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Pa gen de jan…

mercredi 5 juin 2019 par Charles

Le rapport de la Cour supérieure des comptes confirme des soupçons. Il condamne le président, non à la prison, mais à la démission. Ce rapport nous condamne à la demander et l’obtenir. Nous, de la société, de tous les secteurs d’activité. Nous n’avons pas le choix. Que le citoyen Jovenel Moïse démissionne pour organiser sa défense. Il a droit à une défense. Il convient qu’il l’organise. Mais il ne peut utiliser l’argent de la République pour l’organiser. C’est déjà très vilain d’entendre un porte-parole de la présidence se transformer en avocat de la défense du président, ou cet autre qui a défendu dans la même langue alambiquée d’autres pouvoirs sur le départ.
Non, jodi a pa gen de jan, se demisyon.
Ce serait un échec national de ne pas la réclamer et l’obtenir. Comment le pésident, qui n’a quasiment plus de pouvoir de convocation, pourrait-il exercer le pouvoir de diriger, de conduire les affaires de la nation ? Comment pourrait-il donner des ordres, représenter l’État, la nation ? La pauvreté suffit, point besoin de l’accompagner du ridicule. Persiter ne fera qu’attiser la colère et rendre la fin plus cahotique, voire plus violente.
Non, jodi a pa gen de jan, se demisyon.
Et quelle chambre de ci ou de ça, quel syndicat de travailleurs, quelle association de « la société civilé », quels responsables de cultes, quel regroupement citoyen dans un quelconque domaine d’activité, pourraient prétendre représenter leurs membres, leurs adeptes, leurs compagnons, après n’avoir pas eu le courage de prendre la parole en leur nom pour demander la démission du président ! Cela ne pourrait que porter le doute sur leur fonctionnement et leurs motivations.
Le glissement est facile, même s’il n’est pas forcément juste, d’assimiler le refus de cette demande de démission à une possible complicité. Mais le peuple a tellement souffert, souffre tant qu’il lui sera difficile de faire dans la nuance.
Après le rapport de la Cour supérieure des comptes, la situation est la suivante : est venu s’ajouter à tous les griefs de la majorité des citoyens un rapport qui établit une preuve. C’est sur le terrain de la justice pénale que le président, qui ne devra plus l’être bientôt, devra organiser sa défense s’il entend contester cette « preuve ».. En simple citoyen. Sinon, ce pays est bon pour la poubelle. Le pays se divise entre la majorité qui a des raisons légitimes, collectives et républicaines, d’exiger la démission du président, et ceux qui, pour des raisons personnelles, ne souhaitent pas qu’il s’en aille.
Non, pa gen de jan.
On ne peut se cacher derrière la peur d’une quelconque instabilité. Quelle stabilité si Jovenel Moïse reste au pouvoir ? Les gens qui crieront au voleur chaque fois qu’il voudra prendre la parole ? Des responsables de l’État qui se cachent de leurs employés et de la population ? L’absence de gouvernement et d’une direction politique des affaires du pays ? La concentration des ressources du pays et le recours à la violence contre la population pour garder le pouvoir ? Le radicalisme auquel une telle forme de résistance, qui impliquera gaspillage et corruption, forcera la population pour obtenir gain de cause ?
Non, pa gen de jan, se demisyon. Si des voix, des asscociations citoyennes et des institutions de divers domaines d’activités ne peuvent se mettre ensemble pour la réclamer et l’obtenir, alors on peut désespérer de ce pays. Ce rapport de la Cour des comptes nous condamne bien plus qu’il ne condamne Jovenel Moïse. C’est pour nous une mise en demeure de reprendre nos destins en main en faisant ce que commande notre dignité de peuple.

Antoine Lyonel Trouillot
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