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George Floyd : l’autopsie officielle conclut à une mort « par homicide » à cause de la « pression exercée sur son cou »

lundi 1er juin 2020 par Charles

Le médecin légiste officiel a rendu, ce lundi soir, ses conclusions, une semaine après la mort de cet homme noir, à la suite d’une violente interpellation par un policier, à Minneapolis. Des manifestations et émeutes ont eu lieu un peu partout aux Etats-Unis.
Le Monde avec AFP Publié hier à 06h17, mis à jour à 00h54

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Hommage à George Floyd, à Minneapolis (Minnesota), le 1er juin. CARLOS BARRIA / REUTERS
George Floyd est mort « par homicide » à cause de la « pression exercée sur son cou » par la police, et était drogué au fentanyl, un puissant opiacé, a estimé, lundi 1er juin, le médecin légiste officiel en charge de son autopsie.
Cet Afro-Américain de 46 ans a fait un « arrêt cardiaque et pulmonaire » à cause de son immobilisation par les forces de l’ordre, a détaillé le médecin légiste du comté de Hennepin dans un communiqué. Dans son rapport, il liste « d’autres paramètres importants : artériosclérose et hypertension artérielle ; intoxication au fentanyl ; usage récent d’amphétamines. » Jusque-là, le médecin légiste officiel assurait ne pas avoir de « preuves physiques soutenant un diagnostic d’asphyxie traumatique ou d’étranglement ».

« L’effet combiné de l’arrestation et de l’immobilisation de M. Floyd par la police, ses antécédents médicaux et la présence potentielle de substances psychoactives dans son corps ont probablement contribué à sa mort », avait-il déclaré, dans un rapport préliminaire.
George Floyd, que la police soupçonnait d’avoir voulu écouler un faux billet de 20 dollars, est mort lors de son arrestation à Minneapolis, dans le nord des Etats-Unis, il y a une semaine. Selon une vidéo du drame, qui a depuis fait le tour du monde, un agent l’a maintenu plaqué au sol, en s’agenouillant sur son cou pendant près de neuf minutes.
L’avocat engagé par la famille de George Floyd a rendu public, un peu plus tôt ce lundi, les résultats d’une autopsie indépendante qui concluait également à une asphyxie, en raison d’une forte pression au cou et au dos, c’est-à-dire les endroits sur lesquels le policier incriminé maintenait son genou.
Cette pression prolongée « sur son cou a coupé le flot sanguin allant vers son cerveau et la pression sur son dos a entravé sa capacité à gonfler ses poumons », a ainsi indiqué l’avocat, Ben Crump.
Couvre-feux et pillages dans plusieurs villes du pays
New York a finalement rejoint d’autres grandes villes américaines, et décidé, lundi, d’imposer un couvre-feu à partir de 23 heures et jusqu’à 5 heures, après plusieurs jours de manifestations contre les violences policières et le racisme auxquelles des milliers de personnes ont pris part à travers le pays. La colère qui a explosé à Minneapolis, dans le Minnesota, après le décès lundi dernier de George Floyd s’est rapidement propagée à tout le pays et jusqu’à la capitale culturelle des Etats-Unis.
Le gouverneur de l’Etat de New York, Andrew Cuomo, a annoncé par ailleurs que les effectifs de police allaient être doublés et portés à 8 000 lundi soir, tout en ajoutant que rien n’avait encore été décidé pour les jours suivants.
L’annonce survient alors que démarraient de nouvelles manifestations, avec déjà environ mille personnes réunies à Times Square lundi en milieu d’après-midi, et des rassemblements prévus plus tard à Brooklyn et Queens. Certains manifestants ont déclaré immédiatement leur intention de ne pas respecter le couvre-feu. Plus tôt, c’est Washington qui avait étendu son couvre-feu pour deux jours pour empêcher de nouvelles violences lors des protestations.

Carte des manifestations aux Etats-Unis après la mort de George Floyd.
Tout en disant comprendre la colère des manifestants, nombre de responsables locaux les ont exhortés à la retenue, tandis que le président des Etats-Unis, Donald Trump, confronté aux désordres civils les plus graves de son mandat, fustigeait les « anarchistes ». Il a par ailleurs qualifié, lundi, les gouverneurs des Etats de « faibles » face aux manifestations, les appelant à être « beaucoup plus durs ». Dans le même temps, l’usage de la force sur les manifestants a donné lieu à des incidents et plusieurs policiers ont été suspendus, notamment à Atlanta, en Géorgie, et en Floride, où un policier qui avait poussé une femme noire agenouillée lors d’un rassemblement pacifique a été suspendu de ses fonctions, lundi.
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La garde nationale appelée en renfort

Des membres de la garde nationale protègent l’hôtel de ville de Los Angeles, le 31 mai. Ringo H.W. Chiu / AP
Des milliers de soldats de la garde nationale ont été déployés dans quinze Etats et à Washington (District de Columbia). Après Houston (Texas) et Los Angeles (Californie), un couvre-feu nocturne a aussi été décrété dans la capitale fédérale, où des centaines de personnes ont manifesté dimanche soir, sous très haute surveillance policière, près de la Maison Blanche, plongée dans le noir.

