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« Ici, tout est possible. Ce n’est pas une pandémie minable qui va changer ça » : New York, année zéro Par Stéphanie Chayet

vendredi 18 décembre 2020 par Charles

REPORTAGEC’est un visage défait qu’offre aujourd’hui la première ville des Etats-Unis, touchée de plein fouet par la pandémie. Celle qui ne dort jamais est sur le point de s’éteindre, annoncent les Cassandre. Pourtant, dans certains quartiers, la crise stimule la créativité, réveille la convivialité et rend enfin les loyers accessibles.

Elle avait prévu de rentrer chez elle le 3 juin, date du vingt-cinquième anniversaire de son arrivée à New York, sa plus longue histoire d’amour, comme elle dit. Confinée depuis deux mois et demi dans son Kentucky natal, Deborah Lancaster (le nom a été modifié) avait hâte de retrouver ses amis et sa routine. Et puis, par une météo splendide, dans les dernières heures du mois de mai, des émeutes comme Manhattan n’en avait pas connu depuis la grande panne de courant de 1977 ont éclaté dans son quartier. Un ami, « qui n’est pas un alarmiste », un homme de presse, résident de SoHo comme elle, lui a envoyé une vidéo du pillage d’un magasin de baskets situé à deux pas de chez eux. Sur la bande-son, on entendait distinctement des coups de feu. Il lui a dit : « Reste où tu es. »

SoHo est méconnaissable quand cette publicitaire se décide à rentrer chez elle, au début de l’été. Paysage irréel : on marche dans la rue entre des murs de contreplaqué. L’ambiance lui rappelle le New York de ses jeunes années, plus bohème, moins policé. « Les graffitis sont de retour, les Boombox, les gens qui urinent dans la rue, les laveurs de pare-brise, les feux de poubelle, tous ces phénomènes qui avaient pratiquement disparu. La manche est de retour comme jamais, on ne peut pas dîner dehors sans être accosté. » Le plus étonnant, poursuit-elle, ce sont ces SDF qui vivent sur le trottoir, sous des échafaudages, dans l’East Village, avec matelas, table, fauteuils, tapis parfois, mais sans murs ni toit : elle n’avait rien vu de pareil depuis des lustres. Habituels à Los Angeles ou à San Francisco, ces campements sauvages n’avaient plus cours à Manhattan depuis la fin du siècle dernier.


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