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Des espions, la dictature et le mal : nos choix de lectures

jeudi 4 juin 2020 par Charles

Chaque jeudi, la rédaction du « Monde des livres » propose une sélection de ses coups de cœur littéraires.
Publié aujourd’hui à 00h19, mis à jour à 06h48

Temps de
Lecture 5 min.

Le Brexit et les Russes sous la plume de le Carré, une espionne férue de lettres, les ressorts de la dictature ou la figure de « l’Exécrable », notre sélection de la semaine fait la part belle à l’histoire et la géopolitique.
ROMAN. « Retour de service », de John le Carré
Si l’on en croit John le Carré, les choses n’ont guère changé depuis cet Espion qui venait du froid (Gallimard, 1964) qui a fait sa gloire, en pleine guerre froide. « La Russie n’avance pas vers un avenir radieux, elle repart en arrière vers son passé sombre et délirant. » Quant à son implication dans le Brexit, assortie d’un cocktail de mensonges politiques, de financements occultes et de piratage effréné, quel romancier d’espionnage y résisterait ?
Pas lui en tout cas, qui s’en donne à cœur joie pour pester contre son pays, Donald Trump et son « racisme institutionnel », l’idée d’un Royaume-Uni totalement à la botte de cette même Amérique, et celle d’une Russie devenue l’ennemie mortelle des démocraties libérales.
Comme souvent désormais, son héros n’est plus très fringant. Officier traitant sur le retour, Nat vient d’être affecté à Londres à la tête du Refuge, un « dépotoir » où échouent les transfuges russes sans valeur. Son seul titre de gloire : il est resté un imbattable joueur de badminton. Et c’est dans sa salle de sport habituelle, l’Athleticus de Battersea, que nous faisons sa connaissance… Quelques minutes seulement avant que lui-même ne fasse celle de l’inconnu trop habile qui précipitera sa chute.
Récit d’un piège machiavélique, Retour de service est le vingt-cinquième roman de John le Carré. Privilège de l’âge, l’écrivain, 88 ans, s’y lâche avec son humour habituel et une jubilation palpable. Le lire est comme s’installer dans un vieux chesterfield avec un bon brandy. On écoute l’ancien espion de Sa Majesté parler stratégie et géopolitique, raconter l’histoire d’un monde déboussolé, sans rêve ni horizon, excellant comme toujours à percer l’esprit d’une époque.
Comme Nat au badminton, le Carré est resté rapide, précis, réactif. Avec, en plus, un sourire de mélancolie douce. Bref, il emporte la partie, avec maestria. Florence Noiville


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