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Lakou Kajou, un média éducatif pour les enfants haïtiens

jeudi 10 octobre 2019 par Charles

Lakou Kajou, un média éducatif pour les enfants haïtiens est présent à travers cinq chaînes de TV dans cinq départements géographiques d’Haïti (Ouest, Centre, Sud, Sud-Est, Nord-Est). Il est aussi disponible sur Internet. Les vedettes de cette série de dessins animés d’une durée de quinze minutes environ sont : Tilou, Lili, Leyon et Zandolin. Ces enfants qui parlent leur langue maternelle, le créole, sont curieux de tout. Ils abordent avec aisance plusieurs sujets : mathématiques, sciences, géographie, environnement, alphabétisation. Ils passent tout leur temps à résoudre les problèmes qui se posent dans leur quotidien avec intelligence. Derrière Lakou Kajou consacré à nos enfants, toute une équipe d’éducateurs, d’artistes, d’animateurs et de professionnels de l’audiovisuel (Ayitikomik et Muska Group). Des partenaires éducatifs (InnovEd à l’Université Quisqueya) et Blue Butterfly Collaborative, une firme américaine spécialisée dans les médias dédiés aux enfants. Le Nouvelliste a rencontré le responsable de communication de Lakou Kajou, Jaury Jean-Enard. Ce natif du Cap-Haïtien a décroché une maîtrise en communication globale et stratégique à l’Université internationale de la Floride, il a travaillé au Bureau du tourisme de Miami, firme de marketing en Grèce et à New York. À présent, il est corps et âme à Lakou Kajou.

