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Jovenel Moïse commémore Vertières à Port-au-Prince et appelle à l’unité

mercredi 20 novembre 2019 par Charles

Pour la deuxième année consécutive, le président Jovenel Moïse, en butte à une contestation populaire, ne s’est pas rendu au Cap-Haïtien pour commémorer la bataille de l’indépendance. Accompagné notamment de son Premier ministre démissionnaire, du cabinet ministériel et des grands commis de l’État, Jovenel Moïse a fait une offrande florale au Musée du panthéon national (Mupanah). Après avoir déposé la gerbe de fleurs, le président a souligné la nécessité de mettre fin au « système d’exploitation » en Haïti. « Nous sommes en train de lutter de la même manière que les héros de l’indépendance ont remporté la bataille de Vertières. L’une des plus grandes batailles que l’humanité n’a jamais connue. Les soldats, les va-nu-pieds, les esclaves se sont révoltés et ont pris leur indépendance. Après 216 ans, je crois que la bataille pour l’indépendance économique doit commencer, ce afin d’en finir avec le système « peze souse » (système d’exploitation) », a-t-il déclaré.
Après le Mupanah, une cérémonie suivie d’une parade militaire a été organisée dans la cour du palais national. Comme c’était le cas au Mupanah, les présidents du Sénat et de la Chambre des députés, Carl Murat Cantave et Gary Bodeau, ainsi que le président de la Cour de cassation, Me René Sylvestre, ont brillé par leur absence. C’est le cas également pour les représentants des pays amis d’Haïti, hormis l’ambassadeur de Taïwan, Bang-zyh Liu, et un attaché militaire de l’ambassade du Mexique.
Au palais national, Jovenel Moïse a appelé à l’unité pour sortir le pays des inégalités sociales. « L’armée indigène et nos généraux ont réussi cet exploit grâce à l’unité, la solidarité, la volonté, la détermination et le courage. (...) Le pays est plus que divisé. Le pays est déchiré. En ce 18 novembre, j’appelle à l’unité. L’unité entre les pauvres et les riches, entre les gens des quartiers défavorisés et ceux des quartiers huppés, entre les Haïtiens de toutes les couleurs, entre les campagnards et les citadins. Si nous étions unis, il n’y aurait pas ce système d’exploitation et d’inégalité qui maintient la majorité dans la pauvreté, dans la misère et l’insécurité alors qu’une minorité profite des richesses du pays », estime-t-il.
Le chef de l’État a réitéré son appel au dialogue inclusif afin de doter le pays d’un gouvernement d’union nationale. « Nous commérons ce 18 novembre dans une conjoncture très difficile. Les forces sociales, économiques et politiques, nous avons l’obligation de nous mettre ensemble afin de convertir cette crise que traverse le pays en une grande opportunité afin de placer le pays sur la route du changement. Nous sommes d’accord sur les problèmes, mais nous avons des divergences sur la manière de les résoudre. Cette solution ne passera que par le dialogue, ce afin de soulager la souffrance du peuple qui réclame l’indépendance économique depuis des lustres », croit-il.
Après avoir appelé à l’unité et au dialogue, Jovenel Moïse n’a pas tardé à s’en prendre au « système ». Il a souligné qu’il ne saurait être contre les intérêts de la majorité. « Je ne serais jamais le gardien, le maître ou l’héritier de ce système d’exploitation. Vous m’aviez voté pour que je lutte en votre faveur. Je profite de cette date historique pour vous souligner que la bataille n’est pas facile. Cependant, la victoire n’est pas impossible. Il faut beaucoup de courage, de sagesse et de détermination pour changer ce système d’exploitation. Sans vous à mes côtés, je ne pourrai pas changer ce système. Si vous estimez que j’ai commencé cette bataille trop tard, vous avez raison. Je m’en excuse. Vous m’aviez élu non pour fuir mes obligations, mais pour affronter tout ce qui vous maintient dans la précarité. À l’instar de Capois-la-Mort (ndlr : de son vrai nom François Capois, héros de la guerre de l’indépendance), je dis en avant à tous ceux qui veulent combattre le système », appelle le président de la République.
Le chef de l’État a plus loin appelé à la compréhension des principales victimes de la crise. « Mettez-vous à la place des parents qui se sont sacrifiés pour payer l’écolage de leurs enfants alors que ces derniers ne peuvent pas se rendre à l’école. Mettez-vous à la place des commerçants du marché Croix-des-Bossales qui vivent au jour le jour. Mettez-vous à la place des chauffeurs des transports en commun, des commerçants dont les étalages ont été brûlés, des policiers régulièrement attaqués par des bandits armés, de ceux qui perdent leurs entreprises, des paysans qui ne peuvent pas vendre leurs récoltes [...] Je vous demande de réfléchir et de demander quelle direction on veut prendre avec le pays », a-t-il lancé entre autres à la jeunesse et à la société civile.
Sur l’insécurité et la crise humanitaire, Jovenel Moïse a assuré que le gouvernement (démissionnaire) est en train de travailler afin d’apporter des solutions. « Nous avons pris des mesures pour aider ceux qui sont dans le besoin. L’État aidera les producteurs agricoles, notamment les producteurs de riz, afin qu’ils puissent écouler une bonne partie de leur stock qu’ils ne peuvent pas vendre. J’en profite pour remercier les amis de la communauté internationale qui viennent en aide à nos frères et sœurs qui sont en train de souffrir », a-t-il fait remarquer.
Le Président a assuré que la justice et la police sont déterminées à freiner la machine infernale de l’insécurité. « Nous sommes en train de travailler afin que la paix et la sérénité reviennent dans les familles. Depuis 2 ans et 9 mois, j’œuvre afin que l’État que je dirige ne réponde pas à la violence politique par la violence. Car cela peut entraîner plus de violence et de chaos. La violence et la persécution politique ne font pas partie du vocabulaire de cette administration », a-t-il assuré, saluant le professionnalisme de la PNH.
Jovenel Moïse, dont certains proches sont accusés dans le massacre de La Saline, a évoqué cette tuerie perpétrée il y a 1 an. « Le rôle de l’État est de faire respecter le droit de tout le monde sans distinction. J’en profite pour demander au ministre de la Justice d’informer la nation sur l’état d’avancement du dossier de La Saline qui est aux mains de la justice depuis plusieurs mois », a-t-il exigé. Cette déclaration sur La Saline intervient quelques jours après la note de l’ambassade américaine exhortant les autorités haïtiennes à mener des investigations sur le dossier afin que les coupables soient traduits en justice.

Jean Daniel Sénat
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