delmas. Un « chef » ne peut pas attendre. Monsieur accroche l’aile gauche d’un véhicule et ne s’arrête pas. Comme au bon vieux temps : m sou pouvwa m, m fèsa m pito.

Antoine Lyonel Trouillot
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