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Selon le New York Times, M. Trump a été mené la veille par le secret service, lors d’une manifestation similaire devant sa résidence, à l’abri dans un bunker souterrain.
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A Saint Paul (Minnesota), la ville qui jouxte Minneapolis, épicentre du mouvement, des milliers de personnes ont manifesté pour que tous les policiers impliqués dans la mort de George Floyd rendent des comptes. Pour l’instant, seul l’un d’eux, Derek Chauvin, a été arrêté et inculpé d’homicide involontaire. C’est lui que l’on voit, dans une vidéo devenue virale, maintenir son genou sur le cou de George Floyd pendant de longues minutes, alors que ce dernier se plaint de ne pas pouvoir respirer. Il doit comparaître lundi devant un tribunal.
Des pillages et des débordements
Des manifestations étaient aussi en cours à Miami (Floride) et New York notamment. Des slogans comme « Black lives matter » (« la vie des Noirs compte ») ou « Je ne peux pas respirer » (les derniers mots prononcés par George Floyd) étaient scandés par la foule.
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Joe Biden, l’ancien vice-président de Barack Obama et candidat à l’élection présidentielle de novembre, a dénoncé lundi la présidence de Donald Trump et les problèmes de racisme et d’inégalités qui rongent le pays, lors d’une rencontre avec des responsables religieux et politiques noirs dans une église de Wilmington, dans le Delaware.
Le déploiement des forces de l’ordre n’a pas empêché certains débordements, et des pilleurs se sont attaqués dimanche à des magasins d’un centre commercial huppé à Santa Monica, en Californie. A Philadelphie, sur la Côte est, plus de cinquante personnes ont été arrêtées pour pillage depuis samedi, selon la police.
Vol de marchandises dans une boutique de Santa Monica (Californie), le 31 mai. AGUSTIN PAULLIER / AFP
Les violences avaient gagné samedi soir de nombreuses villes, dont New York, Philadelphie (Pennsylvanie), Dallas (Texas), Las Vegas (Nevada), Seattle (Washington), Des Moines (Iowa), Memphis (Tennessee), Los Angeles (Californie), Atlanta (Georgie), Miami (Floride), Portland (Oregon), Chicago (Illinois) ou encore Washington. Un homme a été tué lundi matin à Louisville, dans le Kentucky, victime d’un tir de la police, qui affirme avoir elle-même essuyé des tirs auparavant.
Au moins 4 400 personnes ont été arrêtées pour des délits tels que le vol, le blocage d’autoroutes et le non-respect du couvre-feu, selon un décompte établi par l’agence Associated Press.
Donald Trump attise les flammes et fustige les « gauchistes radicaux »
M. Trump a promis de « stopper la violence collective » et a dénoncé les agissements de « gauchistes radicaux », notamment la mouvance radicale « antifa » (antifasciste), qu’il a annoncé vouloir désigner comme une organisation terroriste. Dimanche, il a notamment retweeté le message d’un animateur de radio conservateur affirmant : « Cela ne s’arrêtera que si les gens bien se montrent prêts à faire usage d’une force écrasante contre les méchants. »
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La maire d’Atlanta, Keisha Lance Bottoms, avait plus tôt comparé la situation aux affrontements de Charlottesville (Virginie), où une voiture avait percuté un groupe de militants antiracistes venus tenir tête à des suprémacistes blancs, faisant un mort et des dizaines de blessés en août 2017. M. Trump avait alors jugé qu’il y avait « des gens très bien » des deux côtés. « Le président Trump aggrave les choses », a déclaré la maire sur CBS. « Sa rhétorique ne fait qu’enflammer les choses et il devrait juste se taire. »
Des manifestations à travers le monde
Des milliers de personnes ont défilé lundi contre le racisme en Nouvelle-Zélande, où environ 2 000 personnes se sont rassemblées devant le consulat des Etats-Unis à Auckland, la capitale. Un demi-millier de personnes se sont aussi retrouvées à Christchurch, sur l’île du Sud, et autant lors d’une veillée devant le Parlement à Wellington, où ont été présentés les noms de centaines d’Américains morts du fait du racisme.

Aux cris de « Black lives matter », ou le poing tendu vers le ciel, des milliers de personnes ont également manifesté dimanche à Montréal (Canada). Alors que le rassemblement lui-même s’est déroulé dans le calme, des échauffourées ont éclaté en début de soirée. « Je vous entends, j’entends l’inquiétude, votre colère, votre peine », a déclaré le premier ministre, Justin Trudeau, dans un discours adressé aux jeunes Canadiens noirs. « Le racisme envers les Noirs, la discrimination systémique, l’injustice, ça existe aussi chez nous », a-t-il poursuivi.

Manifestation devant l’ambassade américaine, le 31 mai à Londres. DANIEL LEAL-OLIVAS / AFP
Plus tôt dans le week-end, des rassemblements de plusieurs centaines de personnes ont également eu lieu à Toronto, samedi, ainsi que dimanche à Londres, en Angleterre.
En France, à Bordeaux, quelque 300 personnes ont participé lundi à un rassemblement statique, au cours duquel ils ont notamment observé une minute de silence avec un genou à terre, en référence au geste popularisé par le joueur de football américain Colin Kaepernick, devenu porte-voix des protestations contre les violences policières.
Les sportifs noirs rejoignent le mouvement
Après LeBron James, l’entraîneur des Golden State Warriors Steve Kerr, l’ancienne star du football américain Colin Kaepernick ou la star montante du tennis américain Coco Gauff, l’ancienne superstar du basket NBA Michael Jordan s’est jointe au mouvement. « Nous en avons assez », a-t-il déclaré, se disant « aux côtés de ceux qui dénoncent le racisme enraciné et la violence envers les personnes de couleur dans notre pays ».
A l’étranger, notamment, trois joueurs noirs de Bundesliga ont rendu hommage ce week-end sur les terrains allemands à George Floyd. Le geste le plus spectaculaire a été celui de l’attaquant de Mönchengladbach Marcus Thuram, qui a mis un genou à terre pour célébrer un but.
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