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Règles de bienséance et de politesse,d’après un traité de 1628

lundi 29 avril 2019 par Charles

(D’après « Le Figaro : supplément littéraire du dimanche », paru en 1894)

Un petit livre fort rare, publié en 1628 à Paris, chez Chappelet, pour le collège des Jésuites de La Flèche, est intitulé Bienséance de la conversation entre les hommes. La rédaction en est amusante par ses tournures de phrases et le charme de ses expressions.
Du reste, ces quelques extraits donneront une idée de ces petits ouvrages qui, fort lus par les générations de l’époque, leur ont inculqué ces principes de politesse et de galanterie qui ont fait le renom du gentilhomme français.
L’ouvrage traite d’abord du maintien dans le monde :
— En bâillant ne faut point hurler, et faut s’abstenir de bâiller même quand tu parles.

— Quand tu te mouches, ne sonne trompette du nez et après ne regarde pas dans ton mouchoir ; garde de te moucher comme les enfants, avec les doigts ou avec la manche.
— Ecoutant une personne parler, ne frétille point en toi-même, ne pouvant tenir en ta peau et faisant l’entendu.
— Ne tue puces où autres bestioles en présence d’autrui ; et si tu vois quelque ordure, comme gros crachat ou semblable chose en terre, mets-y le pied dessus dextrement ; si cela était sur les habits de ton compagnon, ne le montre aux autres, mais ôte-le gentiment si tu peux.
— Ne sois pas hargneux, mais aimable et courtois.
— Ne cours pas les rues et ne marche aussi trop lentement, ni la bouche ouverte ; ne te démène en marchant, ne va dandinant, ne tiens les mains pendantes contre terre, ne te retrousse les chausses à tout propos.
— Ne porte ton manteau sous le bras à la façon des rodomonts ; si tu le poses, plie-le et prends garde où tu le mets.
— Ne te parade regardant tout à l’entour si tu es bien attifé, si tes bas sont bien tirés et habits bien agencés.
— Ne t’enjolive de fleurs sur l’oreille.
— Ne porte ton mouchoir ou à la main, ni à la bouche, ni pendu à la ceinture, ni dessous le bras, ni sur les épaules, ni dessous la robe ; mets-le en lieu qu’on le voie et d’où tu le puisses tirer quand tu en auras à faire.
— Garde-toi de le présenter aux autres, bien que tu ne t’en fusses quasi point servi.
— Ne hausse la voix comme le ferait crieur d’édit.
Ainsi se suivent les conseils pour le maintien dans le monde et pour indiquer la manière de porter convenablement les différentes parties du costume. Viennent alors les bonnes manières à table :
— Etant assis à table, ne te gratte point, et garde-toi tant que tu pourras de cracher, tousser ou te moucher, ou fais-le dextrement sans beaucoup de bruit.
— Ne mange des deux joues et pleine bouche.
— Ne fais la soupe au vin si tu n’es le maître de la maison.
— Ne montre nullement d’avoir grand plaisir à la viande et au vin.

— Prenant du sel, prends garde que le couteau ne soit gras ; quand il le faut nettoyer ou la fourchette ; on le peut faire honnêtement avec un peu de pain ou avec la serviette, mais jamais sur le pain entier.
— Ne flaire les viandes, et si d’aventure tu le fais, ne les remets pas après devant un autre.
— N’engraisse ton pain tout à l’entour avec les doigts, mais, le voulant couper, torche tes mains auparavant.
— C’est une chose fort indécente de s’essuyer le visage et la sueur avec la serviette, ou avec la même se nettoyer le nez, l’assiette ou le plat.
— Ne dois te lécher les doigts, les léchant, avec grand bruit.
— Etant sorti de table, ne porte le cure-dent en bouche ou sur l’oreille beaucoup pis fait celui qui le porte attaché au col. Or, la coutume est qu’on sert les cure-dents sur un beau plat. Finalement, sur un linge de belle et fine toile étendu sur la table, se met le plat-bassin et se donne l’eau à laver ; s’il y a à table une singulière prééminence, on lui donne une serviette particulière, et aux autres la leur, approchant d’eux le bassin en telle façon qu’ils y arrivent deux ou trois ensemble.


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