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Etats-Unis : l’exercice d’équilibriste d’Obama sur les questions raciales

mercredi 26 novembre 2014

Obama "ne veut surtout pas être "le président noir". Il veut être le président de tous les Américains", selon une figure du mouvement des droits civiques.

Le premier président noir des Etats-Unis avance prudemment : il appelle au respect des décisions de justice tout en assurant comprendre la colère de ceux qui ont le sentiment, à juste titre souligne-t-il, que la couleur de leur peau a un impact sur la façon dont la loi est appliquée. "Ce sont des problèmes réels", a-t-il lancé lundi soir, le visage grave, évoquant "l’héritage de la discrimination raciale dans ce pays", quelques heures après l’annonce de la décision d’un jury populaire de ne pas poursuivre le policier. "Nous devons les confronter et ne pas les nier ou de les étouffer", a-t-il ajouté, tout en rejetant avec fermeté tout recours à la violence.

Obama n’est jamais allé à Ferguson

À Ferguson, dans le Missouri, mais aussi ailleurs dans le pays, certains manifestants lui reprochent des prises de position trop timorées ou regrettent qu’il ne se soit pas rendu sur place depuis la mort de Michael Brown, abattu le 9 août en pleine rue alors qu’il n’était pas armé. La Maison Blanche n’écarte pas l’hypothèse mais souligne qu’elle n’est pas à l’ordre du jour.

"C’est une ligne de crête mais il l’emprunte de façon extrêmement habile", estime Julian Bond, président honoraire de la grande association de défenses des Noirs aux Etats-Unis, la NAACP. "Il ne veut surtout pas être "le président noir". Il veut être le président de tous les Américains", explique à l’AFP cette figure du mouvement des droits civiques.

C’est la deuxième fois depuis son arrivée au pouvoir en 2009 que M. Obama, élu grâce au soutien massif des minorités et des afro-américains en particulier, doit gérer les énormes attentes placées sur ses épaules sur ce sujet sensible. La mort de Trayvon Martin, jeune homme noir de 17 ans abattu en février 2012 en Floride par un vigile alors qu’il se promenait sans armes dans un quartier résidentiel, avait été la première.

"Il est critiqué quoi qu’il fasse"

Prudent dans un premier temps, il s’était livré de manière beaucoup plus personnelle à l’issue du processus judiciaire qui avait abouti à l’acquittement du meurtrier, en juillet 2013. "Il y a 35 ans, j’aurais pu être Trayvon Martin", avait-il lancé, parlant de la "douleur" provoquée par cette décision au sein de la communauté noire.

"Dans l’affaire Trayvon Martin, ses détracteurs lui ont reproché de s’impliquer. Cette fois, on lui reproche le contraire. Il est dans un rôle où il est critiqué quoi qu’il fasse", juge Adolphus Pruitt, président de la branche de NAACP de Saint Louis, ville voisine de Ferguson. "Cela ne me dérange pas que le président soit prudent sur un incident particulier, mais je m’attends à ce qu’il s’implique fortement sur le besoin de changement et de dialogue, à travers tout le pays, sur cette question", ajoute-t-il.

Si le grand jury a exclu des poursuites à l’encontre du policier Darren Wilson, un enquête fédérale est toujours en cours pour se pencher sur une éventuelle violation des droits civiques de la victime, Michael Brown. Mais plus de trois mois après les faits, aucune conclusion n’a encore été rendue et rien n’indique que les autorités fédérales engageront des poursuites.

Comme pour Obama, le positionnement est difficile pour Eric Holder, premier ministre de la Justice noir de l’histoire des Etats-Unis. Dès les premières émeutes après la mort de Michael Brown, il s’était rendu sur place, tentant de panser les plaies d’une communauté déchirée par les violences. Mais la marge de manoeuvre est étroite. Et si aucune poursuite fédérale n’est finalement engagée, l’administration Obama devra se préparer à gérer une nouvelle vague d’indignation.

"Il n’y a pas une Amérique noire et une Amérique blanche, il y a les Etats-Unis d’Amérique", lançait M. Obama en juillet 2004 à la Convention démocrate lors du discours chargé d’espoir qui allait le propulser sur le devant de la scène politique nationale. Depuis, s’il souligne inlassablement les progrès accomplis depuis les années 60, il appelle régulièrement à la "vigilance". "Pour conforter les acquis de ce pays, il faut de la vigilance, pas de la complaisance", lançait-il le 28 août 2013 lors des célébrations des 50 ans du discours de Martin Luther King, "I have a dream".


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