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Syrie : l’opposition accepte finalement de venir aux pourparlers de Genève

vendredi 29 janvier 2016

Après quatre jours d’hésitations, la principale coalition de l’opposition syrienne a finalement décidé de rejoindre les discussions ouvertes vendredi par l’ONU à Genève avec des représentants du régime pour tenter de mettre un terme à la tragédie dans le pays.

Le Haut comité aux négociations (HCN), qui regroupe des opposants politiques et des groupes armés, va dépêcher "entre 30 et 35 personnes" en Suisse, a déclaré à l’AFP un de ses hauts responsables.

"J’ai de bonnes raisons de croire qu’ils envisagent très sérieusement d’être en mesure d’entamer les discussions, peut-être dimanche", a pour sa part indiqué l’émissaire de l’ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, à l’issue d’une rencontre avec la délégation du régime de Damas.

Le HCN, formé en décembre à Ryad, avait refusé d’entamer les négociations tant que les bombardements de civils et le siège de localités se poursuivraient. Mais ils ont obtenu des garanties "de la part des Nations unies et d’autres acteurs", a déclaré Farah Atassi, une opposante proche du HCN, lors d’une conférence de presse à Genève.

Dans la soirée, les Etats-Unis, l’Arabie saoudite la France ont salué, dans des communiqués distincts, la décision du HCN de participer aux discussions.

Tous trois ont fait référence à la résolution 2254 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui prévoit notamment un arrêt des bombardements des zones civiles et un accès aux localités assiégées.

"Tout doit être fait pour donner sa chance à une solution politique", a souligné la présidence de la république française.

- Enjeu énorme, minces espoirs -

M. de Mistura a rencontré la quinzaine de membres de la délégation de Damas emmenée par l’ambassadeur syrien à l’ONU, Bachar al-Jaafari.

Les Syriens n’ont pas commenté l’entretien, que l’envoyé des Nations unies a qualifié de "réunion préparatoire".

Celle-ci a toutefois donné le coup d’envoi symbolique d’un dialogue inter-syrien, arraché au forceps sous pression de la communauté internationale et prévu pour durer six mois.

Les grandes puissances espèrent que les Syriens parviendront à mettre un terme à une guerre qui a fait plus de 260.000 morts et des millions de réfugiés et déplacés depuis mars 2011.

Selon la feuille de route, fixée dans une résolution de l’ONU en décembre, les Syriens doivent se mettre d’accord sur un organe de transition chargé d’organiser des élections à l’horizon mi-2017.

Pour y parvenir, l’ONU mise sur des discussions indirectes, les parties étant dans des salles séparées, des émissaires faisant la navette entre les deux.

L’enjeu est énorme, mais les espoirs sont ténus, compte-tenu de l’extrême complexité du dossier.

Le sort du président Bachar al-Assad, sur lequel ont achoppé de précédentes négociations, est la question la plus épineuse, l’opposition souhaitant son départ dès la formation de l’autorité de transition, ce que le régime et ses alliés russes et iraniens refusent.

Quelques dizaines de manifestants s’étaient réunis vendredi après-midi devant le siège de l’ONU à Genève pour scander : "al-Assad, Al-Qaïda, mêmes méthodes, même combat". "Assad n’est pas la solution au terrorisme, il en est la cause", ont-ils ajouté.

Les puissances occidentales, qui ont longtemps réclamé le départ du président syrien accusé d’être le boucher de son propre peuple, ont infléchi leur discours face à la percée du groupe Etat islamique (EI) considéré comme la menace principale.

Depuis août 2014, une coalition menée par les Etats-Unis mène des raids aériens sur les positions de l’organisation jihadiste en Irak et en Syrie. Vendredi, les Pays-Bas ont annoncé qu’ils allaient aussi frapper en Syrie.

- Urgence humanitaire -

Depuis l’automne, les Russes effectuent aussi des bombardements aériens sur la Syrie. Selon les Occidentaux, ils visent surtout les groupes d’opposants au régime de leur allié Bachar el-Assad.

Leur action a permis au pouvoir de regagner du terrain, ce qui renforce sa position dans les négociations.

"La Russie et le régime sentent qu’ils sont lentement en train de prendre le dessus sur l’opposition, que la tendance à partir de là ne leur est pas défavorable", estime Yezid Sayigh, du centre Carnegie pour le Moyen-Orient.

Les pourparlers s’annoncent donc âpres, bien que l’urgence humanitaire soit grande. Selon le Programme alimentaire mondial (PAM), 18 zones sont assiégées en Syrie, et plus de 4,6 millions de personnes ont peu ou pas accès à l’aide humanitaire.

"Il est totalement inacceptable que les gens continuent à mourir de faim, et que les patients dans un état critique soient toujours dans la ville alors qu’ils auraient dû être évacués il y a des semaines", s’est indigné Brice de le Vingne, Directeur des opérations de MSF à propos de la situation à Madaya, ville encerclée par les forces progouvernementales depuis six mois.


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