Le Nouvelliste (L.N.) : Présentez-nous Lakou Kajou.
Jaury Jean-Enard : Lakou Kajou est une série de vidéos éducatives, en kreyòl, pour enfants et famille. Les vidéos sont surtout en format de bandes dessinées, mais on les produit en d’autres formats aussi, tels que documentaire et musique vidéo.
L.N. : Quels sont les objectifs visés par Lakou Kajou ?
J. J-E. : Lakou Kajou fournit des médias éducatifs de haute qualité destinés aux enfants haïtiens, particulièrement les enfants défavorisés. Le programme aide les enfants à apprendre l’alphabétisation kreyòl, les mathématiques, les sciences et l’acquisition de compétences sociales tout en leur permettant d’enrichir leurs connaissances d’Haïti et de la culture haïtienne.
L.N. : Pourquoi l’audiovisuel ?
J. J-E. : Les enfants sont attirés par les médias visuels. Ils aiment particulièrement les dessins animés. Les recherches confirment que les enfants apprennent en regardant la télévision et d’autres vidéos. En tant qu’éducateurs, nous voulons être conscients de ce qu’ils apprennent tout en leur offrant une expérience appréciable. La création de Lakou Kajou nécessite beaucoup de planification afin de s’assurer qu’elle est amusante et agréable tout en offrant une riche expérience d’apprentissage.
Lakou Kajou ne se limite pas uniquement aux expériences audiovisuelles. Nous produisons également du matériel éducatif sous forme d’imprimé et sous d’autres formes disponibles pour les écoles et les organismes communautaires. Nous travaillons pour diffuser notre contenu par le biais d’autres médias ( la radio et les applications numériques) prochainement.
L.N. : Combien de dessins animés Lakou Kajou a-t-il déjà réalisés ?
J. J-E. : Actuellement, nous avons neuf épisodes de Lakou Kajou sur les thèmes suivants : processus (pour accomplir une tâche quelconque), géographie (d’Haïti), rythme (musique et sons), croissance (d’une plante), eau, outils, exercice physique, patrimoine et transport.
L.N. : Qu’est-ce que vous mettez surtout en valeur dans ces dessins animés ?
J. J-E. : Lakou Kajou est une occasion pour les enfants de voir des personnages/caractères haïtiens qui leur sont familiers et vraisemblables. Une grande partie des médias auxquels les enfants sont exposés proviennent d’autres pays. Lakou Kajou offre aux enfants haïtiens une expérience médiatique spécialement conçue pour eux.
L.N. : Les dessins animés ont-ils des personnages emblématiques qui portent les messages ?
J. J-E. L’élément principal de chaque épisode est une histoire animée mettant en vedette Lili & Tilou, les personnages jumeaux (un garçon et une fille) de sept ans de Lakou Kajou. Ils sont conçus, avec d’autres personnages, afin de promouvoir des objectifs importants tels que la gentillesse, l’empathie, l’équité entre les sexes et l’amour de l’étude. Zandoline, l’amie de Lili & Tilou, est un mentor adulte qui guide les enfants dans la résolution de problèmes et la prise de bonnes décisions. Leyon, qui est le livre, met en évidence les moyens par lesquels les enfants peuvent poser des questions et y trouver des réponses. Nous sommes également ravis de présenter très prochainement de nouveaux personnages. Nous aurons à vous fournir plus d’informations ultérieurement à ce sujet.
Les épisodes incluent également d’autres segments pour compléter notre programme. Des formats films-documentaires documentent la vie réelle des enfants vivant en Haïti. Nous avons par exemple un film sur un jeune garçon dont le père est guide à la Citadelle. Ce segment enseigne non seulement la beauté et l’histoire de la Citadelle, mais il incite également à observer différentes formes géométriques - carrés, triangles, cercles, etc. - dans leur environnement lors de leur visite du lieu historique. Dans un autre film en format documentaire tiré d’un autre épisode, une jeune fille imagine différentes professions qu’elle pourrait exercer : ingénieur, mécanicien automobile, boulanger, musicien…
Chaque épisode comprend également un clip vidéo (musique vidéo) sur le thème de la journée : bonnes habitudes/mœurs, énergie, transport. Nous avons la chance de travailler avec le pop-chanteur Joel Pierrevil du groupe Akoustik, dont ses chansons originales donnent une énergie amusante et gaie aux clips.
Les épisodes comprennent également de courts segments qui enseignent aux enfants les chiffres et la phonétique des lettres.
L.N. : Qu’est-ce qui caractérise surtout ces personnages ?
J. J-E. : La réponse à cette question est intimement liée à la question précédente. Donc, je tiens à souligner que Lili & Tilou, les jumeaux protagonistes, symbolisent l’égalité des sexes. Ils sont conçus, avec d’autres personnages, afin de promouvoir des objectifs importants tels que la gentillesse, l’empathie. Zandoline, l’amie de Lili & Tilou, représente un mentor adulte qui guide les enfants dans la résolution de problèmes et la prise de bonnes décisions. Leyon, qui est le livre, met en évidence les moyens par lesquels les enfants peuvent poser des questions et y trouver des réponses.
