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FMP-UEH Accréditation des facultés de médecine : Haïti passera sa première évaluation cette année

lundi 3 février 2020 par Charles

Deux ans après le lancement du processus d’accréditation, Haïti se prépare à recevoir sa première évaluation en vue d’obtenir cette prestigieuse reconnaissance internationale quasiment obligatoire pour les facultés de médecine.
Publié le 2020-01-31 | Le Nouvelliste

Le XXIe siècle est marqué par le développement du concept de santé globale. N’importe qui à l’ère de la mondialisation peut se retrouver dans l’obligation de se faire soigner dans un pays étranger. La mobilité des professionnels de santé d’un pays à un autre a considérablement crû à cause de l’ampleur de la migration dans les pays à faible revenu.
La commission qui s’occupe des médecins gradués à l’étranger qui souhaitent intégrer le système américain pense que de même qu’il faut demander aux voyageurs américains d’éviter les pays qui sont en proie à l’insécurité, il va falloir leur demander d’éviter aussi les pays qui n’ont pas une formation médicale standardisée. À plus forte raison, croit cette commission, il ne faut plus accepter les médecins qui viennent d’un pays où la formation médicale ne répond pas aux normes.
Parce que cette mesure concerne par extension le Canada, la nouvelle qui annonçait 2023 comme la date butoir pour que les facultés de médecine du monde entier se mettent au diapason, avait fait beaucoup parler en Haïti et dans la diaspora.
Plus de la moitié de nos étudiants vont en stage dans ces pays, plus de la moitié de nos spécialistes sont formés dans ces pays et plus de la moitié de la diaspora médicale pratique également dans ces pays. Tout compte fait, la non-accréditation est quasiment une fatalité pour le pays.
Il y a deux ans, l’Agence universitaire de la francophonie (AUF), l’université Laval et l’université de Montréal ont décidé d’investir techniquement et financièrement dans un projet pilote pour aider la faculté de médecine de l’UEH à obtenir son accréditation de l’organisme accréditeur des États-Unis (ECFMG).
En février, le projet avait débuté en grande pompe avec un comité prolifique de haut niveau et dévoué à cette noble cause. Tout allait comme sur des roulettes avant que les travaux ne viennent sur les troubles socio-politiques, dont le fameux « peyi lòk ». Les experts canadiens et ceux de l’université de Tunis qui accompagnaient le comité de pilotage ne pouvaient pas venir à tout moment à cause de l’interdiction de voyage et l’interruption des vols du Canada vers Haïti.
En utilisant la technologie à bon escient, les autorités académiques n’ont pas cessé de travailler en dépit des moments difficiles. Deux ans plus tard, dans une entrevue exclusive accordée au quotidien Le Nouvelliste, le Dr Jude Milcé, vice-doyen aux affaires académiques, estime que la faculté de médecine de l’UEH est prête à recevoir une première évaluation cette année.
Une première évaluation : à quoi peut-on s’attendre ?
« La première chose qui avait empêché le corps décanal d’avancer est le fait que nous sommes une faculté de médecine francophone et que nous devons être évalués par l’ECFMG qui est un organisme anglophone », souligne d’emblée le Dr Jude Milcé avant de se réjouir de ce que la Conférence internationale des doyens des facultés de médecine d’expression française (CIDMEF) ait accepté de jouer un rôle intermédiaire pour faciliter les travaux.
La CIDMEF, ayant obtenu sa reconnaissance internationale comme organisme accréditeur, a décidé d’aider Haïti dans les démarches devant aboutir à une faculté réformée pour répondre aux normes internationales.
Un deuxième aspect très important qui manque aux facultés de médecine en Haïti concernant est l’espace approprié pour que l’étudiant puisse acquérir toutes les compétences nécessaires à sa formation de médecin.
Selon le Dr Jude Milcé, des efforts considérables ont été faits à ce niveau et d’autres sont en cours.
« Pour cette nouvelle année académique, la bibliothèque de la faculté de médecine de l’UEH sera ouverte 7 jours sur 7 sans interruption. Il y a désormais un laboratoire informatique adapté aux recherches médicales avec une bibliothèque virtuelle où l’étudiant pourra télécharger les articles et les documents nécessaires à sa formation. Dans la formation, il y aura une réduction des cours magistraux et une augmentation des heures de recherche. Dès la première année, l’étudiant en médecine bénéficiera d’une immersion clinique pour être en contact le plus tôt possible avec les malades sous la supervision des instructeurs cliniques », précise le Dr Milcé, qui promet que tout sera prêt pour cette nouvelle année académique.
L’accréditation compte trois étapes selon les normes internationales. Il faut un organisme accréditeur, il faut une évaluation interne puis une évaluation externe.
La faculté de médecine de l’UEH, a fait savoir le Dr Milcé, va boucler les deux premières étapes au mois de février 2020. « L’évaluation interne doit tenir compte de la recherche, la formation, la responsabilité sociale et la bonne gouvernance. La faculté de médecine de l’UEH a opéré des réformes sur tous ces points. Nous avons un cursus qui sera appliqué cette année en respectant toutes les normes, les règlements de la faculté ont été revus et corrigés, la façon de nommer les professeurs et chefs de département est désormais plus démocratique, on a un document détaillé afin de prendre plus de responsabilité dans la société. 40% de notre budget sera dépensé pour les étudiants, il y aura un conseil de la faculté avec la participation de toutes les couches constitutives de la faculté », énumère, l’air confiant, le Dr Jude Milcé, spécialiste en chirurgie cardiovasculaire.
Parallèlement à tous ces travaux, des professeurs ont suivi des formations à l’étranger comme guides ou leaders pédagogiques. Ces professeurs doivent donner beaucoup plus d’habileté et de compétences aux étudiants.
Une fois terminé en février avec cette évaluation interne, la faculté de médecine de l’UEH fera appel à la CIDMEF pour la première évaluation non pénalisante en octobre 2020. Si tout est normal après recommandation, il y aura une évaluation pénalisante. Si l’on échoue, on tombera sous les sanctions internationales, si on passe cette deuxième évaluation externe, ce sera une victoire pour le pays.
Sans vouloir faire de promesses, le Dr Jude Milcé pense que tout a été fait du côté de la faculté ainsi que de ses partenaires pour que ces deux étapes soient une simple formalité tout en rappelant au passage que la faculté va exiger beaucoup plus des nouveaux admis en termes d’intelligence, de discipline et de disponibilité.
À travers la conférence des doyens des facultés de médecine reconnues, l’accréditation de la faculté de médecine de l’UEH servira de projet pilote pour aider les autres facultés de médecine reconnues à aller bien et vite. Certaines facultés de médecine privées ont déjà lancé le processus d’accréditation et elles travaillent aussi de concert avec la CIDMEF.
À une époque où Haïti est mal classée dans presque tout, le pays doit se mobiliser autour des différentes facultés afin de les aider à être prêtes avant l’échéance de 2023.

Claudy Junior Pierre
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