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Pour le pays…

mercredi 12 août 2020 par Charles

J’ai chanté ça dans mon enfance. Et pas seulement par intention poétique (la poésie est l’enfance retrouvée), mais plus par lucidité citoyenne, je veux revenir à ce chant, à cette notion de pays qui, pour contradictoire qu’elle soit, porte la proposition d’un nous habitant un espace sans que la relation de l’un avec l’autre ne consiste qu’en sa mise à mort.
Lutte d’influence pour avoir l’hégémonie d’une éventuelle transition. Sectarisme de l’un ou de l’autre. Campagne de dénigrement contre tel leader politique. Méfiance vis-à-vis d’un autre à cause de son origine. Existence de plusieurs propositions de sortie, les unes probablement aussi valables que les autres, chaque groupe porteur essayant de convaincre les autres d’accepter sa proposition. Ces groupes appartiennent souvent à ce qu’on pourrait appeler une même famille, voire une même idéologie politique.
Personnellement, je me méfie de tous. Mais la méfiance ne peut aujourd’hui être mon guide devant l’évidence d’un acte historique à poser.
Dans toutes les classes sociales, parmi les fidèles de toutes les confessions, chez les citoyens impliqués dans tous les domaines d’activité, de l’art à l’industrie, de la production agricole au commerce informel, la conscience, le sentiment que ce pays est en train de pourrir sur place. La conviction intime que la proposition d’une mascarade électorale organisée par Jovenel Moïse/PHTK n’est pas viable. Que, même lorsque, à grands coups de répression et de corruption, elle parviendrait à se matérialiser, elle ne produirait que plus d’arbitraire et de division, plus de pauvreté et de problèmes sociaux.
Tous, sauf le pouvoir et ses alliés de toutes les classes sociales, ont conscience que rien n’est assuré au citoyen. Ni leurs biens pour ceux qui en possèdent. Ni le droit à un travail et des services minimaux pour la majorité. Une folie dictatoriale, un recyclage de corrompus.
Pour le pays, arrêtez cette œuvre de destruction. Cela demande de la modestie de la part de tous. Cela demande, avec la part de lucidité qui protège de l’angélisme, mais aussi avec la part d’engagement et de rêve qu’il faut à la résolution commune, qu’une vaste entente soit établie entre tous les secteurs de la vie civile et politique, toutes les forces sociales, tous les groupes sociaux, à la seule exclusion de Jovenel Moïse/PHTK. Une entente basique dans laquelle l’enseignant, l’ouvrier, la droite, la gauche, l’artiste, l’entrepreneur, le peintre en bâtiment, l’agriculteur, les mouvements féministes, les (vrais) représentants de tous les cultes, nous tous enfin qui voulons vivre ici sans être les assassins des autres et aménager des conditions acceptables pour tous, pourrions-nous retrouver et peut-être enfin nous trouver.
Pour le pays, dire ensemble, d’une seule voix et de toutes nos voix : les élections ne sont pas possibles avec Jovenel Moïse, les rendre possible exige son départ au plus tôt. Faire entendre au monde et à nous-mêmes cette résolution commune. C’est de cette vaste entente que peut naître une proposition concrète de transition acceptable pour tous. Quitte à fondre celles qui existent déjà en une seule.
Nous ne sommes pas des saints, et c’est avec nos défauts et nos divergences qui ne seront pas soudain résolues miraculeusement, que nous devons établir cette entente minimale.
Pour le pays, sachant que nous n’en avons pas la même vision mais dans une action commune pour que ces désaccords (re)trouvent une expression démocratique.

Antoine Lyonel Trouillot
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