L.N. : Lakou Kajou est-ce une grande équipe. Avec qui travaillez-vous surtout ?
J. J-E. : C’est une petite équipe, mais une équipe très dévouée au projet. Je travaille avec la responsable de la partie éducative et linguistique, Josiane Hudicourt-Barnes et la responsable des partenaires, Jovanie Pade. Je travaille surtout avec le chef du projet, à qui je tiens à réserver une place spéciale pour son dévouement envers le projet, Mme Alexandrine Benjamin. Elle travaille jour et nuit avec tous les partenaires de production afin d’assurer la qualité et l’exactitude des mises en scène. De temps à autre, des séances de brainstorming sont réalisées avec des professeurs, éducateurs, chercheurs pour déterminer les thèmes des épisodes.
L.N. : Ce travail audiovisuel nécessite une écriture. Avec quels écrivains travaillez-vous. Disons plutôt qui sont-ils ces écrivains avec qui Lakou kajou fait la route ?
J. J-E. : Actuellement, nous travaillons avec Keziah Jean, mais, au début, nous avons travaillé avec Gilbert Mirambeau et Jasmuel André.
L.N. : Depuis combien d’années ces programmes sont-ils diffusés dans les médias traditionnels et en ligne ?
J. J-E. : Trois ans.
L.N. : Dans combien de chaînes de T.V le public peut-il visionner ces programmes ?
J. J-E. : Cinq chaînes, couvrant cinq département chacune (Ouest, Centre, Sud, Sud-Est, Nord-Est).
LN : Quel est votre public cible ?
J. J-E. : Les enfants âgés d’environ 3-8 ans sont notre priorité. Un public secondaire serait les professeurs, les éducateurs et les parents.
L.N. : Le feedback du public ?
J. J-E. : Le feedback est inimaginable et encourageant. Au début du mois d’août, nous avons participé au camp Soleil d’été. Quand je suis arrivé à Télé Soleil, je portais un t-shirt Lakou Kajou, les enfants en chœur m’appelaient « Lakou Kajou. » Je leur ai demandé ce qu’ils savaient de Lakou Kajou. Ils ont commencé à réciter l’horaire télévisé de Lakou Kajou. L’un d’eux a déclaré : « Si ma petite sœur se réveille après la diffusion de la série, elle pleure. » Franchement, les enfants adorent les épisodes ; ils s’y accrochent. Chaque fois que nous leur montrons un segment, ils veulent en voir davantage.
L.N. : Lakou Kajou prend-il part aux événements culturels ?
J. J-E. : Bien sûr. Je tiens à vous rappeler qu’on s’est rencontré pour la première fois lors du programme Marathon de Lecture. L’équipe de Marathon de Lecture avait dédié tout un weekend aux activités des enfants et nous y avons participé. Au mois de mai, nous avons participé à la foire du livre des enfants au Collège Dominique Savio de Don Bosco à Pétion-Ville. Nous comptons participer à trois autres événements culturels avant la fin de l’année. Pas mal de nos épisodes visent la culture haïtienne tels que les jeux de cerfs-volants, « marelle » et nos patrimoines.
L.N. : Travaillez-vous avec des organisations ? Comment cela se fait-il ?
J. J-E. : Oui, oui. Nous travaillons avec une centaine d’écoles et de partenaires : Hope for Haiti, CARE Haiti, Mobi Ciné, Konbit Solèy Leve, etc.). Chacun de mes collègues est responsable d’un aspect du projet. Mme Josiane Hudicourt-Barnes est responsable de la partie éducative et linguistique de Lakou Kajou. Mme Jovanie Pade est responsable des partenaires. Et Mme Alexandrine s’occupe de la réalisation des vidéos, surtout au niveau de la production.
L.N. : Ce projet sillonne-t-il le pays ?
J. J-E. : Oui, Lakou Kajou est disponible et présent dans une centaine d’écoles dans neuf départements du pays. Par contre, nous espérons avoir Lakou Kajou sur plusieurs chaînes télévisées. Bientôt, nous comptons diffuser les épisodes une fois par mois dans chaque département pour faciliter l’accès à tous et donner une meilleure visibilité à Lakou Kajou.
Quels sont les institutions qui travaillent avec ce projet ?
J.J-E. : Nous travaillons avec Ayitikomik et Muska Group comme partenaires de production ; avec InnovEd sis à l’Université Quisqueya comme partenaire éducatif ; et avec Blue Butterfly Collaborative, une firme américaine spécialisée dans les médias des enfants.
LN : Quels sont les partenaires financiers de ce projet ?
J. J-E. : La FOKAL et W.K. Kellogg Foundation.
L.N. : Y a-t-il une philosophie derrière Lakou Kajou ?
J. J-E. : Lakou Kajou utilise le pouvoir des médias pour dialoguer avec les enfants tout en leur enseignant les compétences essentielles dont ils auront besoin pour devenir des adultes performants. Quand les images sont présentées à l’écran et les histoires racontées sont compréhensibles et pertinentes pour la vie des enfants, ils découvriront que l’apprentissage est amusant ! Les objectifs pédagogiques, la qualité artistique, la production et d’autres éléments de Lakou Kajou ont été conçus par une équipe haïtienne, avec le soutien d’éducateurs en média expérimentés ayant travaillé dans le monde entier à des programmes éducatifs de renommée internationale.
Propos recueillis par Claude Bernard Sérant.

Claude Bernard Sérant


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